Cela faisait déjà deux semaines que j’étais ici, dans cet appartement. Il avait débarqué de nulle part. Ce qui s’était passé était encore incompréhensible. Sa fureur, son épée qui parlait, le fait qu’il m’emmène ici, c’était tellement incroyable que cela paraissait surtout irréel. Je n’étais pas sûre de comprendre ni de réaliser encore ce qu’il m’arrivait. En fait, je n’avais pas envie de croire en ce que mon esprit semblait comprendre de la situation. Pourquoi serait-il venu me sauver ? Pourquoi après toutes ces années je pourrais enfin vivre sereinement et en sécurité ? Qu’avais-je fait pour finalement le mériter ? Tout cela allait forcément avoir un prix à payer, et vu le prix élevé que j’avais payé durant toutes ces années juste pour rester en vie, le prix de ma liberté serait très certainement bien trop élevé. Et pourtant, il avait réussi à raviver un semblant d’espoir, un semblant de volonté de vivre qui m’avait rongé jusqu’à la moelle épinière pendant la première semaine lorsqu’il m’avait laissé aux côtés de cette femme. Durant ma captivité, je n’avais croisé que très peu de femmes, toutes prisonnières du Cartel elles aussi même si elles semblaient avoir subi leurs sévices pendant bien moins longtemps. C’était tant mieux pour elles en somme. Mais elle, cette femme à la chevelure flamboyante, était à la fois impressionnante, intimidante et resplendissante. Elle semblait si forte, si intouchable contrairement à moi. J’ai été incapable de prononcer le moindre mot en sa présence et pourtant, j’ai pu petit à petit me détendre, accepter et même apprécier sa présence malgré l’absence d’échanges. Eira semblait être là en tant que baby sitter. Renfermée sur moi-même, je n’étais pas capable de parler, je n’étais même pas capable au début de me déplacer sans aucune hésitation. Elle m’a permis de manger à ma faim, de me laver et de dormir. Enfin, je devrais plutôt dire que j’ai essayé de dormir. Tout cela semblait d’autant plus un rêve que je n’étais pas capable de m’endormir plus d’une demi-heure sans me réveiller en sueur et en hurlant dans ce lit si confortable et douillet où elle m’avait permise de m’installer. C’était à la fois un rêve et un cauchemar. Alors que prisonnière du Cartel, les heures de sommeil que j’avais été une délivrance, l’une des rares libertés qui m’était accordé. Mais là, à l’abri dans cet appartement en présence de Eira, mon sommeil était le seul moment où mon esprit me ramenait brutalement à ce qu’avait été ma vie jusque là.
Toute la semaine où elle avait été en présence de la déesse s’écoula assez rapidement sans pour autant qu’elle n’arrive à trouver le sommeil. Puis Abel fut de retour. Pourquoi était-il parti pendant une semaine ? Etait-ce à cause d’elle ? Eva n’avait toujours pas prononcé un seul mot depuis que sa vie avait basculé. Elle avait commencé à trouver ses repères dans cet appartement qui appartenait à son sauveur. La jeune femme manquait d’assurances et d’expériences dans bien des domaines si ce n’est tous. Elle n’avait connu que la douleur des coups et la brutalité des rapports non souhaités. Et pourtant, au fil des jours, la brune avait cherché à se rendre utile. C’était comme un besoin de s’occuper mais aussi de faire en sorte qu’il ne regrette pas de l’avoir arraché aux mains du Cartel. Cette peur de devoir y retourner ou d’être envoyé ailleurs dans un endroit équivalent ou peut-être même pire l’obsédait en permanence. De nature curieuse et observatrice, elle avait fini par comprendre comment faire à manger avec l’électroménager actuel qu’elle n’avait jamais connu dans son petit village. La jeune femme ne savait faire que le minimum syndical évidemment. Mais cela la rassurait en quelque sorte de se sentir utile, même si dans le fond, elle savait pertinemment qu’il n’avait pas besoin d’elle et que cela ne serait jamais le cas. Autre que la cuisine, elle avait surtout pris l’habitude de débarrasser la table et de faire la vaisselle. C’était une tâche qui la détendait d’une certaine façon. Mais ce jour là, Eva échappa malencontreusement un verre qu’elle tenta de rattraper au vol bien maladroitement. Son geste accéléra la chute de l’objet au sol qui explosa au contact du carrelage. Un gros bout de verre remonta en direction de la main de la belle, inscrivant un arc de cercle dans sa paume qui se mit rapidement à saigner.
Merde ! Je suis désolée.
Instinctivement, les mots avaient bondi hors de sa bouche dans un espagnol aux jolies sonorités argentines. Trop occupée à nettoyer le bazar qu’elle avait mis avec le verre cassé et qu’elle continuait de mettre avec son sang qui s’écoulait de la paume de sa main droite, la brune n’avait pas réalisé qu’elle s’était exprimée à voix haute laissant son sauveur entendre le son de sa voix pour la première fois depuis leur rencontre. Enfin, c’était la première qu’il l’entendait, en dehors des cris qu’elle pouvait pousser la nuit à cause de ses cauchemars. Si la blessure de sa main lui faisait mal, elle n’en laissait absolument rien paraître, bien trop habituée à bien pire. Elle s’en voulait tellement de tout gâcher, craignant que cet accident ne révèle la véritable raison de sa présence ici qui ne pouvait être que pour faire la même chose qu’avec le Cartel : être un punching ball et un jouet sexuel en même temps. Evidemment, sa crainte se retranscrit rapidement dans ses réactions et sa gestuelle, lorsque Abel s’approcha. C’était comme si elle redoutait la punition qui lui pendait au nez depuis le début, attendant patiemment son premier faux pas. C’est elle qui avait décidé de rester, n’ayant nulle part où aller. Elle avait pris cette décision malgré le fait qu’elle l’avait vu ôter la vie à bon nombre de ses geôliers à l’aide de son épée chantante.
