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 (johan&meera) the screaming of the lambs.

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 (johan&meera) the screaming of the lambs.   Mar 13 Aoû 2019 - 15:06
the screaming of the lambs
« You still wake up sometimes, don't you? You wake up in the dark and hear the screaming of the lambs. And you think if you save her, you could make them stop, don't you? You think if she lives, you won't wake up in the dark ever again to that awful screaming of the lambs. » Thomas Harris.  

Ligne de fuite, ligne de vie. Elle a disparu quelque part, dans l’horizon de ses rêves illusoires. Des espoirs déchus, créés par la bêtise. Pâleur candide, estropiée par l’univers de la nuit. La soif des regards sur le corps encore trop inexpérimenté l’a meurtrie, a rendu opaque les candeurs toujours diaphanes. Elle était trop jeune pour s’aventurer dans le noir, pour offrir les lignes de son corps contre une somme dérisoire. Elle ne valait pas tout l’or qu’ils pouvaient donner. Elle avait encore tant, oui, tant à espérer. Nina et ses sourires aux atours d’infinis. Nina et le tintement de ses rires pour réchauffer le cœur, pour désincarner les vices cachés. Elle a disparu un jour, sans promesse de retour. Elle si constante, dans sa manière très scolaire d’arriver toujours à l’heure, de recourber ses cils, de rehausser la pâleur de son teint d’artifices appris jusqu’au bout des ongles. Meera ne la connaissait pas intimement. On ne peut pas dire qu’elles aient un jour été amies, ces liens-là demandant plus de temps qu’il ne leur a été offert pour se dessiner. Mais il y avait cette solidarité qui s’instaure entre les êtres embarqués sur le même navire, désabusés et ivres. Il faut se maintenir en équilibre, garder la tête haute. S’accrocher, forcené, presque galérien, à la décence qui s’enfuit quand le rideau tombe, et que les héros de la nuit s’évanouissent pour se laisser gangréner par leurs appétences. Elle avait la stupidité de son âge, l’imprudence de la jeunesse. Elle accordait des faveurs trop grandes aux clients de passage, divulguant les sourires et la chair impie sans savoir que tout ce que l’on offre, on ne le récupère jamais. Et elle est partie, quelque part, un jour. Elle a rompu la ligne tracée pour la rendre courbe. Une brèche sur le sol. Une cassure sur le parcours. Elle n’a prévenu personne. Pas un mot, pas un regard. C’est sans doute ce qui a alerté Meera, éveillant au creux de son ventre des instincts façonnés par la violence. Plusieurs fois, innocemment sans doute, Nina lui a parlé d’un client régulier, qui se payait le luxe de ses danses exclusives sous l’alcôve réservée. Il lui offrait une coquette somme pour la regarder onduler. Nina le trouvait bizarre, ce gars-là. Parce qu’il avait des yeux en clair-obscur, aussi placides et froids que le marbre, et qu’il ne cherchait jamais à la toucher. Une fois elle s’est approchée de lui, elle a glissé ses doigts de femme-enfant sur son épaule. La réaction a été épidermique. Alliage de fascination et de dégoût, se mirant dans ses deux iris aussi fascinantes qu’impitoyables. Nina en a eu peur, et en même temps, quelque chose chez lui a éveillé en elle des émois troublants. Elle s’est imaginé vivre une aventure avec lui, se sentant différente, unique, juste parce que comme tous les autres, il n’avait pas essayé de la peloter. Elle n’a pas su faire la différence, entre les instincts qu’il convenait de poursuivre et ceux au contraire qui vous poussent à l’éloignement. Elle ne s’est plus présentée un jour, à son heure d’embauche. Et lui … Lui … On ne l’a pas revu non plus. Carte du hasard, abattue sur la table vernie. Meera l’a signalé à son supérieur, mais furieux qu’il était à l’idée que l’une de ses danseuses les plus rentables se paye le luxe d’un abandon de poste, il ne l’a pas écoutée, ou même entendue. Et quand elle a évoqué l’idée de prévenir la police, il a menacé de la virer. Sans doute parce qu’il veut préserver le petit business qu’il a mis en place dans les sous-sols. Et que la comptabilité, ça n’a soi-disant jamais été son fort, surtout lorsqu’il faut redistribuer les pourboires. Les nuits se sont écoulées. Et Nina, elle s’est évanouie quelque part. Elle a pourchassé dans le lointain les plaisirs perdus de l’enfance qu’elle n’a pas vécu. Elle est redevenue de ces anonymes que l’on croise mais que l’on ignore, dénués d’âme, de matérialité et de rêves puisqu’ils n’appartiennent plus au cycle de notre quotidien.

