réveil difficile

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I have survived. I am here. Confused, screwed up, but here. — Laurie Halse Anderson || @Mayrik Waaka

Être au mauvais endroit, au mauvais moment, ça arrivait aussi au meilleur. En un éclair, tout avait changé. Si simplement, si durement.
Dans un sursaut, Morrigan s'était réveillée au milieu de ses terres natales.. Mais au cœur d'un chantier. La détonation, bruit assourdissant, lui revenait encore en tête alors qu'à peine le regard posé sur le ciel, elle sentait en elle la colère gronder. Tandis que l'esprit se fixait, que l'essence s'étendait dans le corps nouvellement animé, un souffle passait ses lèvres.

Respiration erratique, membres endoloris, elle finissait par se redresser alors que des silhouettes l'entouraient, la sollicitaient. Oreilles sourdes aux murmures ambiants, elle restait assise, au milieu de ce chantier archéologique avant de réaliser.

Philadelphie, la missive, le coup de feu. D'un coup rageur, elle frappait le sol en se redressant, vacillante. Le visage basculait de l'avant et la longue chevelure suivait le mouvement.

Elle était encore faible.

Quelques jours plus tard.

Morrigan avait réalisé que finalement ces murmures n'étaient pas anodins, parce qu'elle n'avait pas été seule. L'inquiétude des autres l'entourant comme un cocon urticaire, elle avait fini par s'en éloigner par besoin de solitude. Et puis.. Ils lui tapaient tous sur le système alors qu'elle ne demandait qu'à comprendre. Pourtant, pour comprendre, il lui fallait savoir où elle se trouvait en premier lieu. Donc, elle avait bien dû leur adresser la parole. Mais c'était bien après avoir pris le temps de se remettre et de fouiller dans ses effets personnels, avoir tout retourné dans l'hôtel où on l'avait ramené pour qu'elle se repose.

Une fois les informations récoltées, Morrigan avait compris l'essentiel : Elle était en Irlande, dans un trou perdu, en pleine.. Recherche archéologique. L'ironie du sort aurait pu la faire sourire si son envie de violence ne lui brulait pas autant les veines.

Pendant ce temps-là, où elle avait eu besoin de s'acclimater, de retrouver ses repères, Morrigan était demeurée dans la chambre de son incarnation. Elle n'avait eu aucun mal à se faire porter pâle afin de prendre le temps de prendre ses marques. L'esprit humain de l'incarnation s'était rapidement mêlé à celui de la Déesse et elle avait ainsi accédé à toutes les informations nécessaires à sa survie. Et bien que Sÿel lui semblait parfaite sur bien des points, il n'en demeurait pas moins que la Reine Fantôme ressentait cette différence entre celle qu'elle fût pendant des siècles et celle qu'elle devenait après sa.. Disparition.

A la simple pensée de son assassinat, elle avait voulu tout casser.. Souvent, bien trop souvent. Colérique, vexée d'avoir été ainsi abattue, sa rancune s'était ancrée dans son tempérament.

Des mauvais travers.. Morrigan avait eu loisir de retrouver ses mauvais travers au fil des jours et finalement, acclimatée à sa nouvelle chair, elle avait pris le téléphone pour.. Appeler qui ? Qui appeler qui serait de confiance ? En temps normal, elle aurait pu joindre Heimdall, mais là, non. Elle ne parvenait pas à s'y résoudre. Elle avait besoin de prendre de la distance avec .. Tout ça. Lui, eux, sa vie précédente qui l'avait mené à son trépas. Elle s'était sentie intouchable, et a tort et il était temps qu'elle remédie à tout cela.

Son esprit tournant à vive allure, elle avait finalement opté pour l'un de ses amis les plus distancés avec Sanctum. Après une recherche rapide quant à trouver le numéro de la boutique de Papa Legba, elle lui avait laissé un message bref mais efficace. Elle avait besoin de lui, en Irlande.

La nuit était tombée, elle avait préparé ses bagages, annonçant à ses collègues qu'elle les ferait rapatrier avec les moyens du bord. Et finalement, avec un sac en main, habillée de noir, la longue chevelure brune encadrant un visage contrarié, elle s'était assise à la réception de l'hôtel en attendant le Dieu.
Un haut talon claquait contre le sol à rythme régulier, signe de son impatience, de son envie de quitter cet hôtel. Et quand finalement, Legba passait le seuil de l'hôtel, elle se relevait souplement en trainant avec elle son sac. Elle ne laissait guère le temps au colosse de chercher ou de présumer quant à qui elle était. Au contraire, elle se pointait sous son nez promptement.

Et face à lui, elle venait lui donner un coup mesuré contre l'avant-bras avec son sac pour attirer son attention.. Au cas où, sait-on jamais. « Je suis brune. Moi. Je suis brune, c'est une honte. J'ai toujours été rousse.. Ça ne devrait pas arriver. » Son regard vert se rivait sur celui de son ami dont elle attendait une réaction alors que ces salutations n'avaient rien de conventionnelles.. Surtout pour Morrigan qui avait passé tant de temps à être guindée, enfermée dans son rôle de Reine et surtout, de Primat. « Je suis bien foutue, mais je suis brune.. Et je ne peux même pas arranger ça. Ce serait moche. » Et qu'elle soupirait finalement, dépitée tandis que son visage signait à la négative. Fort heureusement pour elle, les lieux étaient déserts, ou presque, passé le réceptionniste qui les regardait bizarrement.

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Here we are, don't turn away now. We are the warriors that built this town...from dust. — Imagine dragon || @Sÿel de Brún

Rage. Pulsation. Les tambours de guerre résonnaient au creux de ses tempes. Il réclamait une justice qui ne le concernait qu’à peine. Le sang appelle le sang. Adage parfait pour l’occasion et la divinité visée.  Legba ne cessait de ronger son frein, gonflant sa haine au fil des jours. L’outrageuse attaque contre les divinités menaçait les siens. Ayizan, Loko et tant d’autres encore.

Il aurait pu découvrir l’Irlande si ce pays avait eu la moindre particularité à lui offrir. Les hommes ici ne différaient en rien des hommes de là bas… Quoi que puissent en dire certaines doctrines humaines. Le dieu se moquait d’une visite guidée et plus encore des étranges réactions de la Morrigan.

Lui téléphoner ! Lui laisser un message, impersonnel et énigmatique sur son répondeur. Le sommer de venir, lui, comme un vulgaire taxi ! Reine ou Primat, amie ou déesse, elle grignotait son trop fragile égo.
Il avait observé, longtemps. Il avait analysé, longuement. Il avait patienté, difficilement. Les lieux devaient être sécurisés avant qu’il ne pose l’ombre d’un pied dans cet hôtel.

Son entrée s’opéra par l’arrière, sorti des étages qu’il avait occupé d’un portail discret dans une piaule inoccupée. La porte poussée dans un soupir,  le dieu obligea son regard à remonter du sol au plafond. C'était le pôle nord ici... Pourquoi le pôle nord alors que les déserts de son pays lui manquaient? Ses mains remontèrent le col de sa veste en cuir pour répondre à ses craintes.  Sa carcasse franchissait le premier seuil, glissait dans les couloirs et descendait les escaliers. Ses pas martelaient délicatement le sol, pourtant, une vibration bourdonnait autour de lui provoquant une constante tension. L’atmosphère avant l’orage illustrait parfaitement la situation. Papa Legba avait sorti ses antennes paraboliques...Et non, elles ne se camouflaient pas dans sa tignasse comme ne cessait de le prétendre Ma Zu', sa disciple.

Il savait où se plaçait chaque individu avant même de poser le pied dans la réception. Son attention se posa donc sans surprise sur son interlocutrice. Sans réaction aucune, il glissa sur elle dans un simple grondement avant de lui répondre. Une voix sourde rétorqua alors.

« Hum… . » Aux yeux de Legba, les blancs semblaient toujours malades et les rousses et leur peau diaphane trônaient tout en bas de sa perception de la beauté. Ces corps n’éveillaient aucune appétence particulière, raison pour laquelle, il laissa courir une fois encore son regard sur elle comme si une réponse appropriée lui serait soufflée ou qu’une inspiration soudaine parviendrait à le secouer.  En réalité, il n’en avait rien à cirer. Papa Legba possédait une grande patience mais peu de tact. L’effort fut donc immense. « Grande reine, » Un sourire étira la commissure de ses lèvres alors que son index rabattait mollement le bord de son chapeau. « Le noir vous sied en tout temps. Mais pour l’instant, allons-nous-en. La sécurité m’importe plus que la beauté. Comptez-vous rentrer à Sanctum, malgré tout ? »

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I have survived. I am here. Confused, screwed up, but here. — Laurie Halse Anderson || @Mayrik Waaka

La rage, l'envie de violence millénaire qui s'était éveillée avec cette enveloppe charnelle n'avait pas quitté Morrigan depuis son retour. Sa rancune, plus tenace que jamais, plus virulente qu'hier et assurément plus douce que celle du lendemain, n'avait fait qu'alimenter les suspicions déjà fertiles de la Déesse. Pour l'offense qui lui avait été faite, elle aurait pu réduire ce monde en cendre, le déchirer dans le sang et la virulence de ses sentiments.

Mais le tic tac de la vengeance avait raisonné dans son esprit comme un oiseau de mauvais augure. Et au nom de la raison, elle avait décidé de rester cachée, de s'accoutumer à ce corps, à cette vie. La Déesse avait fouillé le passé et le présent de son incarnation afin d'en dessiner les contours et d'en adopter les travers. Inutile de dire que les travers avaient été bien plus nombreux que les vertus possédées par Sÿel. La tempérance avait ainsi définitivement quitté l'esprit immortel de la divinité pour rappeler à son bon souvenir sa tempétueuse personnalité aux éclats volcaniques.

Papa Legba avait été son choix premier, au bout de ces longs jours de silence et d'accoutumance. Son premier choix au nom de leur amitié, de son éloignement de Sanctum et de son tempérament. Beaucoup aurait surement songé à un compère celte pour venir en aide à Morrigan, peu aurait envisagé une déité vaudou, et c'était en cela que son acte pouvait être considéré comme étant le plus prudent et le plus sage d’entre tous. A croire que la sagesse n'était pas totalement morte dans son esprit tumultueux.