Dernière édition par Eva Gómez le Lun 17 Fév 2020 - 21:55, édité 1 fois
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♆Re: [Terminé] Je ne voulais pas déranger ... Mer 25 Déc 2019 - 22:28
« Je ne voulais pas déranger »
Eva & Abel
Eva semblait être un petit oisillon blessé et terrorisé par le monde qui l'entourait. Loin de son nid et sa famille, maltraitée par le bas-fond de l'humanité. Enfin, Eva, à cette époque Ogmios ne connaissait pas encore son prénom, se contentant de l’appeler jeune fille à défaut de mieux. Les sévices qu'elle avait subi et l'enfer qu'elle avait traversé au cours de son existence avaient marqués son âme et son corps au fer rouge, ne laissant pas le moindre doute sur sa stabilité. Il lui faudrait des années, des décennies et peut-être même des siècles pour surmonter tout ça. Malgré tout son savoir, malgré son long vécu et sa curiosité, le dieu n'osait guère imaginer le chaos que devait être son esprit à cause de tout cela. Être réduite à n'être qu'un simple objet, à devoir abandonner son humanité et tout ce qui allait avec, non, ces gens étaient ignobles. Tout ce qu'ils méritaient, c'était la mort, ni plus, ni moins. Ce fut d'ailleurs ce que notre ami le leur offrit en découvrant ce qu'ils avaient fait à ces filles, ce qu'ils lui avaient fait à elle. Rares furent des colères si noires au sein de l'existence de l'irlandais et, même s'il ne regrettait en aucun cas de les avoir traqués, débusqués et massacrés un à un, il regrettait cependant que cette douce enfant aie eu à le voir dans cet état. Quel bien piètre sauveur il faisait en se dévoilant plus violent et plus dangereux encore que ses tortionnaires. Quel bien piètre sauveur il faisait en ne la plongeant que plus encore dans la terreur.
Par chance, l'étranger put compter sur l'aide de sa plus proche amie, Morrigan. Certes, son homologue n'était peut-être pas la mieux placée pour gérer ce genre de situation mais … Qui d'autre ? Qui d'autre pouvait se targuer d'avoir la confiance absolue et aveugle du dieu lieur ? Certes, il y avait bien sa première disciple mais, celle-ci semblait bien trop loin pour s'occuper de cela. De plus, la jeune femme serait en parfaite sécurité aux côtés de la rousse. À vrai dire, il n'aurait pu éprouver que de la pitié pour ces pauvres humains qui se seraient dressés face au courroux de la divine guerrière. Il semblerait aussi que, aux côtés d'une présence féminine et bienveillante, l'ancienne prisonnière se soit quelques peu apaisée. L'ex belle-sœur put ainsi garder un œil sur la demoiselle, le temps que l'éloquent finisse de chasser ces horribles personnages et ramener les prisonnières en lieu sûr.
Eva, tristement, ne semblait plus avoir de chez-elle. En effet, lorsqu'Ogmios lui promis que tout était fini, qu'elle n'avait plus à craindre ces gens-là et qu'elle pouvait rentrer chez elle, elle se contenta de baisser les yeux, tristement, sans le moindre mot. Il comprit, bien entendu. Que pouvait-il faire d'autre que l'accueillir chez lui ? Sans maison était désormais la sienne, pour une durée indéterminée et sans limite. Comment lui refuser quoi que ce soit ? Comment l'abandonner après lui avoir sauvé la vie ? N'était-ce pas son devoir, désormais, de s'occuper d'elle et de veiller à son bien-être ? De plus, il avait toujours été un protecteur de l'humanité, du moins, des bons côtés de celle-ci alors, pouvait-il vraiment rester indifférent à tout cela ? Certainement pas. Les premiers jours furent difficile, une chose qui était des plus normales. Acquérir sa confiance ne serait pas chose aisée. Tout comme percer cette carapace qu'elle s'était construite au fil des ans pour survivre mais, peu importait le temps qu'il faudrait, Abel persévérerait.
Durant un moment, notre ami n'entendit pas un seul mot sortir de sa bouche. Ou du moins, éveillée. Vous vous en douterez, la belle faisait des cauchemars innommables et, toutes les nuits, son sauveur l'entendait. Bien entendu, il ne prononça pas un seul mot à ce sujet, autant ne pas instaurer plus de malaise entre eux. Sans le moindre soucis, il posa quelques jours de congés pour s'assurer que tout aille bien avec elle, faisant toujours attention de ne pas la toucher, de ne pas même l'effleurer. Ce qu'elle avait vécu devait la rendre particulièrement craintive face à la gent féminine. Le but était qu'elle se sente chez elle, tout simplement. Petit à petit, Eva s'ouvrit. Pas forcément à lui, mais à l'idée de vivre ici, faisant quelques petits plats, quelques tâches ménagères, des choses simples mais, elle semblait y tenir alors, Abel laissa faire, bien entendu. Et puis, il y eut ce jour. Après manger, l'argentine avait débarrassé et, dans la cuisine un son se fit bien vite entendre. Un verre tombant au sol en éclat et, étonnamment, la voix de la jeune femme se fit entendre, surprise et désolée. La chose tira un léger sourire à l'hôte mais, alors qu'il se dirigea vers la scène, il vit l'envers du décor. Elle était là, la main en sang, à tenter de ramasser les bouts de verres avec ses mains, l'air désolée. Pire encore, alors qu'il entrait dans la cuisine, son visage laissa place à la peur. La peur d'être punie, battue ou sûrement de nouveau violée. Un air empli de tristesse s'afficha sur le visage d'Abel, comme bloqué, ne sachant guère quoi faire, comment réagir.