Une semaine s’est écoulée. Et puis deux. Ils l’ont tous oubliée. Mais pas Meera qui a connu au temps jadis l’enfermement. Qui sait ce que cela fait, de se prostrer dans le silence, et d’être abandonnée par tous. Un matin elle a vu le visage de Nina sur un avis de recherche. Alors elle a fini par porter ses craintes à bout de bras et par appeler le numéro maudit, proscrit. Elle est tombée sur lui, à l’autre bout du fil. Timbre grave de velours, sans visage, dont elle n’a retenu qu’une bribe du nom de famille parce que la réception était mauvaise. Un Mc quelque chose, qui lui a immédiatement mis en tête la vision de rivages nordiques, où les accents râpent sur la langue comme des pierres. Elle ne lui a pas donné son nom, juste l’adresse du club, en lui affirmant qu’elle connaissait la dénommée Nina, qu’elle avait peut-être des informations à son sujet. Sa voix la trahissait déjà de toute manière, avec cet accent hindi en étendard. Elle n’a pas épilogué, raccrochant avant de se faire prendre la main dans le sac. S’il se présentait, elle le trouverait.

Et c’est ce qu’elle a fait. Il s’est pointé dans l’antre de la nuit. Elle l’a vu, plus loin, arrimé au bar. Une dégaine inhabituelle par rapport à la clientèle d’usage. Elle aurait pu se tromper, mais il y a des réflexes qui ne trompent pas pour peu que l’on sache observer le corps lorsqu’il se meut. Elle est sortie de sa position de retraite dans les coulisses, s’est autorisée le droit de venir lui parler à l’ombre des regards du patron, trop préoccupé à prendre les paris illégaux dans l’arrière-boutique plutôt qu’à véritablement veiller au grain. Il les maintient par la pression et la crainte, de toute manière. C’est une recette qui fonctionne à merveille depuis l’aube des temps. Un kimono autour de ses épaules nues, dissimulant son costume ostentatoire de scène, Meera s’est approchée de l’homme. Onde furtive, onde lascive.  Personne ne doit savoir qu’il s’agit d’un flic, et encore moins que c’est elle qui l’a appelé. Alors elle murmure, à son oreille, une fois placée dans son dos :
« C’est moi que vous cherchez. Demandez un show privé avec Meera. Cela vous coûtera quelques billets, mais nous serons plus à l’aise pour parler. Personne ne doit savoir que je vous ai contacté. Ils n’aiment pas trop … les gens comme vous … Ici. »

Et elle disparaît, écume qui se retire du sable brûlant. Ombre de passage que les coulisses rappellent, une fois les instructions données.
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 Re: (johan&meera) the screaming of the lambs.   Jeu 15 Aoû 2019 - 0:11
La beauté. Ce nouveau cas qui me tombait sur les bras. Celui sur lequel nous nous échinions depuis près d’un mois, il se captivait pour la beauté. Pas de contacts avec lui. Pas d’identité. Pas de traces, rien qui permette de l’identifier. Les flics avaient fait ce qu’ils faisaient toujours quand une affaire était aussi obscure que celle-ci ; ils trouvaient un schéma. Ils avaient échoué, durant les deux premières semaines de l’enquête. Quoi de commun à une série de disparitions, en dehors du fait qu’elles étaient suspectes ? Les victimes présumées n’avaient rien à voir entre elles. L’une avait disparu lors de son jogging du matin. Une autre le soir, en quittant son amant. La troisième avait dit se rendre à un rendez-vous galant, avant de ne plus donner signe de vie. Rien dans leurs liens, dans leurs métiers, dans leurs vices et leurs passions. Le seul dénominateur commun était le mode opératoire ; la disparition sans laisser de traces, à chaque fois avant ou après un rendez-vous avec un mystérieux amoureux. Pas d’utilisations de cartes bancaires, pas d’activité sur les réseaux sociaux, pas non plus de signalements… On n’avait même pas été positionnés sur l’affaire, au début. On en était encore à filer un coup de main pour débusquer ces Mad Veterans, des cinglés à la gâchette facile. Finalement, le génie de ce nouveau malade était sa discrétion, et le peu de publicité de ses actions. Des disparitions parfaites mais anodines.


Nous nous étions acharnés à la compréhension de cette nouvelle proie à traquer. Mon instinct me soufflait qu’il n’y avait pas de critères objectifs à ces rapts, mais qu’il chassait autre chose. Une idée. De la femme. Du sexe. Une idée au sens pur du terme. La beauté. Mon intuition, nourrie de plusieurs millénaires d’existence, me soufflait que l’homme -si c’en était bien un- était à la recherche du beau. Qu’en faisait-il quand il le trouvait, ou au contraire, s’il ne le trouvait finalement pas chez celles qu’il capturait ?


Nous ne le savions pas encore.