Au comble de sa patience dans le hall de cet hôtel perdu au milieu de nulle part, Morrigan avait mis bien longtemps avant de reconnaitre cette ville. Drogheda.. Drogheda. Elle avait retourné ce nom dans son esprit, encore et encore jusqu'à finalement retrouver le souvenir qui y était relié. Images nébuleuses de retrouvailles avec le Dagda lors de la précédente incarnation, ç’avait été le début d'une épopée qui avait traversé les siècles jusqu’à s'achever dans une ruelle crasseuse de Philadelphie. Le souvenir de la détonation lui revenait et teintait d'une lueur funeste ses iris d'un vert doré. La respiration erratique, le feu grignotant ses veines, elle se calmait pourtant bien vite en devinant la silhouette de son Divin ami.

Pivot sur ses talons hauts, elle n'avait pas hésité un instant avant de le rejoindre et de s'arrêter devant lui. Les salutations atypiques passées à coup de sac contre le colosse, elle avisait sa réaction dans un moment de silence et une expression clairement perplexe. Lorsqu'il la saluait avec tant de cérémonie, sa langue claquait contre son palais. « Laissons les titres de côté, veux-tu, tout comme les politesses. Nous le savons depuis longtemps, le respect est partagé. » Et elle avait déjà fort à faire avec les courbettes des autres, à Sanctum. Morrigan avait besoin de laisser de côté la rigueur cérémonielle qui allait de paire avec son immortalité pour calmer ses pulsions colériques. Parce que penser à Sanctum la ramenait irrémédiablement à son assassinat.

Elle soufflait un moment en glissant sa main libre dans sa longue chevelure brune pour en dégager quelques mèches sur le côté. Et puis, son regard revenait s'ancrer sur les traits de Papa Legba. « Je suis encore trop pâle pour toi, tant mieux ! » Qu'elle lui lâchait avec un aplomb et une spontanéité qui contrastait avec la rigueur et la retenue de l'ancienne Reine Fantôme. Elle soupirait finalement en observant les alentours d'une œillade rapide. « Personne ne viendra me trouver ici, tu es le seul à me savoir dans ce corps. » Ses mots soufflés d'un ton plus bas, sur l'inclinaison de la confidence, elle finissait pourtant par avancer en direction de la sortie, non sans un regard pour le réceptionniste qui observait l'un et l'autre, interdit. D'où sortait ce grand gaillard ? Il n'était pas entré dans l'hôtel aujourd'hui.. Qui..

D'accord, c'était trop tard, parce que déjà la Morrigan passait le seuil de l'entrée de l'établissement pour être frappée par la fraicheur Irlandaise. Son regard scrutait à nouveau les environs, comme pour éveiller à sa mémoire le souvenir de sa terre mère. Et puis, elle remontait à nouveau son regard sur le grand brun. « Non. Je n'irais pas là-bas, pas pour le moment. Je vais me fondre dans la masse et récolter des informations. Et puis.. » Une lueur dangereuse passait dans son regard alors qu'elle enchainait, sa rancune quasi-palpable. « J'attraperais l'ordure qui m'a fait ça pour me venger. Je ferais un collier de ses entrailles et le noierait dans son propre sang. » Calme.. Calme Morrigan. Il était inutile qu'elle s'emballe de la sorte ! D'ailleurs, elle soufflait comme pour tempérer le feu de ses instincts.

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Here we are, don't turn away now. We are the warriors that built this town...from dust. — Imagine dragon || @Sÿel de Brún

Il souhaitait rejoindre l’apparente légèreté de la reine, cette forme de spontanéité qui rayonnait d’elle. Néanmoins, la situation ne s’y prêtait pas. Le rythme de son sang battant à sa tempe précipitait son humeur.

Baboum Baboum.

Doux son. Son poing contre la chair pourrait provoquer le même. Calme. Il le demerait, pourtant. Son regard resta donc baissé sur la frêle carcasse sans négliger la puissance qui y reposait.  Reconnu pour sa rancune et son esprit lunatique, la réputation de Legba manquait de justesse. Le dieu possédait un caractère si changeant qu’il pouvait être difficile de suivre. Néanmoins, aujourd’hui, il était lui-même perturbé. La déesse venait de se réincarner et comme à chaque réincarnation les divinités se muaient en un nouvel exemplaire. Il ne savait pas encore si la récente version de Morrigan deviendrait son allier, son amie ou s’il allait la détester.

« Je suis encore trop pâle pour toi, tant mieux ! » Lançait-elle sans prémisse, sans raison, aussi. Il n’avait rien dit. Aucune critique sur la beauté, jamais, ne venait troubler les lèvres du divin au sujet de l’apparence des déesses ou dieux. Aux dernières nouvelles, la grande reine savait modeler son corps à sa guise. Le dieu vaudou savait avec quel amusement ce pouvoir lui avait permis de jouer des tours. Aussi, une micro seconde fronça ses sourcils alors que sa tête s’inclinait sur le côté pour mieux regarder la nouvelle enveloppe. Il se contenta de jouer son rôle, la meilleure fonction qu’il pouvait endosser dernièrement.

« Les nouveaux dieux sont partout. » Expliqua-t-il alors qu’un mouvement de menton désignait caméra de surveillance et autres portables du réceptionniste. Mais la brune prenait les devant. Son pas guidait le duo à l’extérieur, exposant Legba au froid de la rue et à l’inconnue.

«Les mots n'ont que peu de valeur s’ils ne sont pas suivis d’action. » Lança Legba en plongeant les mains dans ses poches. « Je suis ravi de ta confiance. Néanmoins, as-tu l’intention de me trimballer à droite ou à gauche encore longtemps ? »

Où allait-elle ainsi ? Où l’amenait-elle ? Elle ne ressemblait en rien à Morrigan, à celle qu’il connaissait du moins. Aussi, il commençait même à douter de la véritable identité de ce petit corps trop frêle à son goût. Dieu méfiant, voir paranoïaque, Legba redoutait presque une mauvaise plaisanterie ou pire encore.

« Que veux-tu ?... » Il crut tout de même bon d’ajouter quelques détails pour éviter une réponse trop évasive. « A part le sang de tes ennemis, bien sûr. »

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I have survived. I am here. Confused, screwed up, but here. — Laurie Halse Anderson || @Mayrik Waaka

Morrigan n'avait de léger que le verbe, alors qu'en son for intérieur, elle fulminait de manière perpétuelle. Pour une fois, elle s'était pourtant résolue à se montrer plus posée, plus calme, afin de ne pas faire subir son volcan de rage bouillonnant à Papa Legba. Parce qu'il fallait l'avouer, l'ancienne rouquine avait fait voir mille et une misère au personnel de cet hôtel qui n'avait rien demandé. D'humeurs désagréables à colère injustifiée en apparence, tout y était passé. Rétrospectivement, tout cela n'avait été que le reliquat de son assassinat.. Un évènement qu'elle peinait encore à digérer.

Perpétuellement, ses mains cherchaient les armes, son esprit façonnait des plans, et son sang pulsait dans ses tempes, emballant ses humeurs autrefois placides.

Mais tout changeait, même pour les Dieux. Même pour ces créatures quasi-figées dans le marbre de l'éternité. Ainsi, Morrigan reporta son regard sur Legba et analysa son scepticisme face à sa boutade. Yeux plissés, silence éloquent, elle restait ainsi jusqu'à claquer sa langue contre son palais pour éclairer la lanterne du dieu qui semblait vouloir rester éteinte. « C'était une blague. » Et qu'elle maugréait ensuite en se détournant. « Je peux au moins en rire à défaut de pouvoir changer tout ça. » Oh parce que oui, elle avait tenté pendant des jours et des jours de changer l'apparence. De modifier son visage, ou ne serait-ce que sa chevelure. Elle s'était concentrée très fort pour.. Ne rien obtenir en retour. Nada. Niet.

Et donc, elle en avait conclu que son pouvoir s'était mué en autre chose, encore. Et elle avait maudit sur une enfilade de générations le responsable de son sort, encore une fois.

Son regard vert se reporta finalement sur Papa Legba, puis suivit le fil de ses paroles avec le regard partant çà et là avant de revenir à son interlocuteur. Effectivement, les nouveaux dieux étaient partout.. Cela, elle le savait depuis un moment déjà, et c'était ce qui l'avait motivée à rester cloitrée à Sanctum. Pour quel résultat ? Un soupir passa la barrière de ses lèvres sans qu'elle ne se décidât à verbaliser sa pensée.

Une main passa distraitement dans ses cheveux pendant quelques secondes et finalement, elle reporta son regard sur Legba en continuant d'avancer, visiblement déterminée à atteindre une destination quelconque avec son sac dans une main. Les mots prononcés par son ami avaient le don de la tendre alors qu'elle reposait sur lui un regard orageux, symptomatique de son humeur vacillante. « J'annonce simplement la couleur. » Et la couleur promettait d'être rouge, si rouge, toujours plus rouge. Elle souffla une brume glacée en continuant d'avancer et finalement s'arrêta donc à quelques pas de l'hôtel pour pivoter sur ses talons. « Le réceptionniste t'as regardé bizarrement parce que tu as débarqué depuis l'intérieur de l'hôtel alors que tu n'étais pas un client. Pour ma part, j'ai rendu la clé de ma chambre et fait enlever mes affaires pour les renvoyer à Philadelphie. Donc, rester dans l'hôtel n'aurait eu aucun sens, je nous recherche un coin tranquille pour rentrer à Philadelphie sans attirer l'attention. » Le regard rivé sur le sien, elle attendait de voir si cette réponse le satisfaisait avant de reprendre son avancée. « Il fait froid, ça ne me manquait pas. » Qu'elle pesta distraitement en observant avec attention les alentours.

Une bifurcation plus tard, ils arrivaient dans une rue lambda, guère plus peuplée que devant l'hôtel. Mais là-bas, il y avait un système de sécurité qu'il n'y avait pas dans cette petite rue désertée. A la question du Dieu, la Morrigan ouvrit la bouche pour mieux la refermer. Mince, elle allait commencer par l'idée du massacre. Bon.. Okay. Il y avait une suite. « Rentrer à Philadelphie, mener mon enquête en prenant un peu de distance avec Sanctum.. Et puis, il va bien falloir que je débarque au conseil, quand même. Mais j'aimerai en savoir plus avant. » Et soudain, elle réalisa qu'elle aurait pu demander à quelqu'un d'autre.. Enfin, pour être plus exacte, elle y avait songé, mais elle avait fait le choix de ne pas le faire et de se tourner vers Papa Legba. N'allait-il pas se poser la question de la légitimité de son choix ? Cela pouvait paraitre logique, alors, elle enchainait. « Et non, je n'ai pas demandé à Heimdall de venir me chercher, parce que.. Je n'avais pas envie. Je suis différente et je priorise. Je verrais.. Tout ça, enfin, ce qui le concerne, je verrais ça plus tard. » C'était une manière de voir les choses, clairement. Elle souffla en nichant une main dans la poche de sa veste. « Tu veux bien me ramener à Philadelphie ? S'il te plait. » Voilà, elle en arrivait à la demande qu'elle aurait dû formuler dès le début. Bien, mieux valait tard que jamais, n'est-ce pas ?