Soupirant doucement, l'irlandais s’accroupit face à elle, tentant de lui offrir un doux sourire qui se voulait rassurant. « Non, s'il vous plaît, ne faites pas ça. Ce n'est qu'un verre, parmi tant d'autres. Cela peut se remplacer aisément, ce n'est en aucun cas grave, ou dramatique. Je vous l'ai dit, vous êtes désormais chez vous, nous avons une balayette et une pelle. Cela sera plus pratique et moins douloureux. Vos mains … Vos mains ont déjà vu et subi tant de choses, Il vous faut en prendre soin désormais. » Se grattant nerveusement la tête, Abel tendit la main pour attraper les ustensiles évoqués un peu plus tôt pour ramasser les débris. « J'ose espérer que cette crainte à mon égard finira par disparaître. Je sais bien que ce ne sont que des mots. Je comprends bien aussi que, des promesses en tout genre, vous avez du en voir défiler un nombre incalculable. Cependant, je me plais à penser être une personne honnête et droite. Je ne vous mentirai pas. Jamais. En revanche, il y a certaines vérités que je devrais vous cacher, un temps, attendant patiemment que vous soyez prête. Je vous rassure, cela ne sera là que quelques détails. » Soupirant de nouveau, le dieu, habituellement sûr de ces mots ne savait pourtant plus où il allait. « Je me dois de m'excuser, cela ne semble en aucun cas rassurant. Revenons en au principal, je ne lèverai jamais la mains sur vous. Je ne vous toucherai, ou ne vous effleurerez jamais sans votre consentement. Vous êtes ici chez vous, vous êtes en sécurité et je ne serai jamais, ne serait-ce qu'un peu, semblable à vos tortionnaires. Maintenant, il va falloir nous occuper de vos mains. Me permettriez-vous de m'occuper de ça ? » Présentant sa main à son invitée, Abel attendit patiemment que celle-ci lui offre la plus abîmée des deux, non sans une certaine crainte dans le regard. « Je suis désolé mais, il s'agit là de la première pour laquelle je vais vous demander un petit peu de patience. Enfin, la seconde, vous avez vu mon épée. » Glissant son doigt dans le filin de sang dégoulinant le long de son avant-bras, Ogmios finit par dessiner une de ses runes et, en un instant, les blessures de la jeune femme disparurent, comme si rien ne s'était jamais passé. Relâchant délicatement sa prise, le bibliothécaire afficha un grand sourire. « Et voilà, ma chère, comme neuve. Je peux comprendre que cela puisse sembler … Impensable. Mais je vous en conjure, soyez patiente à ce sujet. Tout viendra en temps voulu. Aussi, je ne vous cacherais pas vous avoir entendu parler pour la première fois. Me permettriez-vous de connaître votre prénom ? A moins qu'il soit encore trop tôt pour vous, pour parler. Chose que je comprendrai tout à fait aussi. »
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♆Re: [Terminé] Je ne voulais pas déranger ... Ven 27 Déc 2019 - 16:01
L’argentine se donnait du mal pour tenter de ramasser les bouts de verre qui s’étaient éparpillés sur le sol. Sa main droite blessée laissait des gouttes de sang s’écouler à intervalles réguliers, formant de jolis ronds rouge vif sur le carrelage blanc. Elle ne voulait pas mal faire, elle ne voulait pas tout gâcher et pourtant, elle avait la sensation que sa maladresse lui coûterait chère. A vrai dire, des frissons se répandaient déjà dans son corps à l’idée des répercussions possibles de cet incident, des séquelles qu’une telle erreur lui aurait laissé si elle avait encore été entre les mains du Cartel. Son coeur tambourinait de plus en plus vite et de plus en plus fort à mesure que les pas d’Abel le rapprochaient de la cuisine. Lorsqu’elle comprit qu’il arrivait à l’entrée de la pièce, son regard se releva instinctivement, commençant à se teinter d’une peur silencieuse mais pourtant bien réelle qui venait la saisir aux tripes. La brune ne réalisa pas que le dieu Celte n’était pas énervé mais attristé aussi lorsqu’il s’avança vers elle après avoir marqué un temps d’arrêt dans l’ouverture de la porte, elle recula instinctivement jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus se trouvant assise, bloquée dans un coin de la pièce, contre un placard de la cuisine, les genoux recroquevillés contre sa poitrine. Quand elle l’entendit se rapprocher un peu plus, la jeune femme enfouie son visage dans ses bras, refermant entièrement sa coquille pour tenter de se protéger.