Cet endroit me galvanise. J’ai toujours aimé l’ivresse de l’alcool ou du sexe, pour les émotions si exacerbées qui se manifestaient de leur jouissance. Mes pouvoirs s’atténuaient sous l’emprise d’un liquide ambré, et mon coeur explosait dans l’échange émotionnel intense qui régissait l’union des corps. La fièvre. C’était ça que les mortels venaient chercher ici. La même fièvre que je ressentais depuis des millénaires, quand le stupre était débridé. Ce genre d’endroit avait toujours éveillé en moi les pires des émotions entremêlées, car je ressentais tout ce que les présents éprouvés. Désir avec tant de nuances qu’il était difficile de le contenir, envie, rancoeur, dégoût, solitude, encore du désir, à n’en plus finir. Ce n’était plus le genre d’endroit qu’il fallait que je fréquente, aujourd’hui. Je n’avais jamais été moins puissant qu’aujourd’hui, à tel point que j’avais parfois l’impression d’être une flammèche vouée à trembloter dans un tourbillon d’émotions avant de s’éteindre.


Mon contact vient d’ici. Danseuse, ce qui peut recouper plusieurs réalités plus ou moins avenantes. Qu’importe. Le Dieu-Juge a hâte de la rencontrer, car dans ce lieu d’expression de ce que l’Homme a souvent de pire, il faut du courage pour appeler un flic à la rescousse. Je dois savoir si elle sait quelque chose d’utile… Je ne peux négliger aucune piste ; je dois vite arrêter l’hémorragie d’âmes que provoque ce nouveau danger en ville.


Le whisky servi au bar est quelconque. Le désir, violent. Tous autour de moi ont envie de quantité de choses plus ou moins enviables. Ils font chanceler la résolution et le pragmatisme. Me contaminent. Trop de pulsions contenues dans cet endroit, que mon pouvoir ne filtre plus. Il y aurait matière à arrestations dans tout ce que je ressens, mais je ne suis pas là pour ça ; je me suis déplacé pour pire, ce soir. Je noie ce raz-de-marée émotionnel dans une nouvelle rasade de whisky, alors qu’une voix s’élève doucement dans mon dos. Peur. De l’excitation qui en découle. La jeune femme, car c’est bien elle, mon contact, a envie de m’aider, mais elle craint cet environnement. Elle me donne l’impression d’être une nageuse en eaux troubles, infestées de requins. Tous ces squales qui la matent autour de moi. Je termine mon verre, sans me retourner, comme si elle n’avait rien dit. Je dois contenir en moi un nouvel assaut d’un désir malsain, dominateur et cruel, d’un délire de domination impossible à sustenter pour de bon.


Je me lève après de longues secondes, termine mon verre et demande une danse de Meera. Et glisse un regard entendu au barman. Des millénaires parmi les Hommes, à les juger. L’homme aime l’argent. Il aime et se nourrit des désirs pervers de ses clients, de ce pouvoir entre ses mains. Billets qui changent de main. Je ne veux pas être dérangé. Je ne veux pas que ça s’arrête à la fin de la seule danse. Je la veux elle, et je la veux pour aussi longtemps que je pourrais en user. Nouveaux billets qui passent d’une poche à une autre.


Une hôtesse m’amène dans la chambre que j’ai acquise temporairement en même temps que les faveurs d’une fille louée pour une bonne partie de la nuit. Je ferme les yeux, debout face à la pièce désormais fermée, aux lumières tamisées. Je me concentre. Rien alentours. Rien à paret un désir puissant, un désir inversement proportionnel à l’exhibition de la donzelle qui elle, n’éprouve que dégoût envers son client, et surtout envers elle-même. Désespoir silencieux, à hurler. Rien d’autre. Je me concentre sur ça ; le rien d’autre. Je ne peux pas être surveillé ici, par un tiers qui écouterait aux portes. Sinon, la danseuse prendrait peur, ou risquait de finir dans le fleuve. Elle arrive bien vite. En « tenue ».


Je suis restée en blouson noir. Assis sur le fauteuil face à la porte. Je dois me fermer à ce que je ressens alentours, et me concentrer sur elle. Partie difficile, vue l’intensité des émotions violemment contradictoires d’à côté. Je la regarde dans les yeux, indifférent à ce corps qui s’exhibe par nature même de son travail. Corps conforme à l’emploi qui en est fait dans ce genre d’endroit, corps parfait, sans aucun doute. Mais ce n’est pas pour lui que je suis venu ici ; des femmes sont peut être encore en train de mourir des fautes d’un malade que je dois arrêter.



| J’ai payé pour une danse privée de Meera, pendant la moitié de la nuit s’il le fallait. Et pour lui faire tout ce que je veux. Ca m’a coûté la peau des fesses, j’ai intérêt d’en avoir pour mon pognon. |


Voix haute. Timbre clair. Je me redresse, prends une inspiration, et me rapproche d’elle. Je ne souhaite pas l’intimider.  Je dois d’abord si c’est vraiment elle. Au cas où. Ce ne serait pas la première fois dans ma longue existence que quelqu’un tente de me piéger. Je me fiche bien du fric ; je ne suis pas un humain, il me sert essentiellement à acheter de quoi m’aider à accomplir ma mission, comme ce soir.


| Si vous êtes Meera, vous savez déjà ce que je veux. |


Qu’elle me dise tout, et sans secrets.