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Here we are, don't turn away now. We are the warriors that built this town...from dust. — Imagine dragon || @Sÿel de Brún

Mettre des mots sur ses pensées comme si l’on pouvait énoncer ce qu’il avait à peine laissé entrevoir. L’offense se pardonnait d’oser songer paraphraser une idée qu’il avait refusé de voir germer entre ses lèvres scellées. Pour cette fois. Parce qu’il choisissait encore de la boucler. A quoi bon débattre ? Il avait raison. Il le savait. Aussi sa bouille se fendit d’un sourire sincère, arme redoutable. Il présentait une rangée de dents cruelles, une langue acérée et un venin puissant, le tout sagement rangé. Un index pointa ce dernier avec amusement, réel pétillement de la rétine et rides rieuses aux coins des yeux.

« Je suis le dieu des voyageurs, Morrigan. Protecteur des carrefours et … je t’épargne la longue liste. Aucun réceptionniste, aubergiste ou être de cet acabit ne peut résister à mon charme ravageur. » L’index insista sur son sourire parfait, son visage jovial et aimable à qui l’on donnerait bon dieu sans confession ! Un comble pour une divinité, accordons le nous ! Le dieu avait choisi la carte d’un argument incontournable, impossible à contrer et surtout particulièrement émotif, loin de la raison et de la logique. Une fois encore, il ne souhaitait pas débattre. Il avait raison. C’est tout.

« Il oubliera. » Réponse cruelle pour une divinité envers un confrère. Néanmoins, Legba n’avait jamais caché la dureté parfois cruelle de son cœur. Qui était-il, lui, pour juger les relations amoureuses d’une autre divinité ? Le dieu de l’amour ? Certainement pas ! Qui plus est, sa propre épouse l’évitait ou avait disparu depuis des décennies. Sa position annonçait la qualité des conseils qu’il pourrait offrir sur le sujet. De toute façon, il doutait que la déesse réclame ses connaissances en la matière.

« Je pensais que tu ne demanderai jamais. » Puisqu’elle avait choisi cette ruelle, Legba ne se posa aucune question, assez confiant dans le plan de la déesse. Une part de lui doutait parfois mais il pour l’heure, il agissait. Son pas le porta directement vers l’avant, doubla Morrigan et se projeta dans un léger halo flouté. A l’œil nu, le tout semblait à peine visible. Pour une divinité, le portail brillait de mille feux, d’une aura brulante et pourtant glaciale.

Ils posèrent ensuite les pieds dans l’appartement de Legba, juste au dessus de sa boutique. Si d’extérieur, le tout semblait assez pittoresque, à l’intérieur, le dieu, ou plutôt Ma’, avait aménagé sobrement mais avec goût. Principalement composé de bois, le grand salon possédait de grandes ouvertures lumineuses. De nombreuses plantes ornaient l’espace, plus que les meubles eux-mêmes. Le dieu ne pouvait se déconnecter de la nature, des arbres, de la terre et autres matériaux recelant la vie en son sein ou offrant la vie. Aussi, en ville, il devait conduire la nature à lui. Un canapé entourait un bord de table basse et quatre chaises encerclaient une table sombre. Un bar donnait sur la cuisine d’où sortie une petite vieille.

« Qu’est-ce que c’est encore que ça ? » Pesta une voix féminine, la voix d’une petite vieille à la face ridée par les siècles. Mamie Zuwalaguewé, Ma zu pour les proches et Mamie Zu pour les autres, restait la dernière disciple de Legba encore active. Les mains sur ses larges hanches s’essuyaient sur son tablier en observant la nouvelle Morrigan. Visiblement, la vieille ne la reconnaissait absolument pas. « Je t’ai déjà dit que ta femme n’a pas changé d’enveloppe. Tu les ramènes de plus en plus pâle en plus ! Les blancs c’est chiants. Ca veut pas partir après. Je suis obligée de leur botter leur petit cul trop fort pour qu’elles dégagent. En plus, elles me prennent toutes pour ta grand-mère ! Pis c’est des grosses racistes, elles me demandent toutes si du XXL c’est assez grand p… »

D’un geste rapide, Legba réduisit sa disciple au silence. Heureusement qu’il maîtrisait les ondes sonores parfois. Ma tapait du pied avant de placer à nouveau les mains sur ses hanches.

« Voici la nouvelle enveloppe de Morrigan, Ma… » Réussit enfin à placer Legba en levant les yeux au ciel. Il est vrai qu’il avait tendance à ramener quelques humains dans ce repère, comme de nombreuses autres divinités par ailleurs. La petite dame s’inclina avec respect devant Morrigan, autant que le lui permettait sa vieille ossature et son allure rondouillarde.

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I have survived. I am here. Confused, screwed up, but here. — Laurie Halse Anderson || @Mayrik Waaka

Deux tempéraments fougueux pour une discussion posée, autant dire que c'était comme passer une soirée sur un baril de poudre en attendant la petite étincelle festive pour tout faire sauter. Quoiqu'il en fût, Morrigan porta son regard sur le sourire de son ami, l'avisant un long moment.. Vraiment un long moment, avec un sourcil haussé pour toute mimique avant de finalement esquisser l'ombre d'un sourire qui déverrouillait automatiquement ses traits jusqu'à là plus ou moins figé dans le marbre de ses pensées meurtrières. Le sourire de cet hôte-là avait le mérite de lui donner des allures de gentille fille, un peu bienveillante. Surement était-ce l'arme la plus redoutable de Sÿel : le sourire mensonger. Pour autant, la Déesse l'utilisait plutôt à bon escient.

Ainsi, elle se décida à répondre à Papa Legba avec un sérieux déridé, plutôt de façade. « J'en suis certaine, voyons. Qui suis-je pour juger de l'impact de ton sourire ravageur sur les réceptionnistes, aubergistes et .. » Elle s'arrêta pensive, l'esprit fouillant dans les reliquats d'une vie empruntée. « Il y a encore, vraiment, des aubergistes ? Je n'en suis pas sûre. » Ce n'était pas le sujet, mais soit.

Concernant son cher et tendre époux, la Morrigan restait silencieuse un moment. Parce qu'en effet, elle n'avait pas envie de se lancer dans les prémices d'une thérapie de couple. Naturellement secrète quant à sa vie de couple, mais également par rapport à ses sentiments, elle conservait ses tumultes intérieurs derrière une porte triplement blindée et un regard vert qui se voulait distancier. Surement était-ce jusqu'à là, ce qui ressemblait le plus à la Morrigan trépassée : une pudeur des sentiments indéfectible. Une simple réponse passait finalement la barrière de ses lèvres, dans un souffle qui n'offrait aucun épanchement particulier. « Sûrement. »

Surement qu'il oublierait, comme elle pouvait douter.
Surement qu'il détesterait cette version primaire d'elle-même.
Surement qu'il n'allait rien y comprendre. Pour autant, elle ne comptait pas s'occuper de tout cela maintenant. Non. Elle préférait songer à l'urgence de sa situation plutôt qu'à celle de son cœur.

Lorsque finalement elle se décida à formuler sa demande, la réponse de Legba soulagea la Déesse, qui ne cachait pas ce brin de sourire reconnaissant pendant quelques secondes avant de finalement opter pour une attitude plus désinvolte. « Je suis un peu longue à la détente quand il s'agit de demander un service, tu le sais bien pourtant, non ? » Eh oui, la Reine Fantôme n'était pas de ceux qui appréciaient particulièrement le fait de demander des services. Elle en rendait, bien souvent, mais l'inverse était plus rare.. Tout ça pour une histoire d’orgueil mal placé.

Autant dire que tout n'était qu'une question de caractère immuable ; Hier comme aujourd'hui, elle était de celles indépendante et plutôt têtue, persuadée qu'elle pouvait gérer les petits soucis personnels par ses propres moyens. Mais ça ne marchait pas toujours.. Elle le savait pourtant. La preuve en était.

Le regard vert de la Celte glissait sur le dos de Papa Legba qu'elle regardait prendre les devants pour finalement aviser le portail. Sans une hésitation, elle en passa le seuil pour atterrir dans l'appartement qu'elle avait surement déjà vu ou visité.
Aussitôt assaillit par la disciple de son ami, l'ancienne rouquine observait longuement la vieille femme, le visage penché sur le côté alors qu'elle croisait les bras sous sa poitrine en conservant son sac en main. Elle attendait que son débit se tarisse mais sans succès. Pour autant, ses paroles ne l'irritaient pas, ni ne la faisaient rentrer dans une fureur quelconque. Au contraire.. Au contraire, Ma' Zu avait le mérite d'amuser Morrigan qui redressait le visage après son observation pour laisser ses pensées voguer pendant quelques secondes. Ses propres disciples, elle y avait songé pendant des jours.. Un chagrin évident s'était – D’ailleurs - installé en elle, en songeant à Aedhan. Elle le savait, elle en avait l'intime conviction, il ne l'avait pas trahi. Il avait été instrumentalisé et aujourd'hui, elle l'avait perdu.

Le regard éteint pendant ces quelques secondes, elle inspira profondément et riva son attention sur la disciple pour lui adresser un sourire amusé, quoiqu'altéré par l’impact de ses pensées. « Merci de m'accueillir. Ne t'en fait pas, je ne vais pas rester longtemps et je tiens à dire, pour ma défense, que je suis un peu moins pale dans cette peau-là que dans la précédente. » Elle leva sa main pour illustrer son propos et ainsi observer sa carnation. « Je suis sûre que je peux même essayer de bronzer sans cramer maintenant. Tu ne penses pas ? » Oui, plus ou moins. Mais elle ne prévoyait pas pour autant d'aller se payer une séance de bronzette. Son regard se reporta sur Papa Legba alors qu'elle penchait sensiblement le visage sur le côté. « Merci de m'avoir ramené. »

Morrigan en revenait encore à Ma' Zu pendant de longues secondes. « Le XXL doit être assez grand pour quoi ? Quelque chose me dit que les petites que tu as croisées sont avant tout des connasses et non pas seulement des racistes. » Rien que ça ? Morrigan claquait sa langue contre son palais avec un soupir. « Incroyable comme je peux prendre ses plis. Et ce langage peu châtié va me jouer des tours par moment. » C'était certain, oui.