C’est alors que son hôte s’exprima dans un espagnol parfait, la vouvoyant, au bord de la supplique. C’était totalement le monde à l’envers. A vrai dire, Eva n’en revenait pas de ce qu’elle entendait. S’il lui avait effectivement dit qu’elle était à présent chez elle, n’ayant nulle part ailleurs où aller, elle n’en avait jusque là pas cru un mot. Chaque homme qu’elle avait croisé dans sa vie avait attendu quelque chose d’elle. D’abord son père, il avait fondé de grand espoir en elle pensant avoir eu une petite merveille qui pourrait les sortir de la pauvreté grâce à ses beaux atouts. Puis chaque membre du Cartel qui s’étaient servis, prenant d’elle ce qu’il voulait, l’objet sexuel ou le punching-ball, se réjouissant de sa souffrance par la même occasion. Alors qu’il lui parla d’une pelle et d’une balayette, ustensiles plus pratiques que ses mains, elle releva légèrement la tête pour observer ses mains qui entouraient ses genoux. Prendre soin de ses mains ? Mais pour quoi faire ? La brune n’avait aucun talent d’aucune sorte. Elle n’avait aucune connaissance dans aucun domaine. Entendant bouger Abel, elle releva tout juste la tête pour zieuter par au-dessus ses bras. Ce dernier s’était mis en mouvement, attrapant les ustensiles précédemment cités pour nettoyer le bazar qu’elle avait mis. Un espèce de mouvement à peine perceptible de sa part laissa penser qu’elle aurait voulu lui prendre les outils pour nettoyer à sa place, étant la responsable de ce foutoir. Mais sa peur la cloua sur place, l’empêchant d’agir et de réagir, se demandant si elle n’était tout simplement pas en train de rêver. Puis les mots suivants la firent rater une respiration, retenant cette dernière durant quelques secondes, sous le choc. Plus le beau blond parlait et plus elle était mal à l’aise, partagée entre sa peur et l’envie de le croire. Après tout, il l’avait arraché aux griffes de ces hommes, il l’avait sauvé, lui avait donné un endroit au chaud où vivre, l’avait laissé manger à sa faim, lui avait permis d’avoir une chambre avec un lit douillet et une couette bien chaude … C’était déjà tellement trop pour elle. Il lui parla d’honnêteté et de petits secrets, lui promettant en quelque sorte qu’un jour ou l’autre, elle aurait le fin mot de l’histoire.
C’était incompréhensible. Elle était là, à son service en quelque sorte, alors que lui lui offrait tout ce dont elle aurait pu rêver, lui laissant son intimité alors que personne au cours des dernières années ne s’en était jamais souciée. Abel ne cessait de s’excuser, mettant de plus en plus mal à l’aise l’argentine qui craignait un retour de bâton, tôt ou tard. Et c’est quand il parla de ne jamais la frapper ni même la toucher ou l’effleurer sans son accord qu’elle releva encore un peu plus la tête, croisant finalement le regard azuré de son interlocuteur qui ne semblait nullement en colère. C’était pourtant un sentiment qu’elle avait déjà vu chez lui de manière très intense, le jour où il l’avait sauvé. La brune savait parfaitement qu’il n’était pas comme ses tortionnaires, il pouvait être bien pire. La grosse différence était qu’il n’était pas pire qu’eux avec elle. Il était pire avec eux, telle une vengeance, le boomerang qui revient. Etait-ce pour sa sécurité que le verrou qu’il avait installé se situer à l’intérieur de sa chambre et non à l’extérieur ? Lorsqu’elle l’avait vu vouloir installer cela, la jeune femme avait frissonné, l’imaginant déjà faire de sa chambre qui était devenue pour elle un endroit paisible le lieu de sa prison. Elle n’avait donc pas su quoi en penser lorsqu’elle avait compris que cela servait à fermer de l’intérieur et non de l’extérieur. Il ne pourrait donc pas l’empêcher de sortir ainsi, ça n’était pas là le but. Eva avait comme une sainte horreur des verrous aussi n’avait-elle jamais touché à l’engin en question. Elle fut alors sortie de ses pensées lorsqu’il lui demanda s’il pouvait s’occuper de ses mains abîmées. Son sauveur avait fini de réparer ses bêtises en nettoyant le sol et voulait à présent s’occuper des blessures de la belle, encore abasourdie par les événements. Accroupi devant elle, lui tendant sa main, le jeune homme lui demandait son autorisation, comme il avait juré de ne pas la toucher sans son accord, c’est ce qu’il demandait. La peur, la méfiance qui s’observaient dans son regard se mêlèrent rapidement à une petite étincelle d’espoir, d’envie, tel un début de confiance.