Dernière édition par Johan McRawne le Mer 21 Aoû 2019 - 14:04, édité 1 fois
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 Re: (johan&meera) the screaming of the lambs.   Mer 21 Aoû 2019 - 11:49
the screaming of the lambs
« You still wake up sometimes, don't you? You wake up in the dark and hear the screaming of the lambs. And you think if you save her, you could make them stop, don't you? You think if she lives, you won't wake up in the dark ever again to that awful screaming of the lambs. » Thomas Harris.  

La tête s’incline, le regard dérive. Elle suit la ligne de l’arrière de sa nuque, poursuit le sillage courbé qui enjoint le menton à l’épaule. Les notes de son parfum viennent chatouiller ses narines. Fragrance musquée. Fragrance danger. Meera fait dans sa tête un rapide inventaire de sa persona. Grand. Athlétique. Des mains immenses. L’éthique désincarnée par le whisky qu’il a commandé au bar, alors qu’il est censé être en service. Censé. C’est ce qu’elle se dit, dans le jugement implacable qu’elle glisse autour de ses épaules. Linceul de mort, pour maquiller les craintes qu’elle éprouve. Elle sait ce qu’ils peuvent être, ces hommes qui sous couvert d’un bel insigne doré, pensent pouvoir assoir leur domination sur le petit monde qui les entoure. Tyrans engoncés dans un uniforme guindé. Le pouvoir, greffé sur les lèvres que la corruption ne cesse d’effleurer. Un joli billet, des menaces fleuries. Leur allégeance s’achète, pour peu que l’on ait les moyens de se l’offrir. Les êtres inflexibles, les êtres de principes, elle se demande s’ils existent encore. S’il en fait partie, lui et ses airs effarouchés de sculpture de magasine, façonné dans le marbre et l’ivresse. Lui que les effluves de la nuit font réagir, lui qui se perd, lui qui se noie, dans l’abîme d’illusions qui ondulent, tout autour. Parce que sa sensibilité se met en exergue lorsqu’il la sent apparaître dans son dos. Elle s’épanouit en corolle, tout autour. Silhouette nébuleuse, qui à force de côtoyer les corps, a su en déchiffrer les usages. Ce n’est peut-être pas seulement elle. L’ambiance toute entière joue sans doute un rôle dans cette tension qu’elle sent s’émaner de ses membres, de ses doigts qui s’impriment avec plus de prégnance sur le verre. Elle se retire une fois les instructions données, s’égare jusqu’aux coulisses qui la détiennent, la retiennent.

A rebours, la crainte grimpe en mélopée au fond de son ventre. Elle caresse ses entrailles, les refroidit jusqu’à lui donner la nausée. Et s’ils savaient ? S’ils l’apprenaient ? Ils la mettraient dehors, balancée écorchée vive sur le macadam qui suinte. L’orgueil estropié, trainé sur le sol comme un cadavre. Mais elle songe à Nina. Elle s’accroche au faible souvenir de ses sourires, gravé à l’intérieur de son crâne. A son indolente jeunesse, qui mérite de s’épanouir encore avant d’être entièrement arrachée. Et à lui … Lui. Lui qu’elle a déjà vu à plusieurs reprises, spectre dérangeant au faciès d’ange, une lueur sépulcrale dans le regard. Il n’a jamais demandé à la voir danser. Elle n’était pas son genre. Trop brune. Trop hâlée. Trop vieille. Il les préfère extrêmement jeune, presque informes encore. Des cheveux d’or sur la peau albâtre. Comme Nina … Comme Nina. Alors elle ravale ses peurs Meera, elle s’accroche aux principes affaiblis de sa nature et au courage qui ne tient qu’à un fil. Un fil tendu, au-dessus du précipice. Sur les pointes, elle se fait funambule, tête haute. Pour oublier l’humiliation et la honte. Pour oublier ce qu’elle représente, derrière les artifices de la chair. Une fille que l’on achète, une fille que l’on vend. C’est tout ce qu’elle incarne maintenant. Un forfait à l’heure, les vertus sacrées de la danse oubliées pour le bon plaisir des portefeuilles bien garnis.