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Combat de faux semblant et de sourire de façade. Alors qu’elle étirait son sourire, il poussa le sien dans un coin, le droit d’une commissure désabusée. Se redressant de toute sa taille, il plaça ses mains sur ses hanches. Que faisait-elle exactement ? Toute divinité possédait un égo surdimensionné. Vivre avec ne l’avait jamais dérangé. Il hocha donc la tête avec conviction.

« Charmante dentition. » Il redressa un index pour lancer entre la plaisanterie et le sérieux. Tendant la main en direction de son portail, il ignora la réplique concernant la difficulté à réclamer. Ils étaient bien assez proches pour passer outre cet orgueil déplacé, non ?

Pendant l’intervention de la déesse, le dieu, lui s’était avancé vers sa disciple qui le fixait, les mains sur les hanches. Elle avait relevé un sourcil à la question de Morrigan. Sa peau plus bronzée... hum.... tous les blancs brûlaient au soleil, non? Ma l'avait toujours cru! Mais qu'en était-il des déesses ? Dans un sourire tendre qu’elle seule put observer, Legba passa une main dans sur la chevelure crépue aux reflets d’henné. Inutile d'essayer de passer à l'intérieur, tout s'accrocherait à ses doigts et Ma passerait des heures à démêler.

« Et bien sait-on jamais. Vu les sommets que je leur ai fait atteindre, peut-être aurais-je élevé leur esprit… » Une chose était sûre, elles avaient connu le septième ciel. Est-ce pour autant un moyen de faire évoluer son esprit ? Il n’en était pas sûr. Le dieu ne possédait aucune compétence pour ça. Enfin, théoriquement, il en avait une mais il l’utilisait à bon escient, en général. « Va te reposer maintenant, Ma. Il est tard et tu as bien travaillé. » Un dernier sourire pour elle avant qu’elle ne salut poliment la déesse et ne s’éclipse pour une nuit bien mérité.

Legba se tourna finalement vers la grande reine pour lui lancer un regard amusé.

« Tout est XXL chez moi, Morrigan ! » Son index pointa sa tempe pour poursuivre. « De mon esprit à… ma belle crinière. » Il ricana en avançant vers le coin bar. L'ordre de ses réponses dérivait un brin et réclamait une petite gymnastique. D’un geste de la main, il invita la déesse à s’installer confortablement.

« Buvons un verre. » Les dieux vaudou avaient leurs propres alcools. Ils appréciaient les choses moins subtiles et sucrés que l’hydromel et autres petites liqueurs de fruits délicats.  Il ne demandait pas l’avis de son invitée. Inutile. Deux verres avaient été remplis d’un alcool digne des dieux mais surtout de ce qu’il souhaitait faire. La période où des esclaves le servaient avait pris fin depuis longtemps. Il avait été dans les premiers à libérer ses hommes et femmes. Ils étaient ses fidèles, ses croyants et il les avait jalousement gardé dans ses terres pour s’assurer de leur survie et de la sienne. Il tendit alors l’un des verres à Morrigan. « A la nouvelle toi et ton putain de langage ! » Proposa-t-il en premier toast.

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Un compliment ne faisait jamais de mal parfois. C'était simple et efficace. Passé les éloges du charme et de la dentition de Papa Legba, Morrigan eu un sourire amusé en réponse à son ami tandis que son visage signait à la négative pour tout complément. Le portail dont il dessina les contours sous le regard vert de la Reine déchue lui rappela que ce n'était que le début de la longue bataille qui se profilait. Une bataille qui allait mettre à rude épreuve ses nerfs mais également ses convictions. A l'image de ce corps qu'elle avait été forcée à quitter, Morrigan avait été arrachée à sa vie afin de prendre de la hauteur et recontextualiser son ensemble.

Qu'elle situation de merde, pensa-t-elle en franchissant le seuil magique du passage créé par le Dieu. Un frisson immédiat vint la parcourir alors qu'elle réalisa qu'elle se trouvait à Philadelphie. Cette maudite ville ! Pourtant, elle allait devoir s'y acclimater, comme beaucoup. L'échange avec Ma' Zu eu le mérite de la faire sourire, de l'amuser avant de finalement la tirer brutalement vers une mélancolie symptomatique du deuil qu'elle tentait d'esquiver.
Mais cette affection qu'elle observa entre la Disciple et son Dieu la ramena brutalement vers sa propre perte, allant jusqu'à lui faire perdre tout sourire ou toute accroche avec la conversation. Pauvre Legba, son trait d'humour faisait, par conséquent, un flop alors qu'elle détournait le regard dans une pudeur de façade qui avait plus pour but de la préserver de ses propres souvenirs.

Un soupir resta coincé dans sa gorge alors qu'elle enterrait tous souvenirs, toutes pensées noires pour ne pas se laisser submerger. Parce que finalement, le vide de Son absence était aussi cruel que la mort, elle-même. Une inspiration plus tard, elle s'arma d'un sourire en reportant ses prunelles sur son ami. Là, elle lui adressait un regard entendu quant à sa petite référence. « C'est ce que raconte les légendes ! Oui. Après, les légendes et moi, tu sais.. » Qu'elle le taquina pour finir de s'extraire de ses pensées mélancoliques.
De quelques pas fait sur ses hauts talons, elle déposa son sac dans un coin pour finalement se laisser échouer littéralement dans le canapé de Legba. Là, il n'y avait plus de Grande Reine qui tenait, juste une jeune femme lasse qui prenait ses aises à l'abri des regards plein de jugement. C'était bien la preuve ultime de sa confiance en Papa Legba.. Ce laisser-aller.

« Bonne idée. Quoique tu me proposes, je veux un double. » Qu'elle commanda avec audace alors que ses jambes se croisaient. Coude posé contre l'accoudoir du canapé, elle appuya son menton dans sa main afin de regarder faire le Dieu à la grande crinière.
Lorsqu'il lui tendit finalement son verre, elle le huma un instant et finalement trinqua dans un.. « A moi et mon putain de langage. » Elle vint boire une gorgée pour en grimacer, avant d'hausser un sourcil, étonnée par sa propre réaction plus mesurée que ce qu'elle avait envisagé. « Ce n’est pas du rhum arrangé, par hasard ? » Dans cet entrefaite-là, la Déesse réalisa. « Eh bien, décidemment, cette Sÿel a le don de me surprendre. A se demander si elle s'est un jour fixée une quelconque limite.. » Après rapide instigation, elle en eu un sourire, accompagné d'une citation. « Le meilleur moyen de résister est de céder à la tentation. Je vois. » Son regard filé d'or se reposa sur Legba. « Me voilà en Reine débridée. » Au moins, ça avait le mérite de la faire rire pendant un instant alors qu'elle reporta le verre à ses lèvres pour en boire une nouvelle gorgée.

Quelques secondes passèrent alors qu'elle reposait le verre sur la table basse devant elle. « C'est étrange, j'ai la sensation d'avoir été libérée de quelque chose. Je ne me l'explique pas. Entendons-nous.. Je suis furieuse et vexée par ce qui m'est arrivé, mais pour autant, le monde me parvient d'un œil nouveau.. » Fondamentalement, c'était le cas. « Tout est plus clair, plus brillant, plus tranché. » Sans demi-mesure, Morrigan était redevenue sans demi-mesure.. Terriblement entière. « Je me sens.. Comme avant. Avant Sanctum, avant Dagda. Comme avant. » Et il fallait bien l'avouer, elle ne trouvait pas cela désagréable.

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La légende… Si les maudits portugais qui avaient entrevus ses statuettes n’avaient pas paniqué devant la représentation de sa virilité, l’histoire aurait été toute autre, probablement. Impossible de refaire le monde en un claquement de doigt, même avec deux divinités réunies dans une même pièce.
Le passé appartenait au passé. Ruminé ne constituait pas une habitude sur laquelle Legba se reposait. Bien au contraire, il demeurait un fervent partisan du changement et de l’évolution. Il avait cotoyé Darwin et son homologue. La théorie de l’évolution l’importait peu. Une fascination étrange le poussait à admirer les hommes capables de songer à leur évolution et leur survie. Evidemment, ceux qui ne s’adaptent pas meurent. Le monde avait toujours été fait ainsi qu’un scientifique le théorise avait été amusant, comme si l’humanité avait pu oublier l’essentiel !

Se concentrant sur la dose d’alcool à fournir à la nouvelle Morrigan, il l’écouta demander une double dose. Son sourire s’étira pour lui fournir deux doses et demie. Jamais de trop ! Le verre tendu vers sa consœur, il trinqua avec elle avant de plonger ses lèvres dans le liquide transparent ! Relevant légèrement son verre pour appuyer le propos, il souligna l’idée.

« Du rhum arrangé pour les dieux ! » Ce truc pouvait mettre une cuite à n’importe quelle divinité. « Fournée spéciale de ce cher Loko… à qui tu as mis la raclée, il paraît. » Ricanant face à ce souvenir, il porta à nouveau la boisson à ses lèvres. Puis, l’index se pointa vers Morrigan, éloignant à nouveau le verre. La danse entre les mots et la descente commençait, douce valse pourtant doucement vers une délicieuse ivresse. « On boira un verre pour lui aussi… » Son coude se reposa sur son propre bar, ignorant le bois qui pliait sous son poids. Il était fait pour tenir, même face à sa masse. Un mot claqua dans son esprit. Le grand Legba se redressa lentement, attentif à l’explication de la déesse.

« Alors, elle vivait déjà pour devenir ton enveloppe car nous sommes des dieux, les limites, nous n’en connaissons que peu. » Sa tête mina un petit geste de haut en bas pour appuyer son propos. Être d’accord avec soi-même semblait être le ton de la soirée. Se retrouver ainsi en petit comité offrait une liberté que les dieux perdaient à leur naissance. Être eux même. Devant les fidèles et les croyants, ils devaient se montrer forts, parfaits et à l’image qu’ils s’étaient faite d’eux. Entre dieux, la moindre faiblesse se transformait en ouverture pour un couteau planté dans le dos. Ici, il n’y avait qu’eux. Le plat de sa main frappa le bois du bar pour marquer une nouvelle brillante idée.