Finalement, redressant un peu plus encore le buste et la tête, elle approcha tout doucement sa main jusqu’à finir par la déposer dans celle de son sauveur, grande, chaude, chaleureuse. C’est alors que sa remarque lui parut incompréhensible pendant quelques secondes. Pourquoi parlait-il de son épée ? A quoi faisait-il référence en parlant de la première ? Voyant son doigt s’approcher de sa plaie, Eva eut de plus en plus peur, s’attendant à ce qu’il appuie volontaire dans la plaie pour lui faire mal. Mais le contact fut au contraire doux et discret. Elle ne comprenait nullement où voulait en venir le dieu tant avec ses paroles qu’avec ses actes. A quoi bon lui dessiner une jolie chose sur la main avec son sang ? Cela n’avait aucun sens. Et pourtant, d’un coup, la rune disparut, comme absorbée par la chair de la jeune femme qui vit sa plaie se refermer comme si l’incident n’avait jamais eu lieu. Le souffle coupé, elle n’en revenait pas de ce qui venait de se produire. Les yeux ébahis, elle comprenait tout juste pourquoi Abel lui avait parlé de son épée. Ce qu’il venait de faire était impossible tout comme son épée chantante était irréelle. Elle ne se rendit compte qu’après coup que le jeune homme avait déjà rompu le contact avec sa main, respectant une fois de plus son intimité. Quel était son secret qui lui permettait de réaliser un tel miracle ? En plus d’éveiller à nouveau l’envie de vivre d’Eva, le dieu de l’éloquence était en train de raviver sa curiosité naturelle, étouffée depuis de nombreuses années. Puis vint sa remarque sur sa voix, le fait qu’il l’avait entendu pour la première fois parler. Gênée à l’idée que la première chose qu’il ait entendu était une grossièreté, elle n’imaginait pas encore à quel point le choix des mots avait une importance capitale pour Oghma. Il l’avait déjà entendu hurler la nuit, il n’y avait pas de doute là dessus et pourtant, l’argentine restait persuadée qu’elle ne criait que dans sa tête, pendant ses cauchemars. Elle était loin d’imaginer qu’elle cassait les oreilles à son hôte toutes les nuits. Ce dernier lui demanda alors s’il pouvait connaître son prénom, se dépêchant de dire qu’il n’y aurait pas de soucis si elle ne se sentait pas de le lui dire pour l’heure. Gênée, déviant son regard du sien, la belle laissa plusieurs secondes qui paraissaient interminable avant de finalement lui répondre :
Eva … Je m’appelle Eva Gomez ...
Puis après quelques secondes d’hésitation, alors que ses yeux noisettes se perdaient dans les rainures du carrelage, elle osa demander :
Pourquoi ... vouloir savoir ça ?
De toute évidence, cet homme aux pouvoirs magiques et à l’épée chantante n’avait nullement besoin d’une écervelée inutile à ses côtés. Et pourtant, il lui demandait son prénom. Cela ne les avait jamais intéressé les membres du Cartel de connaître son prénom. Que pouvait-il bien vouloir faire de cette information inutile, sans aucune valeur ?
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♆Re: [Terminé] Je ne voulais pas déranger ... Jeu 23 Jan 2020 - 22:10
« Je ne voulais pas déranger »
Eva & Abel
Cette relation tout juste dans l’œuf était des plus complexes à appréhender pour Ogmios. Que faire ? Que dire ? Le celte n'en savait rien, chose qui, d'une certaine façon, avait tendance à l'amuser. Pas la situation de la jeune femme, non, l'ironie de celle-ci. Le dieu de l'éloquence qui se trouvait muet face à quoi que ce soit. Après tout, quels mots seraient suffisants pour percer cette carapace ? Quels mots suffiraient à faire le premier pas vers elle, aussi minuscule qu'il puisse être. Tout ce que l'inconnue avait vécu était inimaginable, tout comme les répercussions psychologiques de tout ceci. Comment peut-on ne pas avoir l'envie de se donner la mort soi-même en vivant tout ça ? Comment l'envie de respirer, manger ou boire peut-elle vous venir ? Peu importait l'état dans lequel ils l'avaient laissés, elle, n'avait jamais perdu cette lueur, cette petite flamme qui la raccrochait encore à la vie et à notre monde. Bien entendu, il lui était impossible de deviner ce qui lui avait donné tant de force durant tout ce temps, bien que la chose attirait sa curiosité. Vous vous en douterez, malgré sa curiosité maladive, l'étranger ne se permit, jamais, en aucun cas, de pointer le doigt dans cette direction.
Abel avait beau ne pas savoir quoi dire ou faire pour aller vers son invitée, il savait pertinemment ce qu'il ne fallait pas faire. La brusquer, l'effrayer ou encore lui donner la moindre petite raison de douter de lui. Des belles paroles, l'argentine dut en entendre une quantité inimaginable au cours de son calvaire, peut-être aussi eut elle des lueurs d'espoirs, passagères, ne faisant que la briser un peu plus lorsque la désillusion apparaissait enfin. Peu importe le temps que cela prendrait, le bibliothécaire se montrerait patient. Elle finirait par lui accorder un mot, un geste, un semblant de confiance peut-être même. Il lui fallait réapprendre à vivre, à retrouver son humanité, de l'estime de soi et une confiance en ce qu'elle pouvait faire. Le temps où, elle n'était qu'un objet était désormais révolu, ça, le dieu guerrier voulait en faire une priorité. Plus personne ne lui ferait le moindre mal. Dans la mesure du possible, bien entendu. L'espoir demeurait quant à l'avenir de la demoiselle. Elle devait se reconstruire, apprendre que son corps et ses pensées n'appartenaient qu'à elle. Que personne n'avait le droit de lui dire, ou faire quoi que ce soit, sans qu'elle ne puisse répliquer. Peut-être … Peut-être devait-il la former ? L'idée plaisait au dieu. Idée qu'il garda quelque part dans son esprit. Il faudrait du temps à leur relation pour qu'elle accepte ce genre de choses, qu'il puisse la toucher si facilement et, certainement, voir ses marques qui la recouvraient. Ce n'était là qu'une supposition mais, il semblait envisageable qu'elle puisse avoir honte de les montrer, chose qui semblait des plus naturelles, après tout.