Mécanique usée jusqu’à la corde, Meera attend que la musique commence derrière le rideau de velours. Il a bien suivi ses instructions, bon élève, que l’appât du gain a dû motiver comme personne. Et elle sent sa présence, quelques mètres plus loin.  Elle aurait pu le convoquer ailleurs, mais elle s’est dit que le meilleur moyen de devenir invisible, parfois, c’est sans doute de se placer juste sous le nez de la personne qui pourrait vous chercher. Et puis elle sait que les caméras de surveillances dans les carrés privés sont factices. C’est pour ça que le patron s’est payé le luxe de mettre un vigil de plus, dans le couloir adjacent. En cas où des clients se montreraient un peu trop entreprenant envers la marchandise.  La musique couvrira leurs voix, ils penseront tous qu’elle s’adonne à sa petite routine. La stratégie lui semble idéale, pour peu qu’il n’y ait pas de revers de fortune. Alors elle ne se démonte pas. Elle ravale l’orgueil et la honte, apparaît dans sa tenue de scène, aussi tapageuse qu’équivoque. Les breloques tintent à ses chevilles, miroitent sur la peau du ventre. Elle s’avance dans une démarche feutrée, silhouette de fauve, enclavée dans ses propres appréhensions tenues en bride. Son regard se pose dans le sien un peu plus loin, poursuit les pourtours des traits de son visage. Les premières paroles fusent, et la douche froide est instantanée. Meera s’arrête, cesse de ravaler la distance qui les sépare encore. Elle croise les bras au-devant de sa poitrine, impériale, presque austère, dans sa manière de recevoir ses réflexions aussi machistes que malhabiles dont il vient de la gratifier.
« C’est moi qui fixe les règles. Que vous ayez payé une fortune ou non, ça ne change rien. Et vous n’allez certainement pas me faire ce que vous voulez. Vous avez quoi, un oursin dans le porte-monnaie ? A l’évidence, vous avez été épargné par la notion de finesse à la naissance. On a oublié de vous l’inculquer. »

Il se lève, prend de la hauteur. Il la surplombe, forcément. Meera a envie de reculer, plus par instinct qu’autre chose. Mais elle prend une longue inspiration, ne se démonte pas. Les pieds ancrés dans le sol, maintenus bien en place. Elle lève légèrement le menton pour le regarder, raffermissant la prise de ses bras croisés au-devant de sa poitrine, comme si réellement cela pouvait la protéger.

« Je suis Meera. Et je ne parle pas à des étrangers. Déclinez-moi votre identité, et nous aviserons ensuite. Je veux être sûre que vous n’êtes pas corrompu ou corruptible comme la plupart de vos congénères. »

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 Re: (johan&meera) the screaming of the lambs.   Mer 21 Aoû 2019 - 13:48
La jeune femme me dévisage, courroucée. Je sens en elle la colère. La vexation de mes mots. Un fort sentiment d’indépendance, et de préservation. Je sens tout mais elle bouillonne, gâchant la bonne lecture de ses émotions. Je reste toutefois à l’affût, et mon expérience séculaire me permet d’identifier la raison de tout cela. La peur. L’angoisse d’être surveillée, sans doute, je sens une certaine oppression dans son âme. Le choix de l’endroit, bien sûr, même s’il est malin. Peut être aussi une certaine rancœur, soit envers les flics, soit envers les hommes… Peut être envers moi directement ? Les chances étaient minces. J’étais amené à fréquenter ce genre de bouge, pour diverses raisons, mais je ne me rappelais pas d’un comportement inapproprié de ma part à quelque occasion que ce soit. Je n’avais pas toujours été blanc comme neige, tout au long de mon existence.


Elle me fait l’effet d’une femme pleine de volonté, de détermination brute. D’une intelligence qui ne contraste pas avec sa tenue, si on peut l’appeler ainsi ; elle sait utiliser son corps et si je ressens une part de honte en elle, son air farouche en fait sans aucun doute une personne courageuse. Elle luttait contre sa peur, et ses diverses appréhensions tant pour sa collègue (amie ?) ou pour elle-même. Forcément, ce genre d’émotion, de contraste, me faisait lui vouer un certain respect. C’était ma nature de savoir jauger de l’âme des gens, et je ne me trompais que rarement chez les humains. Cela ne m’inclinait pas à l’apprécier ; je n’étais pas là pour ça. Je soutiens son regard, quand elle me répond vertement.



| Ne montez pas sur vos grands chevaux, Meera. Je vous partageais les mots échangés avec le type en bas. Je l’ai rincé, et pas qu’un peu, sous prétexte de passer du temps en privé avec vous. Quand je sortirais, s’il vous demande ce qu’il s’est passé, vous saurez plus encore quoi lui dire ; nos violons doivent être bien accordés si vous ne voulez pas de souci avec vos patrons. ¬|