« Mais oui !! Une reine ! » Un éclat, seulement visible de la déesse, perça au-dessus de leur tête. D’une main habile, Legba attrapa au vol un cercle doré. Entre ses doigts, une couronne délicate scintillait. Elle n’avait rien des anciennes couronnes et des bijoux précieux d’autrefois. Néanmoins, elle avait été faite à la main, par un adulte incapable de grandir, un fanatique de série. Legba l’avait donc volé mais croyez-le, ou pas, l’idiot l’avait mérité à pousser son épouse à renier les puissances vaudou ! Même si les mains de cet homme ne méritaient pas l’épouse qu’il avait, la couronne était magnifique. Elle avait été faite de résine, sculptée de délicats motifs puis peinte avec une fine couche de bronze et orné de quatre pierres d’ambre. « Sa femme lui avait dit qu’à force de critiquer les puissances vaudou, il finirait puni. Bah voilà, fallait pas me faire chier ! » Un rire mauvais résonna au fond de sa gorge et mua lentement en un soupir blasé. Il fut un temps où ce malheureux aurait subir bien pire qu’une couronne volée. Oublier tout ça. L’alcool aiderait. Portant un poing à sa bouche, il se racla la gorge. Soudainement plus solennel, il attrapa la couronne de ses deux mains. « Et te voilà, maintenant officiellement reine de la soirée ! »

Avec délicatesse, il tendit l’ensemble vers le chef de la Morrigan. D’une main légère, il posa le tout sur la chevelure de son amie. Il enchaina rapidement.

« Je ne connais rien de la Morrigan d’avant Dagda. Mais puisqu’elle est maintenant reine de la soirée, elle va me montrer ce que j’ai loupé ! »

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Les légendes étaient faites pour être détournées, et le temps l'avait prouvé. Morrigan avait vu sa propre conception s'altérer avec le temps, certaines facettes ayant été effacées ou transposées a d'autre. A l'époque, la notion de Plagiat n'existait pas, pourtant, la Reine Fantôme aurait pu hurler au plagiat plus d'une fois. Elle aurait pu hurler et pointer du doigt.. Que ça n'aurait rien changé, parce que le monde était ainsi fait.

En cette soirée avec Legba, la Celte n'avait pas envie de penser à celle qu'elle avait été, ou même à celle qu'elle avait tenté d'être et finalement à celle qu'elle avait fini par redevenir. Parce que c'était une véritable source de migraine et que quitte à souffrir d'un mal de crâne carabiné, elle préférait que ce soit pour une bonne raison. Donc.. De l'alcool.
La bouteille de Rhum était observée un long moment, puis finalement son verre avec sa double dose et demi dont elle venait facilement ingurgiter la demi trainante d'une gorgée plutôt tranquille. Ce corps était fascinant par ses habitudes, c'était indéniable.
Pour autant, Morrigan ne s'y focalisa que tardivement en repensant à ce fameux Loko qui provoqua un petit sourire de peste à la commissure de ses lèvres. « Des raclées, je n’ai jamais cessé d'en mettre. C'est tellement jouissif ! Je peux recommencer, si tu veux. » Qu'elle proposait, gracieusement en levant son verre pour venir écouler une nouvelle moitié du liquide transparent.

Réflexion faites.. « Woh. » La descente était escarpée, mais pour autant, elle lui plaisait grandement. Peu à peu, elle était en mesure de sentir son esprit se délier dans l'allégresse de la boisson. Sa rage redescendait d'un cran, là où ses muscles se détendaient alors qu'elle se prélassait dans le fauteuil. Un soupir plus tard, elle partagea ses réflexions. « En fait, réflexion faite, je devrais peut-être lui envoyer des chocolats pour cette bouteille. J'aime bien. » Un moment de silence plus tard, elle secoua le visage négativement. « Ah non, en fait, je garde les chocolats. »
Parce que le chocolat, c'était trop bon. Ce vice sucré, elle l'avait aussi. Parmi tant d'autres.

D'ailleurs, concernant son hôte, elle s'observa un moment avant de finalement se résigner à terminer son verre pour le tendre à Papa Legba. Encore ! Elle en voulait encore. D'ailleurs, elle se releva même d'une impulsion souple pour glisser jusqu'à lui et faire claquer son verre sur le bois. Les coudes se posaient sur ce dernier alors qu'elle plissait les yeux en réfléchissant ardemment à la question. « Ou alors, c'était une garce sans limite. » C'était peu flatteur mais tellement vrai. Son verre resservi, elle vint en boire une nouvelle gorgée avant de retourner s'assoir. « Dans les deux cas, ça me va. Les limites, j'ai assez donné. » Vraiment, Morrigan laissait couler les mots au-delà de ses lèvres avec un naturel désarmant.
« Il ne faut pas s'énerver.. Non, arracher la langue à quelqu'un n'est pas convenable, tout casser, ça ne se fait pas ! Participer à une guerre ? Ce n'est pas digne d'une Reine. Mon cul, ouais. Des guerres, j'en ai mené plus que la moitié de.. Des Grecs ! Ces feignasses ! » Qu'elle ponctuait en s'installant de nouveau dans le fauteuil, fière.

« Mais oui, une Reine ! » Morrigan rebondissait instinctivement, comme si ça coulait de source avant de finalement plisser les yeux et de voir l'éclat au-dessus de leur tête. Quelques battements de cils plus tard, elle avisa longuement le bijou d'un air interdit. Ça brillait mais en bonne habituée aux breloques de qualité, elle savait reconnaitre l'or du reste, et là, elle était quasiment sûre que ça n'en était pas. Pour autant, elle en eu un rire amusé suivi d'un sourire comblé. « J'adore les couronnes ! C'est une tradition qui s'est tristement perdue ! »

Au récit concernant le propriétaire de la couronne, elle haussa un sourcil avant de finalement en rire. « T'aurais dû lui croquer un doigt. Avec ton sourire engageant, il aurait assimilé la leçon en prime. » Oui, clairement, les punitions n'étaient plus ce qu'elles étaient. Dans le fond, elle se dit que c'était bien dommage avant d'en revenir à son verre et de le terminer, encore.
Au moins, le rhum faisait couler ses pensées vers les méandres vaporeux de l'état d'ébriété naissant.

A peine eut-elle le temps de reposer le verre sur la table basse qui lui faisait face qu'elle vit Legba venir lui poser la couronne sur la tête. Instinctivement elle redressa le buste, fièrement en dégageant quelques mèches brunes encadrant son visage. « Eh ouais ! C'est moi la reine ! » Merci Morrigan pour ce manque de total de finesse et d'éloquence dans ce discours de couronnement.

Un rire s'en suivit alors qu'elle attrapa la couronne pour la regarder sous tous les angles. Curieuse, elle porta même l'objet à sa bouche pour sentir une des branches céder sous sa dent.. Enfin commencer à céder. « HAN, ce n’est pas de l'or ! » Qu'elle désigna en le montrant à Legba avant de le reposer sur sa tête. « Pas grave, je garde quand même. Elle est belle. » Voilà, c'était donc adopté.

Pour ce qui la concernait, avant sa vie avec Dagda, elle y pensa un moment avant de s'enfoncer dans le fauteuil. Diable que ça remontait à loin.. Si loin.. Tellement loin qu'elle souffla entre ses lèvres un moment avant de se décider à répondre.
« Avant Dagda, c'était la Morrigan d'Ernmas. Ma mère et c'était une.. » Elle plissa les yeux longuement, pour chercher le mot adéquat, rendant honneur et justice à sa matriarche. Finalement, elle le trouva. « CONNASSE ! C'était une connasse qui était toujours dans le coin pour.. Me surveiller. » La fin de la phrase trainante et son regard passant çà et là témoignait de la quête de la Celte. Non, Ernmas n'était pas dans le coin.. Tout allait bien. « Il n'aurait manqué plus que ça. Pouah. » Oui, mais non.

Elle reporta son regard sur Papa Legba et finalement lui désigna son verre vide. « La Morrigan a besoin de carburant. Un verre vide, ce n'est jamais bon ! » Après un moment de réflexion, elle reposa un regard presque sérieux.. Non, en fait, il l'était, sur le Dieu Vaudou. « Dit, tu ne vas pas arrêter d'être mon ami parce que je suis devenue une saleté surement violente et caractérielle ? » En prime, elle lui offrait son plus gentil sourire, ce qui.. N'allait pas du tout avec sa question.  

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Mettre des raclées ? Oh, il haussa les épaules, l’attention d’avantage portée sur la bouteille que sur la déesse. Oh, elle aussi demeurait une jolie bouteille, néanmoins, l’esprit était ailleurs. Loko restait son ami, un allié de longue date, très longue date. L’avoir à ses côtés apportait son lot d’avantages, dont l’un d’eux semblait plaire à Morrigan.

Pour la suite, il se contenta de hocher la tête en guise approbation et de remplir son verre et celui de la reine. Barman pour une soirée! Il avait l’impression qu’il aurait besoin de plus qu’un seul verre pour comprendre son discours de plus en plus décousu. Après tout, ils pouvaient finir la bouteille… Un coup d’œil à cette dernière indiqua que le tout venait de se réaliser.

Le grand dieu se redressa mollement avant de ricaner bêtement en la voyant mordre dans la couronne.

« J’ai du maïs grillé si t’as faim… » Affirma-t-il avant réaliser la flemme qui le maintenait cloué à son fauteuil. La soirée risquait de s’épuiser s’il ne remuait pas l’ombre d’un petit doigt. Mais la suite du propos déporta son attention vers d’autres horizons. Il fallait admettre que la capacité de concentration du dieu s’amenuisait particulièrement, plus les verres s’enchainaient plus son aptitude à rester concentré s’évaporait.

« Si tu veux, je peux déposer une chèvre dans son salon, à ta mère… » Il hocha la tête avant de rire bêtement, encore, un rire communicatif et puissant. « Elle aura tout dévoré à son retour. »

La petite blague ressemblait à celle d’un tout petit en mal de bêtises à réaliser pour ennuyer ses parents, attirer l’attention ou encore mimer une rébellion. Aucun mal réel ne souhaitait être fait à la mère de Morrigan, qu’importe si cette dernière ne portait pas sa génitrice dans son cœur.