Contre toute attente, la demoiselle accepta assez rapidement de tendre sa main à son hôte pour qu'il s'occupe de sa blessure. Malgré une certain appréhension sur le visage dissimulé contre ses genoux, elle se laissa faire, un peu perdue et dépassée par tout ce qui se passait. Mais, après tout, qui ne l serait pas ? Qui pourrait bien accepter, sans broncher, sans se poser de question, qu'un homme était capable de refermer une blessure comme ça, en un instant, comme si de rien n'était ? Personne. Personne de non drogué, j'entends. Comme à son habitude, le dieu ne put s'empêcher de parler, encore et encore, promettant des choses à sa protégée, comme celle de lui expliquer tout en temps voulu. Chose que, la demoiselle sembla accepter avec une certaine facilité, ne posant pas la moindre question sur tout ça. Cependant, lorsque vint la seule question qui attendait une réponse, son interlocutrice resta silencieuse un instant, comme n'osant s'ouvrir à qui que ce soit. Et puis, finalement, sa douce petite voix tremblotante répondit à cette question. Eva Gomez. Cette déclaration le fit doucement sourire et, avant de pouvoir se présenter en bonne et due forme, l'invitée se permit une petite question, ne comprenant guère pourquoi il voulait détenir ce genre d'information. Bien que la chose l'amusa doucement, le dieu lieur se contenta de lui offrir un petit sourire. « Cela me semble être la plus naturelle des choses, dame Eva, que d'user de votre prénom. Prénom qui est d'ailleurs des plus charmants. Je ... » Une petite grimace, accompagnée d'un froncement de nez. Il y eut un court silence, bien vite suivi d'un long soupir. « Je ne peux imaginer ce que vous avez pu vivre, dans cet endroit. Cependant, je peux vous assurer d'une chose, en ce moment, je n'ai qu'un seul et unique but, vous venir en aide. J'ignore le temps que cela pourrait prendre et, peu importe. J'aimerais pouvoir obtenir votre confiance. Vous montrer que je ne suis en rien semblables à ces ignobles personnages même si ... »
Un air triste se dessina doucement sur son visage. Lui qui se plaisait à se penser bienveillant et chaleureux, la jeune femme l'avait rencontré alors qu'il revêtait le costume du dieu guerrier, destructeur et sanguinaire. Un combattant enragé et sans pitié, décimant ses ennemis comme s'ils n'étaient rien. Absolument rien. « Même si, vous ne m'avez pas vu sous mon meilleur visage ce jour-là et, cela, je ne pourrais jamais suffisamment m'excuser. Vous n'êtes pas un objet, vous êtes une femme, forte. Vous êtes … Eva Gomez. Du moins, elle est là, cachée quelque part, au fond de vous et, j'aimerais pouvoir vous aider à la retrouver. Tout comme j'aimerais faire en sorte que tous vous donnent le respect que vous méritez. Ainsi, le respect commence par la politesse et la courtoisie. Nommer son interlocuteur me semble la moindre des choses. » Un grand sourire chaleureux suivit, très vite, d'une révérence, de la plus belle des manières possibles dans cette position hasardeuse. « Quant à moi, l'on me nomme Abel O'Connell, mais, je ne vous mentirai pas. Il ne s'agit pas là de mon vrai nom. Considérez que ce n'est qu'un pseudonyme et … Là aussi, je vous demanderais d'être patiente et, je m'en excuse de nouveau. J'ignore si cela pourrait vous apporter un certain réconfort mais, sachez cependant que les personnes au courant de ce fait sont des plus rares. » De nouveau, un sourire. Sans doutes était-ce risqué mais, l'irlandais avait envie de faire confiance à son invité. Envie de s'ouvrir à elle et lui prouver qu'il était capable de lui dire la vérité sur sensiblement tout et que, de fait, ce qu'il disait et faisait n'était en aucun cas sous le couvert d'un sombre dessein. « Dans tous les cas, ne trouvez-vous pas cela … Amusant ? Nos prénoms ? Nous venons tout deux de contrées particulièrement éloignées l'une de l’autre et pourtant, deux prénoms de deux personnages bibliques qui sont intimement liés. La mère de l'humanité et son fils cadet. Le destin semble d'humeur rieuse, qu'en dites-vous ? »
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♆Re: [Terminé] Je ne voulais pas déranger ... Dim 26 Jan 2020 - 18:23
Eva était des plus gênées, mal à l’aise. Si son hôte avait montré une bienveillance sans pareille à son égard depuis le début, depuis qu’il l’avait sauvé du Cartel, elle n’avait cessé de se répéter qu’au premier faux pas, cela pourrait changer du tout au tout. Elle avait connu bien trop de déception dans sa vie pour espérer pleinement que son enfer sur Terre avait pris fin. Mais pour autant, un petit espoir était bien présent au fond d’elle et se raviver petit à petit, un peu plus au cours de chaque journée passée dans cette maison en sécurité. Son effroyable maladresse avait été le déclencheur du terrible peur. La jeune femme pensait sincèrement que le beau blond allait à nouveau entrer dans une colère noire si elle devait commettre un quelconque impair. Sa réaction était la même que celle d’un animal sauvage. Elle était tout simplement effrayée à l’idée de replonger en enfer. Et pourtant, ce n’était pas du tout ce qui allait se passer. Abel semblait toujours aussi protecteur et bienveillant à son égard, et ce malgré sa maladresse. C’était même lui qui avait nettoyé le sol de la cuisine avant de venir la soigner d’une manière incroyable. Etait-ce de la magie ? Est-ce qu’il était un sorcier ou un magicien ? L’argentine était incapable de comprendre comment il avait pu refermer sa plaie de la sorte. Elle avait été sérieusement hésitante au moment de lui remettre sa main. Et puis, persuadée qu’elle ne pourrait pas faire pire que le désastre précédent, ne souhaitant surtout pas contrariée son sauveur, elle finit par lui donner sa main et voir sa plaie s’effacer comme si elle n’avait jamais existé. Il aurait pu saisir cette occasion pour la briser, lui faire regretter le petit espoir qu’il avait suscité en elle mais il n’en était rien. Durant un instant, une idée bien noire traversa l’esprit de la jeune femme, celle qui lui suggérait qu’il ne faisait que repousser l’inéluctable afin de la briser d’autant plus, de réussir là où le Cartel avait finalement échoué malgré tout ce qu’ils avaient fait.