Autant être direct. Mais elle pourrait au moins sentir, je l’espérais, à mon ton ou à mon attitude qu’effectivement, je ne voulais pas lui faire « tout ce que je veux », mais que ce que je voulais, c’était simplement ses informations. Tout le monde savait comment ça marchait, dans ce genre d’endroit. Des brutes, le plus souvent, pour éloigner la concurrence et maintenir l’ordre chez leurs filles, qu’ils considéraient bien souvent comme du cheptel. Combien de fois m’étais-je retrouvé en mauvaise posture face à ces esclavagistes des temps modernes ? Quoiqu’il en soit, Je me fichais du fric, je me fichais des dangers éventuels de ma présence ici, mais ce n’était sûrement pas son cas, alors je cherchais à la couvrir.


| Mais vous avez raison, je n’ai aucune éducation. |


Pas de père, pas de mère, rien d’autre que l’expérience de l’Homme, et on ne pouvait pas dire que l’Humanité était si éloignée du monde des bêtes par les pulsions qui l’habitaient. Langue bien pendue, pour une danseuse presque à poil. Courageuse, c’était maintenant certain. Voire téméraire. Je me rassieds donc. La dévisage d’un air neutre, mais pas indifférent. Je n’étais pas venu pour me faire suspecter de quoi que ce soit, mais je devais bien y mettre du miens pour obtenir des informations.


| Je suis le capitaine Johan McRawne, du SCU. Je suis venu suite à votre appel, pour savoir ce qui était arrivé à votre collègue. Et pour voir ce que je pouvais faire pour elle. |


Je produis ma plaque, la lui tends si elle veut lire mes papiers officiels.


| Quant à ma probité… Je viens de claquer une liasse de billets pour parler en tête à tête à quelqu’un qui dit avoir des informations sur une enquête en cours. Je me fiche de mon blé, mais je prends le risque de m’être fait avoir, si c’était qu’un arrangement entre vous et le type en bas pour soutirer du pognon à un flic crédule. Je suis là aussi, avec tout le degré de danger que ça peut impliquer pour vous comme pour moi. Si vous ne vous sentez pas assez en confiance pour parler, dites-le tout de suite. Le temps qu’on passe ici doit servir à quelque chose, ou bien je vais le passer ailleurs, car des personnes sont en danger, dont votre amie Nina. |


Je me passe une main dans la barbe, réfléchissant une seconde, détournant le regard vers la porte derrière elle.


| Je pense que vous êtes vraiment inquiète, pour votre amie. Sinon vous ne m’auriez pas fait venir jusqu’ici, de toute évidence. Et moi, je crois que vous avez vu quelque chose. Si c’était juste un signalement, vous vous seriez arrêtée au téléphone, je pense. Quelles sont vos règles alors, Meera ? |
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 Re: (johan&meera) the screaming of the lambs.   Lun 21 Oct 2019 - 11:21
the screaming of the lambs
« You still wake up sometimes, don't you? You wake up in the dark and hear the screaming of the lambs. And you think if you save her, you could make them stop, don't you? You think if she lives, you won't wake up in the dark ever again to that awful screaming of the lambs. » Thomas Harris.  

La crainte dans le ventre se faufile, pourlèche les plaies déjà béantes des peurs que l’existence laisse en héritage sur la peau nue. Elle se souvient de la sensation que l’on éprouve, quand les entrailles se tordent, qu’il faut contempler l’abîme grande ouverte sous les pas, l’amertume qui filtre sous les doigts. Les instincts farouches de sa nature se déploient en corole, s’arment d’impériosité face à cet homme qui la supplante de corps et de statut. Parce qu’elle n’a pas confiance. Elle n’a jamais eu confiance en ces institution qui un beau jour, plutôt que de la protéger, l’ont renvoyée sous les coups d’un homme qui pensait qu’un contrat de mariage signé lui donnait le droit de la briser. Il n’y avait personne pour la recevoir ou l’entendre. Personne pour la soutenir. Personne pour faire face au poids d’un gros chèque que l’on signe pour acheter le silence. Une contrainte parmi d’autres, dont on se débarrasse sans scrupules. Parce qu’il y en a tant après tout, de la racaille, de la victime. C’est un mélange confus et écœurant qui fini par vous engluer. Meera s’est efforcée de se dire qu’ils n’étaient pas tous ainsi. Qu’il y avait encore, sans doute, des entités aux valeurs inébranlables et aux idéaux utopiques. Le hasard l’avait conduite vers les mauvaises personnes. Ironie. Drame. La méfiance est là, sublime et cruelle à la fois. Elle le regarde et le juge, impitoyable courroux qui s’abat sur ce qu’il incarne et non ce qu’il est, victime des préjugés qu’elle appose sur sa silhouette d’homme pour se préserver elle en retour. Son regard dérive, le dévisage. L’opacité de ses prunelles froides le décompose. Elle l’écoute, elle ne l’interrompt pas. Il cherche à la deviner lui aussi, elle le sent dans l’acuité des œillades qu’il pose sur sa persona. Elle n’aime pas ces regards qui percent, qui cherchent à distinguer les fêlures pour s’y infiltrer. Alors elle se calfeutre, dans l’écrin de la chair. Son malaise se tait mais les muscles se tendent, sous la soie de la peau dévêtue. Il fait plus froid que d’habitude ce soir. C’est le froid de la mort qui guette, qui rôde. Cette mort invoquée sans avoir besoin de la dire. Parce qu’elle est morte Nina n’est-ce pas ? Sans doute.
« Tout le monde en a une. C’est l’expérience qui nous éduque et nous façonne. »