« Au moins ton histoire est moins bizarre que la naissance de certains dieux... AHAH! »

Le rire s’arrêta brusquement lorsqu’il tomba sur la face sérieuse de la déesse. Un sourcil se redressa, intrigué. Il lui fallait un temps d’analyse sur la situation. La question semblait si compliquée ! Le dieu se redressa pour avancer jusqu’à son mini bar. Réflexion trop intense pour son esprit noyé d’alcool. Il en était baba au rhum ! Tirant sur le bouchon du récipient il tendit le goulot en direction du verre de la brune.

« Putain, je suis plus en état de viser un trou… » Souffla-t-il en replaçant deux ou trois fois le bord du verre comme il faut. « Roh puis merde ! » Il porta la bouteille à sa bouche pour en vider deux ou trois gorgées et la tendre à Morrigan. Ouais, pour le côté reine et princesse on repassera. « Morrigan... Nos avis divergent depuis des siècles... Au pire, on se mettra sur la gueule puis on ira boire une bière. Mais, on va tout de même répondre à ta question par un test ! »

Les idées dans cet état ne semblaient pas les meilleures. Probablement le regretteraient-ils une fois l’alcool redescendu ! La carcasse divine se redressa de toute sa taille pour jeter un coup d’œil à la tenue de la Morrigan, puis à la sienne. D’une main trop lourde, il lissa sa chemise. Pas fameux. Tout en avançant vers l’armoire à l’entrée, le dieu expliqua :

« On va aller exhausser des prières.» Attrapant son haut de forme violet à bordure rouge, il le plaça sur sa tête après un petit tour presque trop habile pour son état. « Un des tiens, puis un des miens puis un des tiens puis… » Sa canne glissa délicatement entre ses doigts avant de se rappeler d’enfiler sa longue veste violette. « Prête ? Qu’importe où qu’on va, oublie pas la bouteille ! »

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Mettre des raclées, c'était une vocation pour Morrigan qui transcendait ses enveloppes et incarnations. Mijaurée ou non, elle avait le don et la capacité de frapper pour se faire comprendre. Après tout.. Ça défoulait. On sous estimait souvent l’impact d'un bon coup de poing pour affirmer son opinion.
Enfin, là, tout de suite, il n'était surement pas conseillé à la fameuse Reine Fantôme de jouer des poings, parce qu'il y avait une chance sur deux qu'elle ne parvienne pas à se maitriser, ou même à viser, plus simplement.

Quoiqu'il en fût, elle resta majoritairement préoccupée par l'état de la couronne, enfin, jusqu'à en adopter l'atour en la posant sur sa tête. Menton redressé, air plein de fierté, elle finissait par en avoir un sourire amusé en entendant la proposition de Legba. « Du maïs.. » Elle sembla réfléchir à la question avant de finalement balancer une main dans les airs. Non, visiblement, elle n'avait pas faim. Pourtant, un peu de nourriture n'aurait pas été un luxe pour éponger la bouteille descendue bien trop vite.

Est-ce qu'elle s'en rendait compte, que l'alcool prenait le dessus ? Non, oui, peut-être, mais ça n'avait pas grande importance. Puisqu'elle fût prise et entrainée par le rire de Legba lorsqu'il proposa de déposer une chèvre chez sa mère.
Animée d'un rire spontané, elle secoua pour autant les deux mains, pour tenter d'en placer une.. Mais c'était peine perdue, parce qu'elle imaginait déjà la tête de sa psychorigide de génitrice entrain de fulminer. Et ça, ça valait tout l'or du monde, toutes les couronnes de l'univers.

« Oh putain, la tête qu'elle ferait mais.. J'ai réussi à la semer, je n’ai pas envie qu'elle me retrouve. » Ah. Pensive pendant de longues secondes, elle prit finalement un air outré. « Non mais en fait, je ne suis pas planquée, c'est elle qui me fuit. La garce ! » Ou alors, elle n'était tout simplement plus de ce monde.. Mais ça n'avait pas vraiment d'importance, sur l'instant.

A la mention de sa naissance, elle plissa le nez et se focalisa sur son verre en lâchant un ricanement presque mesquin. « Ouais, je ne suis pas sorti d'une tête ou d'une cuisse. Ou ce genre de connerie. Non mais franchement, qu'est-ce qu'on ne raconterait pas pour faire son intéressant ! » Que l'alcool la rendît garce, et encore, ce n'était pas grand-chose.

La main tendue avec son verre, elle réclama plutôt une nouvelle dose d'alcool, là où elle aurait pu continuer sur le fil de sa réflexion. Mais non ! Sa réflexion avait le don de s'effilocher au fil des secondes. Le regard mordoré posé sur Papa Legba, elle le regarda galérer et en eu un nouveau rire amusé. « Ah bah bravo ! Et.. » Non mais, il buvait au lieu de la servir ? Elle ne riait plus, d’un coup ! « HEY NON HEIN ! » Elle se releva d'un bon, en grimpant sur le canapé pour lui prendre la bouteille des mains en manquant de se ramasser lamentablement. En équilibre sur un pied, sur la surface molle, elle prit la pose le temps de se stabiliser pendant de longues secondes avec un.. « Wooooh.. Attend.. Attend.. »

Une fois plus ou moins stabilisée, elle se tourna d'un coup vers le dossier du fauteuil pour s'y appuyer en s'y écroulant à moitié. La bouteille trouva sa bouche alors qu'à moitié accroupie, Morrigan se retrouvait dans une pose ridicule pendant les paroles du Dieu. Le visage bascula sur le côté : Non, elle ne le voyait pas. Une torsion plus tard, elle parvint à l'aviser du coin de l'œil en restant appuyé sur le dossier, les pieds sur l'assise et le derrière relevé. Elle cligna des yeux devant l'annonce presque trop solennelle de Papa Legba.

« Tu veux qu'on se foute sur la gueule tout de suite ? Attend, je suis prête ! Attend. » Le pauvre, il avait besoin d'attendre depuis un moment déjà. Elle glissa un pied au sol et manqua de basculer pour finalement se rattraper et se redresser, toujours la bouteille en main. Il n'était pas question de perdre l'essentiel de vu.. Bien sûr.

Le temps de se redresser et de reprendre un semblant d’aplomb, elle le vit avec ses atours et plissa les yeux en replaçant la couronne convenablement sur sa tête. « Pourquoi tu mets un chapeau pour te battre ? »
Elle n'avait pas tout suivi. Et lorsque finalement, il expliqua son plan, elle ouvrit la bouche pour la refermer. « Mais je ne ressemble pas à Morrigan, là. Je ressemble à.. Moi. » Après quelques secondes, elle tilta enfin. « Ah non, mais en fait, c'est bon. »

Son esprit avait surement pris un raccourcit, il ne fallait pas chercher. Pour preuve, elle tenta de s'ancrer plus solidement dans le sol et d'inspirer profondément pour retrouver un semblant de prestance. Sa main libre passa dans ses cheveux pour les discipliner alors que l'autre menait la bouteille à ses lèvres. Elle en bu une nouvelle gorgée avant de finalement avancer vers son ami. « Okay, je suis prête. » Qu'elle ponctua en prenant une pose qui aurait pu en tromper plus d'un.

Les apparences, c'était important à Sanctum.. Et pour cette fois, son savoir durement acquis se révélait utile. Enfin, c'était une manière de voir. Pour autant, elle désigna la bouteille qu'elle n'avait pas lâchée et finalement, elle lui remit en main. « T'as des poches ! »
La bonne excuse ! Et elle se concentra sur ses croyants en penchant le visage d'un côté puis d'un autre avant de donner une adresse pas si loin que cela, à Legba. Il aurait pu les emmener ? OUI. Mais non. Morrigan se métamorphosa en Corneille avant de prendre une ouverture pour voler jusqu'à l'adresse. Autant dire que le vol ne fut pas sans danger, ni détour. D'ailleurs, elle arriva surement un cran après le Dieu en s'écrasant.. Lamentablement, contre la fenêtre.
Fort heureusement pour elle, la vitesse avait été assez faible et les dégâts minimes. Mais tout de même, sa prestance en avait pris un coup.

A l'intérieur, une jeune femme brune était occupée à prier Morrigan, face à un autel. Le sang sur ce dernier annonçait un sacrifice et pour autant, la croyante n'avait pas franchement l'air d'une adepte de ce genre de pratique. Elle était frêle, le visage doux, et.. Franchement craintive quand elle entendit l'arrivée de l'un et surement de l'autre dans son appartement sans prétention.
La Corneille frappa du bec au carreau pour qu'on lui ouvre avant de finalement prendre forme humaine avec un .. « Oh bordel, ça décoiffe. J'ai perdu la couronne je crois. » Qu'elle affirma, sans certitude, d'une main passant au sommet de son crâne. Alors, oui, la couronne, elle l'avait laissé derrière elle, au moment de sa transformation. La seule consolation dans cette histoire, c'était qu'elle était habillée, au moins.

La pauvre croyante eut un cri suivi d'un regard paniqué et fixe sur l'un et sur l'autre. Elle était tétanisée. « Oh mon dieu.. » Qu'elle souffla, sanglotant alors que Morrigan en eu un rire en tirant sur la manche de Legba. « Elle nous a reconnuuuue ! »
Spoiler alert : Pas du tout.

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« Mais … C’est qui ta mère ? Kes zavez foutu ? » Les nuances de la langue périssaient avec l’alcool. La tournure des phrases s'envolait pour aller à l’essentiel ! De la mère, ils passaient à la naissance. Dans un rire toujours plus gras et débile que le précèdent, le dieu avança un argument de poids !

« Oh… Remarque vu d’où on sort, on a pas trop à se la péter c’est sûr… »

Dire que leur faiblesse retirait toute possibilité au dieu de donner vie, d’engendrer un enfant, lui le dieu qui en rêvait. Alors qu’il luttait contre la colère une nouvelle forme de combat lui fut proposée. Se mettre sur la gueule tout de suite n’avait rien de déplaisant. Legba réfléchit avant de jeter un regard sur la déesse puis sur la bouteille, puis la déesse et finalement la bouteille. Le choix s’imposa comme une évidence.

« Tu veux ? On boit avant puis on se bat après ? »

L’attention de son interlocutrice s’évaporait aux grès de son taux d’alcoolémie. Legba semblait parti ailleurs dans son délire de boisson. Un cliquetis au sol le réveilla et lui annonça le départ de la déesse.  Quoi ? Personne n’avait dit qu’ils faisaient une course. Mais puisque l’idée était lancée, il relevait le défi !!