La belle ne songea à cela que durant l’espace d’un instant avant de trouver de ses yeux noisettes le magnifique regard azuré de son interlocuteur. Ses beaux yeux pleins de douceur et de tendresse pouvaient-ils réellement mentir aussi bien que cela ? Etait-ce possible de renier sa véritable nature à ce point, rien que pour tromper les apparences auprès d’une personne aussi insignifiante et inutile qu’elle ? Elle n’y croyait pas. Elle ne pouvait ni ne voulait y croire. Elle se demanderait toujours pourquoi cet homme l’avait sauvé. Pourquoi avait-il pris autant de risque pour la sortir de là et finalement l’accueillir chez lui. Dans le référentiel de la demoiselle qui était constitué du peu qu’elle avait appris et surtout de ce qu’elle avait vécu, les agissements de son sauveur n’avaient pas de sens. A vrai dire, il n’avait tout simplement rien à voir avec toutes les personnes qu’elle avait pu croiser jusque là. Seuls ses parents lui avaient porté de l’affection et malgré cela, elle gardait toujours un petit arrière goût de reproches vis à vis de leur naïveté et de la situation dans laquelle son père les avait mis en pensant que sa fille était bonne à quelque chose. L’usage du terme “dame” pour s’adresser à elle la laissa clairement perplexe. Elle n’avait rien d’une dame, elle n’avait jamais rien eu pour être assimilée à une dame et ça ne serait clairement jamais le cas. Seulement très vite, Eva fut plus prise au dépourvu que perplexe. L’aider ? Obtenir sa confiance ? Mais dans quel but ? Buvant chacune de ses paroles pensant trouver à force un semblant de réponses dans tout ce que le beau blond pouvait lui dire, elle resta accrochée à ses lèvres alors que la phrase d’Abel ne trouva pas de fin. Pourquoi était-il triste ? Regrettait-il de l’avoir extirpé de là-bas ? Il avait pris de gros risques en s’attaquant à une organisation de cette taille, surtout seul. Allant de surprise en surprise, voilà que son hôte pensait ne pas pouvoir suffisamment s’excuser pour son comportement lors de leur rencontre, comportement qui lui avait enfin permis de ne plus vivre chacune de ses journées en enfer.
Petite, son père lui avait raconté maintes et maintes fois les histoires de la Bible et le principe fondamental du péché et du pardon. Mais la brune avait bien plus retenu les légendes Mayas de sa mère qui lui racontaient cela lorsqu’elles cuisinaient toutes les deux en attendant le retour du patriarche. La petite fille de cette époque aimait beaucoup Kukulkan, le dieu Maya suprême qui avait permis au peuple de sa mère de vivre et de survivre des milliers d’années plus tôt. Ses vieilles histoires n’avaient eu de cesse d’émerveiller Eva à l’époque. En grandissant, son âme c’était de fait plus tournée vers la déesse Ix Tab, déesse du suicide. Les Mayas pensaient qu’une mort volontaire par pendaison donnerait un accès immédiat au paradis. Plus les jours passés entre les mains du Cartel et plus la belle avait eu envie de croire en cela espérant un jour avoir l’outil adéquat entre ses mains pour en finir avec tout ceci. Les paroles d’Abel ne la laissaient pas indifférente, loin de là. Mais elle était encore coincée dans cet engrenage où elle pensait ne pas avoir le droit de décider de ce qu’elle voulait pour sa propre vie. Aussi ne put-elle s’empêcher de commenter, une fois qu’il lui eut donné son identité également ou du moins son pseudonyme :
La Eva dont vous parlez n’a pas cessé de prier Ix Tab ...
