Do you have any idea who might blame you ?

C'était une journée comme toutes les autres pour Hope, ou presque. La veille au soir, son supérieur était venu la voir dans son bureau, fermant la porte derrière lui, pour lui confier une nouvelle affaire. Son approche ne laissait rien présager de bon et pour cause, le maire avait été la cible de menaces de mort à répétition. Son chef lui avoua qu’elle avait été désigné pour essayer de trouver l'auteur des courriers qu'il avait reçu. Etonnée, elle tenta d’ouvrir le dialogue avec lui qui le referma aussi sec. Il ne restait que deux lieutenants disponibles en urgence, l’affaire était à présent la sienne et il n’y aurait aucune négociation possible. Cela n’arrangeait pas vraiment la jeune femme. Alexi Ostapenko, le maire de Philadelphie, était un homme perturbant. Elle avait déjà eu l'occasion de le rencontrer à plusieurs reprises dont pour sa promotion au rang de lieutenant, après avoir été reçu à l’examen d’entrée. C'était un jeune homme avec un charisme certain, à peine plus âgé qu'elle, et un fort pouvoir de séduction qui la mettait déjà rapidement mal à l’aise à ce niveau là. Indirectement, en tant que maire, il faisait parti de ses supérieurs ce qui n'arrangeait en rien cette situation délicate et inconfortable qu’elle ressentait en sa présence. Devoir plancher sur cette affaire signifiait qu’elle allait devoir passer du temps avec lui, a minima. Avant de partir, son supérieur lui avait annoncé qu’elle était attendue le lendemain matin à la mairie à la première heure pour débriefer en direct avec le maire. Sa gorge se noua tant la situation ne la rassurait pas tellement.

Le soir, chez elle, Hope s’était fait couler un bain, phénomène très rare pour cette dernière afin de se détendre. Cette affaire allait être très importante pour sa carrière et elle ne pouvait clairement pas échouer. D’un autre côté, cela allait être une épreuve à titre personnel de surmonter les rencontres à répétition qu’elle risquait d’avoir avec Alexi Ostapenko. Lorsqu’elle réussit enfin à trouver le sommeil, il était déjà tôt le matin et elle sentit que cela allait être fort compliqué au réveil. Cela ne manqua pas d’ailleurs. Lorsque le réveil sonna, la brune avait l’impression qu’elle s’était endormie depuis à peine cinq minutes. Prenant une douche rapide, elle enfila un slim couleur bleu foncé, un chemisier noir par au-dessus, une paire d’escarpins avec de petits talons et mis un coup de mascara sur ses cils avant d’attraper son sac et sa veste et de partir en direction de la mairie. Le ventre noué, elle savait d’hors et déjà qu’elle ne pourrait rien avaler avant que son entrevue avec Mr le Maire soit terminée. La brune arriva avant l’ouverture officielle de la mairie et put entrer grâce à son badge. On lui indiqua la salle d’attente et puis finalement le jeune homme se montra pour l’accueillir. Se levant de son siège, elle serra la main de ce dernier avant de lui dire :

Bonjour Mr le Maire, lieutenant Edwards.

Pénétrant dans le bureau dont la porte fut refermée par le beau brun, elle prit place, rejointe rapidement par le maire qui s’installa derrière le bureau. Le sujet de leur rencontre était on ne peut plus sérieux et la jeune femme savait faire preuve d’une grand professionnalisme, tant que rien ne venait trop la sortir de sa zone de confort comme ce cher Ostapenko avait déjà réussi à faire.

Mon supérieur m’a brièvement parlé du souci hier soir en me précisant que vous m’en direz plus aujourd’hui.

A part le fait qu’il avait reçu des menaces de mort, Hope ne savait actuellement rien de la situation c’est pourquoi elle s’attendait à ce que cet entretien dure un petit moment tout de même afin de faire un tour d’horizon et de comprendre qui pouvait bien lui en vouloir de la sorte. En tant que maire, il avait des ennemis parmi les partis politiques adverses. Cela pourrait-il aller jusqu’à un tel degré de concurrence et de rivalité, elle n’en avait aucune idée. C’était Alexi qui allait lui donner les premiers éléments et ainsi les premières pistes potentielles. Peut-être que la menace émanait non pas d’une personne de son cercle professionnel mais de son cercle privé. Aucune piste ne serait écartée, ça elle y veillerait personnellement. Par ailleurs, son supérieur lui avait précisé qu’elle ne devait en parler à absolument personne au poste excepté lui. A priori, l’affaire avait besoin d’être traité de manière la plus discrète qui soit et c’était un point qui avait attisé la curiosité de la belle. Pourquoi diable le maire voulait-il conserver cette menace inconnue aux yeux de tous ?

Do you have any idea who might blame you ?