« Ma Zu ! JE SORS ! » Hurlait le dieu en amplifiant le son si fort qu’il fit trembler les murs. La pauvre disciple, même habituée aux frasques de son dieu, frôla la crise cardiaque avant de rabattre son oreille et de se rendormir en grommelant.

La suite amena à se demander lequel des deux dieux était réellement la femme. Se précipitant difficilement vers son armoire il attrapa sa tenue d’apparat, sautillant par ci, sautillant par-là, il parvînt à la revêtir avant de se jeter dans son portail.

« GAGNE ! »  Hurlait-il alors qu’un bruit fracassant attira son attention dans son dos. Un rire idiot franchit ses lèvres en remarquant la corneille et son état. L’hilarité lui coupa toute possible moquerie avant l’ouverture de la fenêtre. Ainsi, il allait devoir escalader le rebord ? Sa silhouette massive se découpa dans l’encadrement, avançant d’abord son haut de forme puis ses larges épaules. Il n’avait rien d’un contorsionniste ! Lorsqu’enfin il pose la pied dans la pièce, il remarqua avec agacement que la fidèle appelait un autre dieu !

« C’est elle! » Heureusement son attention se portait sur la bouteille qu’il avait coincée dans la poche de son manteau plus que sur la réalité du propos de la croyante, visiblement peu souvent pratiquante ! Il renifla rapidement comme pour s’assurer de la qualité de l’offrande. Après une gorgée, il se rappela subitement de l’importance de jouer son rôle et plus encore de celui des apparences !

« Oui, humaine, prosterne toi devant la grande Reine Morrigan ! »  Ecartant les bras, il en profita pour attraper la couronne délaissée sur le sol de salon et la placer à nouveau sur la tête de Morrigan. « Tu … » Mais la fidèle respirait de plus en vite et tourna de l’œil subitement. Dans un haussement d’épaules, Legba porta la bouteille à ses lèvres puis la tendit à la déesse. « Deux dieux, ça fait de trop pour une petite humaine. On a trop de charisme. » Gonflant le torse avec fierté, pour s’avancer à l’intérieur de la pièce, il oublia le chemin sinueux qu’il empruntait au lieu de marcher droit et le rire toujours plus idiot qui provenait des tréfonds de sa gorge.  

réveil difficile

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I have survived. I am here. Confused, screwed up, but here. — Laurie Halse Anderson || @Mayrik Waaka

Qui était la mère de Morrigan ? Une saleté, selon la Reine Fantôme. Si elle n'avait jamais connu son père, la brune s'était rapidement contentée de distancier sa divine génitrice. Brr. Rien que d'y penser, cela lui rendait l'alcool amer. Alors, elle balaya le sujet d'un geste de la main frivole, comme pour s'accrocher à la légèreté de la soirée. Elle avait besoin de se détendre, pas de songer à ses racines, ou à tout autre chose qui réveillerait sa vindicte. A bien y penser.. Est-ce que l'alcool et la vindicte ne feraient pas un mélange d'enfer ? Mh. Elle n'avait pas trop envie de tester pour le moment.

Peut-être que finalement, sa vindicte se changerait en pétard mouillé. La poisse.

Soufflant un rire concernant les naissances possibles, elle ne partageait pas vraiment la même affliction que son ami. Dans le fond, Morrigan avait eu bien assez d'enfants pour éternité, et une descendance bien plus complexe qu’elle en avait l'air. Ce qu'elle regrettait véritablement, c'était le fait que l'essence divine de son ancien époux, ainsi que la sienne, aient pu étouffer la vie de leur progéniture. A croire que dans leur paradoxe, ils n'avaient jamais pu donner corps à quelque chose de positif. Quelque chose dont ils auraient été fiers, en dehors de leurs rôles premiers.

Plissant le nez, la Divine en revint finalement au nouveau deal passé avec Papa Legba. Boire et se battre. C'était rudimentaire mais sacrément suffisant pour cette soirée, alors, elle acquiesça avec une frénésie et une agitation du corps qui aurait pu être ridicule sur ce canapé, avec son allure bancale. Mais cela lui était égal. « Ouais, ouais, OUAIS. Mais pour que ce soit équilibré, faut que je saigne quelqu'un ! » Qu'elle lançait, de but en blanc en descendant tant bien que mal de son perchoir.

La Celte aurait pu y laisser une cheville, ou une bouteille, mais tout se passa plutôt bien tandis qu'elle prit le chemin de la sortie.
Ce n'était pas une course, mais elle se pressait tout de même, afin de profiter de l'impulsion induite par leur soirée.

Arrivée et sonnée, la Corneille prit la forme d'une femme à l'intérieur pour voir Legba bien moins classieux qu'elle n'aurait pu le penser.
« Psst.. Pourquoi t'as pas fait le portail à l'intérieur, directement ? » Qu'elle lui articulât, sur le ton de la confidence alors que la croyante faisait des yeux ronds comme des billes, en état de choc devant la double intrusion.

La pauvre, c'était bien compréhensible ! D'ailleurs, à la présentation, Morrigan se préoccupa d'abord de récupérer des mains du Dieu Vaudou la couronne pour la replacer sur sa tête. Là, elle se donnait un air digne qui avait le mérite d'être ébranlé par son état d'ébriété.
Lorsque finalement la jeune femme tourna de l'œil, la Brune l'observa longuement, battant des cils pendant quelques secondes avant de finalement se joindre au rire de son ami. « On a tout tué. » Blanc, elle prit un air outré. « Han non hein, on ne l'a pas tué quand même ?! »

D'ailleurs, elle s'approcha de la croyante pour s'assurer qu'elle respirait toujours. En se penchant, Morrigan se rendit compte que son équilibre était sacrément précaire. Elle se rattrapa à l'autel et souffla à la tête de la pauvre jeune fille qui.. Ne réagit pas.
Enfin, pas tout de suite.
Pourtant, son haleine alcoolisée avait de quoi réveiller un mort.

La Déesse se redressa avec un diagnostic vite fait, bien fait. « Bah elle a l'air en vie. » C'était donc une bonne nouvelle. Et justement, la principale concernée s'éveilla pour observer, hagarde, les deux silhouettes étrangères. Elle étouffa un cri en rampant dans sa précipitation pour échapper aux intrus divins.

« Qu.. Qui êtes-vous ? Qu'e.. Est-ce que vous voulez ?! » Que balbutia l'humaine. Morrigan l'observa longuement et finalement se désigna.
« T'étais en train de me prier, non ? Morrigan. La Corneille. Tout ça, tout ça. »

La réponse de la Celte eu l'effet d'un choc conséquent sur la jeune femme qui recommença à pâlir et Morrigan la pointa de l'index. « Ah non. Garde les yeux ouverts. Fait pas ta chiante ! »

La bonne blague. La jeune femme couina un moment devant le ton péremptoire et éraillé de la divinité. Elle zieuta longuement Legba. « Et.. Lui ? » Qu'elle demanda.

« Papa Legba ! Alors tiens-toi tranquille sinon, il t'envoie à Tombouctou ! »
« ..Quoi ?! » Ça y est, elle paniquait. Encore. Et puis, dans un éclair de pseudo-lucidité, elle en revint à Morrigan. « Vous venez pour punir mon copain ? C'est ça ? »
La Déesse prit le temps de réfléchir en venant récupérer la bouteille des mains de Legba pour en boire une gorgée.
« Et il a fait quoi ? » Que demanda la Reine Fantôme en rendant l'alcool au Dieu vaudou.
« .. Il a été infidèle. »

Et tout à coup, ce fut comme si Morrigan avait été piquée à vif. Ah l'alcool. Ça ne faisait pas bon ménage avec les souvenirs.

« Oh putain l'enfoiré ! Je vais m'occuper de lui. Je vais lui faire la peau. » Qu'elle statua. Meurtrière mais trop alcoolisée pour être pleinement crédible. « Et après, on mangera des chips ! » Pourquoi ?! Pourquoi pas. Et elle se tourna finalement vers Papa Legba, ignorant totalement la jeune femme pendant sa diatribe. « Aaah, mais va falloir que je voie le mien de mari. Faudrait que tu me balances là-bas.. Non, en fait, non, mauvaise idée. » Pensive, elle plissa le nez avant de reprendre, le plus sérieusement du monde. « Il serait capable de dire que prendre le portail d'un autre, c'est tromper. Pff ! Portailler n'est pas tromper ! Hein que oui ? Enfin non.. Je sais plus. » On l'avait perdu.

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Pourquoi n’était-il pas entré directement avec un portail ? Legba haussa les épaules comme si la réponse tombait sous le sens. D’ailleurs, elle tombait sous le sens.

« Quand je fais passer ma tête dans le trou, ils tombent tous dans les pommes ! »

Sa main présentait comme preuve la femme au sol que Morrigan tentait de réveiller d’une façon particulière et inhabituelle ! Qui était Legba pour juger les habitudes des autres religions ? Un dieu ! De sa place, il pouvait mais il n’avait pas l’envie de se lancer dans une profonde réflexion. Lui, préférait se faufiler à côté de la plante verte et lui caresser les feuilles comme si elle était la plus fidèle de ses amantes.

Malheureusement, le point faible de Legba l’obligeait à garder un lien étroit avec la terre. L’utilisation répétée de ses pouvoirs le poussait maintenant à plonger les doigts de sa main gauche dans le pot alors que la droite serrait le tout contre lui. Se tournant vers Morrigan pour l’écouter attentivement, il hochait la tête, toujours d’accord. Il aurait été un parfait petit toutou sur la banquette arrière d’une voiture !

Elle allait faire la peau à un mari infidèle ! Mais elle oubliait le plus important ! L’adresse ? Le nom du gars ? Une photo du coupable ? « Et il a des chips, cet infidèle ? » La pauvre humaine hochait la tête de haut en bas, excellente imitation de Legba.

Le vieux Legba glissait lentement en direction de l’humaine de plus en plus inquiète devant le sourire démentiel du dieu. Il lui tendit la bouteille pour la faire boire. Un brin de compassion n’avait jamais tué personne, ou alors assister à une première serait amusant ! Il lui cédait une gorgée ou deux, histoire de la requinquer un peu !