Murmure indocile, murmure fragile. Les bras se croisent au-devant de sa poitrine dans une posture défensive, presque pudique. Elle n’aime pas l’inégalité de sa posture, la vulnérabilité qu’elle éprouve. La honte aussi, portée en étendard derrière les artifices qui scintillent sur sa peau hâlée. Danseuse des Mille et une Nuit, prostituant les arabesques de son corps à la perversion des regards. Ils ne la touchent pas, c’est déjà cela. Mais la honte est là, aliénée par les appréhensions qu’elle nourrit sans s’en rendre compte. Elle voudrait être son égale, mais elle ne l’est pas. Elle voudrait tant de choses Meera, mais elle se contente parfois trop de ce qu’elle a. Ses doigts s’avancent avec prudence, presque préciosité. Graciles, lorsqu’ils se saisissent de sa plaque pour l’examiner. Etincelante identité, résumée à ce morceau de clinquant métal. Cela ne prouve pas grand-chose. Mais cela suffit pour le commun des mortels. On montre l’insigne, on y croit. C’est ainsi que cela doit fonctionner. Sans grande conviction Meera lui rend son insigne, le laisse multiplier les phrases et les épithètes. Avare, lorsqu’il s’agit de s’exprimer, ses mots sont des lames méthodiques que l’on plante pour atteindre le dessein recherché en un minimum de coups.
« Elle n’est pas mon amie. »
Et c’est vrai. Elles n’ont jamais été particulièrement proches toutes les deux. Deux créatures à la dérive, embarquées sur le même navire d’infortune. Elle ne sait pas pourquoi elle le précise, broie toute l’empathie qu’elle pourrait avoir pour cette gamine. Elles n’étaient pas amies. Elles n’étaient pas des étrangères non plus. Entre-deux nébuleux, qui justement laisse la place à la confidence.
« Il est trop tard pour elle n’est-ce pas ? Cela fait déjà plus de sept jours. Les chances de la retrouver vivante sont infimes. Et puis … Il la contemplait depuis des semaines déjà. Il ne venait jamais avant. Il n’est jamais revenu après. Il y a des visages, des expressions, qui se gravent au fond de la mémoire, et on ne sait pas pourquoi. »

Elle marque un temps de pause, austère image. La désillusion l’enveloppe, la cajole. Elle ne croit qu’en une destinée impitoyable pour la poupée Nina et ses airs de femme-enfant. Sa pensée se teinte d’une objectivité troublante, presque clinique. Parce que la réalité est ainsi. Sept jours, c’est une éternité. Sept jours, c’est le temps qu’il faut au corps pour devenir entièrement froid et commencer à rejoindre la terre dont on l’a recouvert.

« Je n’ai pas de règle. Si vous ne pouvez pas sauver Nina mais que je peux vous aider à en préserver d’autres, je le ferais, c’est tout. Nina avait un client régulier depuis quelques semaines. Il ne venait que pour elle, et plusieurs fois elle nous a dit qu’il la mettait mal à l’aise. Je crois qu’elle éprouvait pour lui une attirance semée de trouble et de terreur. Il était un peu plus petit que vous, plus fin aussi. Une ossature très élancée. Il avait les yeux vairons … Un œil de chaque couleur, c’est ce que nous avait dit Nina. Et des cheveux gris, presque blancs. J’ignore s’il s’agissait d’une décoloration ou de sa pigmentation naturelle. Ah oui … Et elle avait relevé un détail singulier : il vernissait ses ongles. Du transparent sur quatre doigts, et du vert émeraude sur les auriculaires. Si je le voyais je pourrais le reconnaître. Il aura peut-être laissé son nom sur les registres, mais personne ne vérifie jamais les identités véritables. L’argent fait foi en général. C’est le dernier client que Nina a eu. »
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 Re: (johan&meera) the screaming of the lambs.   Dim 27 Oct 2019 - 18:03
Ce pouvoir qui était le mien était très loin d’être le plus fiable, le plus précis. Sonder le coeur des humains n’était pas une sinécure, loin de là, et il était clair à mes yeux que les personnalités des gens du commun étaient parfois compliquées par des strates qui se superposaient en constante alternance. La fin de ma puissance de jadis, de cette capacité à lire dans les humains comme autant de livres ouverts, sans ténèbres ni retenue, sans problèmes quels qu’ils soient. Mais aujourd’hui, tout était différent. Les gens avaient leurs nouveaux dieux, ils avaient leur argent, leur passion pour l’information et pour leurs propres ambitions. Tout était si confus, et j’étais aujourd’hui plus faible que jamais, car dépassé, rendu obsolète par ce que les gens souhaitaient de plus fort aujourd’hui que l’honneur et la justice. La protection, ils n’allaient plus la chercher dans leur propre force morale, ou selon leurs principes et leurs vertus. Non aujourd’hui, ils misaient tout sur le reste. Sur leur propre individualité, ou ce qu’ils pouvaient retirer les uns des autres. La confiance avait décliné en même temps que la certitude profonde, incompressible, que les autres valaient moins que soi-même.