Le maire de la ville avait toujours autant de prestance. Mais pour le coup, si elle s’était rappelée qu’il avait une charme assez incroyable, la jeune femme semblait encore bien loin de la réalité lorsqu’elle le revit dans son bureau. Après avoir échangé une poignée de mains tout ce qu’il y avait de plus banal, elle prit place suite à l’annonce de son interlocuteur tandis que Alexi reprit position dans son fauteuil de l’autre côté du bureau. Ce dernier fut très aimable mais surtout, il paraissait plutôt décontracté pour un homme politique important qui avait appelé son chef au vue d’une menace sur sa personne. Le trouble que générait le beau brun en face d’elle restait présent. Elle ne saurait réellement expliquer ce qu’elle ressentait mais ce qui était certain, c’est que le beau maire était plutôt attirant. Ecoutant son intervention jusqu’au bout, Hope lui répondit :

Pourquoi pas un café si vous en prenez un aussi. Pour les viennoiseries, c’est gentil mais je n’ai pas faim.

C’est alors que le jeune homme poussa un document dans sa direction, la faisant agir d’instinct, oubliant le trouble qu’il provoquait chez elle. La flic sortit une paire de gants en latex de sa poche et attrapa la lettre ainsi que l’enveloppe. Cette dernière avait été remise en mains propres dans la boîte aux lettres au vue de l’absence de cachet des services postaux de la ville. Avant de lire le contenu de courrier, la brune retourna le courrier et l’enveloppe sous tous les angles pour essayer de déceler la moindre trace, le moindre élément qui pourrait être un indice sur l’expéditeur de la lettre. Concentrée sur son travail, la belle fit totalement abstraction de la présence du maire, amorçant la lecture du document. En tout, Hope parcourut le courrier trois fois essayant de relever le moindre mot qui pourrait avoir un sens caché ou en dire plus long sur son rédacteur. Elle était signée par le Culte de Chronos. Ce nom n’évoquait absolument rien à la jeune femme. Chronos lui évoquait vaguement la mythologie mais en aucun cas un quelconque gang ou groupe rebelle au pouvoir politique en place à Philadelphie. Il s’agirait dans ce cas d’un groupe de fanatiques qui aurait une dent contre le maire, contre l’un des éléments de son programme peut-être. Ou alors pire, cela pouvait aller jusqu’à être des personnes totalement folles.

Cette dernière idée ne plaisait pas du tout à la lieutenante. Les gens censés pouvaient agir de manière mauvaise volontairement, avec des raisons qui leur étaient propres et qui avaient un sens à leurs yeux. Mais pour la brune, les personnes psychologiquement dérangées étaient les plus dangereuses tout simplement parce qu’elles étaient généralement plus imprévisibles. Il était difficile de trouver des raisons ou une logique à leurs agissements. L’esprit de Hope était déjà en train de carburer à cent à l’heure, énumérant toutes les possibilités. Le nom laissait tout de même penser qu’il s’agissait bel et bien d’une secte, cela allait donc être la première piste qu’elle risquait d’explorer. Mais pour l’heure, elle allait surtout interroger Alexi sur ce fameux courrier.

Vous l’avez reçu hier si je dis pas de bêtises. Le culte de Chronos vous évoque-t-il quelque chose ? Des concurrents ? Un ennemi potentiel à titre privé ?

Son regard s’était porté sur le maire tout en posant ses premières questions, remettant au goût du jour ce malaise qu’il faisait naître en elle. Il faut dire que pour un politicien, monsieur Ostapenko était loin d’être repoussant. Jeune, à peine plus âgé qu’elle, il la dépassait d’une tête et la troublait d’un seul regard azur. Lorsqu’elle croisait ce genre de personnes, dont on disait souvent que les yeux bleus étaient ce qui perturbaient le plus, elle se demandait si elle faisait ce même effet à son entourage. Toutefois, elle en doutait sérieusement, n’ayant jamais eu l’impression de mettre mal à l’aise qui que ce soit rien que par sa présence. Une fois les premières réponses obtenues, elle poursuivit son questionnement.

C’est la première lettre du genre que vous recevez ? Sauriez-vous me faire la liste des personnes qui pourraient vous en vouloir tant pour votre poste que dans votre vie privée ?

En même temps qu’elle écoutait la réponse, la jeune femme sortit deux sachets de preuve dans lesquels elle glissa respectivement la lettre à plat, ouverte, et l’enveloppe. Puis elle attrapa sa tasse de café pour boire une gorgée tout en remerciant le beau brun d’un geste de la tête pour cette boisson revigorante. Cette enquête n’allait pas être des plus simples. En tant qu’ancienne experte scientifique, elle se doutait, à la propreté de la lettre, qu’elle n’y trouverait que les empreintes du maire dessus. Sa carrière allait prendre un tournant décisif, dans un sens comme dans l’autre, à la suite de cette affaire aussi n’avait-elle pas le choix que de tout donner.