Il se redressa soudainement lorsqu’il réalisa le propos de sa comparse de crime. Comment ça ? Prendre le portail d’un autre c’était trompé ? Ah non ! Si Ayizan savait le nombre de dieux et déesses qui avait franchi ses portails, elle aurait de quoi être jalouse ! Lui-même avait été contraint d’utiliser le portail d’Heimdall ! Il avait détesté et s’était lavé pendant trois jours !

« Dans ce cas, j’ai pénétré ton époux ! » Pardon ? Est-ce que l’heure de ses révélations était vraiment nécessaire ? Ce n'était qu'une blague ! «Pour aller à Sanctum! Imagine le nombre de personnes qui ont pris ses portails… portaux pour aller à Sanctum ? » Alors qu’il bavassait avec la déesse, l’humaine descendait l’alcool comme du petit lait. Ce breuvage saoulait les dieux alors imaginez les effets sur l’espèce inférieure. Enivrés et exaltés, ils semblaient comme fous. Soudainement électrisée avec son couteau à la main, elle hurla.

« JE VAIS LUI TRANCHER LES COUILLES !!! » Puis continuant à hurler comme une d’éreintée, elle s’enfuit en courant vers le couloir de l’immeuble.

« HEY ! La bouteille ! » Soupira Legba en emboitant le pas de l’humaine qui s’arrêta devant la porte du voisin d’en face pour la frapper comme une hystérique. Au moins, ils n’avaient pas besoin d’aller bien loin ! « T’avais bien dit qu’il avait des chips, hein ? » demanda Legba à l’humaine qui se déchainait toujours. Morrigan lui avait donné faim. « On pourra en apporter à ton mari quand on aura fini, histoire que l’histoire de portail passe mieux ! Qui peut s’énerver en mangeant des chips ? »

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Eh oui, c'était une question qui se justifiait, l'air de rien. Devant la réponse de Legba, Morrigan resta interdite pendant un moment. Un triple clignement de paupières plus tard, elle ouvrit la bouche en Ô et lâcha consécutivement un petit rire amusé. Allez donc savoir ce qu'elle était partie imaginer. Surement quelque chose qui n'avait rien à voir avec les portails.

« Tu m'étonnes, t'as une grosse tête quand même. » Qu'elle lâcha en imitant sa crinière sauvage en maniant la sienne, plus disciplinée.

Les mains relâchaient finalement la chevelure brune alors qu'elle s'attelait à réveiller sa croyante. Un souffle alcoolisé plus tard, un peu de patience et le tour était joué.
Les présentations passées, la jeune femme ne fut pas plus rassurée et c'était pleinement compréhensible.. La pauvre. Elle aurait pu se jeter par la fenêtre pour tenter de prendre son envol que cela n'aurait pas étonné la Corneille. Mais dans le fond, en cet instant, rien ne l'étonnait vraiment. C'était le plus magnifique dans l'histoire.

A la mention des chips, Morrigan s'enthousiasma clairement plus que de mesure. Et pire encore quand l'humaine acquiesça, c'était par-fait cette histoire. Un châtiment pour infidélité et des chips.. Elle avait gagné sa soirée !

Ne portant guère plus attention à l'humaine qui avait récupéré l'alcool, la Déesse se focalisa plutôt sur son ami qui venait de lui balancer une bombe. Non, pire qu'une bombe.. Oui, bon, une bombe nucléaire alors. Parce que la Reine Fantôme se figea et rapidement, se redressa, le regard noir.

« QUOI PARDON ?! TU DIS QUOI LA ? » Du calme, du calme. Son volume sonore emplissait la pièce et.. Fit à peine sursauter la croyante déjà occupée à s'enfiler l'alcool divin. Lorsque finalement Legba nuança son propos, Morrigan fulminait déjà. Elle avait le regard noir, les traits marqués par la contrariété, prête à tomber sur le colosse. Mais à sa remarque, elle se dégonfla sensiblement.. « Oh.. » En comprenant plus ou moins son propos. « Non mais sérieux ! Sé-rieux, fait gaffe à ce que tu dis. Personne ne pénètre mon mari. Y'a que lui qui.. » Morrigan gonfla les joues, ouais, fallait pas déconner. Ils n'allaient pas non plus épiloguer sur les capacités de pénétrations du Nordique, ce n'était ni l'heure, ni le moment.. Ni rien du tout, au final.  « Ouais bon, bref.. Le portail pour Sanctum, ce n’est pas pareil. C'est comme une gare. Ça ne compte pas. Ce n’est pas personnel. Tu vois le truc ?! » Il fallait espérer. Ou peut-être pas. Cela dépendait des points de vu.

Lorsque finalement la jeune femme se releva, exaltée par l'alcool pour mieux hurler, Morrigan en eu presque un sursaut, tant elle était en pleine réflexion ferroviaire. « Oh putain de bordel de merde. »
Ah tien. Morrigan découvrait un chapelet d'insultes plutôt sommaire mais efficace. Elle l'aimait bien au vu de son sourire immédiat.
Rapidement, ce dernier fut ravalé afin de se transfigurer en moue. Non mais.. Ah bah voilà que la croyante filait en direction de.. Ou ça ? Ça y est, la déesse était perdue. Tout ce qu'elle comprit, c'était que..

« Quoi la bouteille ? Pourquoi tu lui as donné la bouteille ?! » Qu'elle questionna en fonçant droit devant. Elle buta d'un coup dans le dos de Papa Legba et se frotta le nez à la suite de l'impact en couinant brièvement.

Visage penché, elle observa la démente frapper contre cette porte, avec son couteau. Morrigan, dans un réflexe très .. Utile, récupéra la bouteille d'alcool, à défaut de penser à l'arme blanche. Elle observa son contenu vidé avant de le désigner à Legba dans un mime qui se suffisait à lui-même : Ouais, il ne restait plus rien franchement !

Les chips étaient miraculeusement zappées – ou presque - alors que Morrigan secouait le visage négativement avec un.. « Ohlala. Non. Les chips, ça fait du bruit et ça fout des miettes partout. Ca va le foutre en rogne, tout ça.. Quoique, Heimdall ne s'énerve jamais. Tu crois que je peux l'énerver ? Je suis sûre que je peux y arriver. Faudra que j'essaie. » Oh oui, elle allait y arriver. Pas de soucis.

La porte finissait par s'ouvrir sur le jeune homme guère habillé et visiblement occupé et accompagné. La jeune croyante enivrée fonça dans le tas pour lui tomber dessus avec un cri de guerrière, prête à le planter à plusieurs reprises avec quelques mots bien assez significatifs.

« JE VAIS TE BUTER ! CONNARD ! ABRUTI ! C'EST QUI CETTE SALOOO... » Et elle se figeait en apercevant une jeune femme. Le cerveau court-circuité par l'information, elle aperçue comme chacun la petite brune dans l'encadrement du salon qui blanchie de plusieurs teintes devant le débarquement. « OH ! EN PLUS, TU T'ENVOIES MA COUSINE ?! »

Et la chasse reprenait alors que Morrigan était secouée d'un rire amusé. « Hey, au moins, ça reste dans la famille. »
Mais oui, bien sûr. En attendant, la course poursuite se faisait, sur un déjà-vu de Benny Hill beaucoup plus violent. Le jeune homme fuyait la croyante qui était, elle-même, pourchassée par sa cousine qui tentait de limiter les dégâts. C'était prometteur, clairement.

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L’explosion ! La vibration heurta le vieux dieu qui songea aussitôt à diminuer son antenne réception spéciale onde ! Les femmes de caractère l’avaient toujours séduit, lui, le dieu pourtant bien pacifique. Néanmoins, ses pouvoirs le rendaient bien fragile face à ce genre de manifestation d’emportement. Un sourire ourla ses lèvres sans réelle inquiétude face à la colère de la reine. Il avait affronté des furies, des déesses et des dieux en colère, combattu des esprits venus de l’autre monde, traversé des contrées que nul dieu n’avait frôlé. Croyez le ou non rejoindre Bondye n’avait rien d’une sinécure. Il ne négligeait en rien la puissance de la Corneille. Il savait quel ravage elle pouvait causer… ses oreilles en étaient témoin ! Il en faudrait pourtant bien plus pour l’inquiéter, surtout lorsque l’alcool noyait tout bon sens. Il comprenait sa position. Savait-elle, toutefois, qu’il pouvait l’entendre murmurer de l’autre côté de l’immeuble ? Qu’il percevait les déplacements des cafards dans les parois, les rats dans les égouts et les respirations environnantes ?

« C’est… » Mais sa phrase périt avant l’éclosion, avortée par un hoquet. Une gare ? Les portails comme une gare ? Son divin art des portails ? Son… Elle n’osait pas dénigrer les portails de la sorte ? Les siens comme ceux de l’autre copieur ? « Nos portails ne sont pas de vulgaires gares ! » Protesta Legba en s’agitant comme une diva. Un homme de spectacle comme lui ne jurait que par les effets de scène ! « C’est la Joconde ! La chapelle Sixtine ! Nous sommes des sculpteurs de l’espace ! Des… »

Mais la folle partait à toute vitesse et Legba levait les yeux au ciel. Un soupir lui autorisa quelques mots alors qu’il emboitait le pas à la déesse. Après tout, c’était sa fidèle avant tout, hein…

« J’étais pas si chiant que ça ! » Taquina-t-il dans une autodérision parfaitement maîtrisée.

Comme si la fidèle en avait eu assez des grandes paroles du divin d’un autre continent. Arrivé dans un nouvel appartement, Legba assista à une scène de Bipbip et Coyote au rabais. Un regard s’orienta vers la Corneille, se penchant pour attraper la batte de baseball au sol. Elle était tombée d’un des meubles. Il remarqua à peine les signatures qui égratignaient le bois de l’objet, une pièce de collection probablement.

« Je peux mettre à l’abri ta fidèle ou…la laisser contempler ton œuvre. Qu’en penses-tu ? » Tournant la batte entre ses doigts, son propos lui sembla trop abstrait dans cette situation enivrée. Il se devait d’être parfaitement compris, même s’il avait un sourire débile aux lèvres et une chaleur à crever entre les deux oreilles ! « Je crois que tu as bien méritée une pinata, ou deux, non ? » La batte passa alors sous le nez de la consœur d’un autre monde. Prendre ses marques dans un nouveau corps réclamait de l’entrainement. Et quoi de mieux qu’une ou deux pinatas humaines pour se détendre et s’entrainer ?