La jeune femme me soutient que tout le monde avait une éducation. Elle avait raison. Mais ça n’ôtait pas tout sens pour autant à ce que j’avais dit plutôt. Compte tenu de la civilisation actuelle et des mœurs en vigueur, les miennes étaient toutes aussi datées que les trucs qui prenaient la poussière dans les musées. Je ne réagissais pas, alors. Je n’étais pas venu pour polémiquer avec une « danseuse de cabaret », pour le peu que ce titre, ce métier ou ce rôle, qu’importe, ait quelque sens commun que ce soit ici, aux Etats-Unis du XXIème siècle.


Je sens sa honte, et sa posture défensive qui va bien au-delà des bras croisés devant sa poitrine. Ca ne va pas être facile de tirer quelque chose d’elle, je le sens bien. Âme en peine, chancelant sous les coups des autres et du monde. Ca me déchire le coeur, comme à chaque fois, du premier jour comme au millième, et bien plus encore, c’est mon lot, et c’est comme ça. Je n’ai jamais pu changer ce que j’étais. Je ne l’avais pas même voulu, ne serait-ce qu’un seul instant. De la boue de Verdun jusqu’aux sous-bois glacés par moins quarante degrès de l’hiver 1812, j’ai toujours été le vieux même Teutatès, perdu dans la croisade pour la justice d’un monde qui n’en avait aucune. La danseuse me dit que la fille n’était pas son amie. Peut être pas au sens moderne du terme. Mais elle s’inquiétait pour elle. Et surtout de ce qu’il lui était arrivé. Pour elle-même ou la sécurité de l’autre danseuse, qu’importe. Le fait était que c’était elle qui avait appelé.


Je fronce les sourcils en l’entendant parler des habitudes du type.



| Ca ne veut rien dire. Plus de la moitié des disparitions sont volontaires. Tout le monde ou presque, a des choses à cacher, et parfois la volonté tenace d’un nouveau départ. |


Je sors un calepin. Plus vite que ça, tu meurs, mais javais besoin de noter des mots, des expressions. Dans mon esprit, ça fonctionnait depuis toujours par idées, par mots-clefs. Je notais, et soulignais. Semaines, rien avant, rien après.


C’était toujours utile. Parce qu’au-delà de tout le reste, je ne voulais certainement pas me retrouver sans description aucune ; il fallait commencer quelque part, même si c’était par des sentiments qui prennent corps. Je savais d’expérience que les descriptions des témoins pouvaient terriblement varier de la vérité ; ça arrivait le plus souvent à cause du mélange des souvenirs. Je l’écoute toutefois quand j’évoque les règles, et qu’elle répond simplement par ses souvenirs. Je note.Plus petit. Plus fin. Yeux vairons. Je redresse les yeux vers elle, griffonnant avec rapidité tous ces éléments. Je repasse ce qu’elle me dit en mémoire, pour essayer de retracer le fil d’un profil qui me serait suffisant pour décrire les événements, retracer ce qui avait pu arriver à Nina pour de bon et me mettre sur la piste du responsable.


| Une attirance ? Est-ce qu’elle vous a donné des détails en ce sens ? Une relation plus que professionnelle, peut être ? |


Je ne voulais pas quelle se sente jugée au-delà de simplement l’évocation de faits, d’hypothèses.


| Un œil de chaque couleur. Plus petit. Mince carrure. Vernis sur les ongles et cheveux gris. Est-ce quelle vous a dit ce qu’il faisait dans la vie ? Vous dites aussi qu’il était régulier, mais à quel rythme venait-il la voir? Qu’elle, jamais d’autres ? |

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 (johan&meera) the screaming of the lambs.

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