Elle avait soufflé ces mots dans un murmure, plus pour elle que pour lui, ne pensant pas une seconde qu’il puisse comprendre le sens de sa phrase. Son visage souriant était des plus encourageants mais à vrai dire, la jeune femme ne savait trop quoi attendre de cette nouvelle vie, de ce nouveau milieu qui lui était totalement inconnu ou encore de lui. Ce beau blond au visage d’ange et à la douceur incroyable la prenait au dépourvu en permanence. Elle avait besoin de repères, elle avait besoin de prendre ses marques pour pouvoir petit à petit un jour peut être croire que tout ceci n’est pas qu’un simple rêve ni une seconde vie dans l’au-delà. C’est alors que son hôte évoqua le lien peu probable de leur deux prénom. S’il savait le pourquoi de ce choix. Son père n’avait cessé de lui dire qu’il lui avait donné le plus beau des prénoms, celui de la plus belle des femmes, la toute première, tout simplement parce qu’à ses yeux, sa fille lui faisait honneur. Mais avec les années, elle avait commencé à hair ce prénom chrétien qui semblait plus lui avoir apporté le malheur que le bonheur. Toujours assise contre le meuble, sa prise sur ses genoux s’était doucement relâchée jusqu’à ce qu’une de ses jambes s’allonge tranquillement le long des autres meubles. Sa tête s’était redressée petit à petit et à présent, même si ses yeux pouvaient parfois se refermer, ils lui permettaient de facilement voir son interlocuteur, sa tête était orienté plutôt vers le haut, le sommet du crâne posé contre la porte du placard d’angle. Eva n’était pas réellement prête à apprécier ce genre d’humour du destin. Ce n’est pas Abel qui a dû protéger Eve. C’est Eve qui a échoué à protéger son fils de son aîné.
S’attendait-il à ce qu’elle le protège en retour de l’aide qu’il lui avait apporté ? Mais de quoi et comment ? L’argentine se jugeait réellement capable de rien à l’heure actuelle. Finalement ayant ce besoin irrépressible de retrouver cette petite place qu’elle s’était faite de “bonne à tout faire”, le belle se releva et attrapa la pelle pleine pour aller jeter son contenu, tout en évitant avec soin le beau blond. Ce premier échange verbal était en train de la tirailler de l’intérieur. Tandis que son cerveau ne cessait de lui crier de rester sur ses gardes pour ne pas se faire avoir une nouvelle fois, son coeur lui chuchotait que cette fois c’était la bonne et qu’elle devait faire confiance au jeune homme qui l’avait sauvé et accueilli dans cette magnifique demeure. Après avoir vidé le contenu de la pelle, elle rangea les outils là où Abel les avait pris et attrapa une serpillère qu’elle mouilla et essora à la main avant de venir frotter le sol pour effacer les traces de son propre sang du carrelage de la cuisine.
Dernière édition par Eva Gómez le Lun 17 Fév 2020 - 21:58, édité 1 fois
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♆Re: [Terminé] Je ne voulais pas déranger ... Sam 15 Fév 2020 - 17:53
« Je ne voulais pas déranger »
Eva & Abel
La situation était particulièrement épineuse. Le moindre faux-pas, le moindre mot empli d'un quelconque sous-entendu, ou encore, le moindre geste un peu trop vif pouvait briser, peut-être à jamais, cette ouverture. La demoiselle était, pour des rasons évidentes, loin d'être accessible. Le temps, sans doutes, permettrait de faire quelques pas en sa direction. Trouver les bons mots, les bons gestes, dans la bonne situation. Elle avait été brisée et, peu importe les siècles qui pourraient passer, son interlocutrice garderait des séquelles de cet enfer. Dieu ou non, Ogmios ne pourrait jamais rien y faire. Néanmoins, ce dernier pouvait apaiser, un peu, cette douleur, ce malaise et, peut-être lui faire retrouver, un jour, un semblant de sourire. Sourire qui, s'il devenait sincère serait sans nul doutes des plus charmants à découvrir. Cela relevait de la supposition mais, l'hôte espérait sincèrement y arrivait. Non pas pour découvrir ce supposé sourire, mais pour permettre à cette âme perdue de retrouver un semblant de vie qu'elle aurait du avoir. Le temps, il l'avait, tout comme la patience et les bonnes intentions. Restait à savoir si, la jeune femme l'aurait, cette patience. Restait à savoir si, à cause de ce qu'elle avait vécu, une confiance absolue lui serait offerte. Mais comment ? Comment pouvait-on avoir un semblant de confiance envers la gent masculine après toutes ces horreurs ? Comment pouvait-elle ne serait-ce qu'accepter que son interlocuteur lui adresse la parole ? Lui qui avait massacré nombre d'hommes avec une intrigante facilité. Ne devrait-elle pas être terrorisé par lui ? Ne devrait-elle pas craindre son courroux, ou pire, ses intentions cachées ? Cela relevait-il d'une naïveté infinie ? Ou bien d'une force mentale à toute épreuve ? Peut-être, était-ce lui, le plus naïf des deux mais, le dieu lieur se plaisait à imaginer chez son invitée un mental d'acier. Pour ne pas sombrer, après tout ceci, il en fallait, à n'en point douter.
Mais, lorsque la demoiselle évoqua, dans un soupir, ses penchants religieux, Abel ne put s'empêcher de lâcher un long soupir en se frottant nerveusement l'arrête du nez. La déesse de la potence et des suicidés. Pouvait-on réellement lui en vouloir ? Il n'y avait pas de doutes sur le fait qu'Eva avait passé un long moment en compagnie de ces ignobles personnages. Un trop long moment, qui avait été ressenti comme une éternité, comme une vie entière. Il semble normal qu'en finir puisse sembler être une porte de sortie, la plus évidente et la plus simple mais, était-ce réellement une solution ? « Loin de moi l'idée de remettre en question vos convictions religieuse, mais, je pense sincèrement que le suicide n'est en rien une solution. Cependant, je peux vous assurer comprendre le raisonnement. La simplicité de la chose, la libération de tous vos maux et votre douleur, pour vous retrouver auprès de cette déesse protectrice, auprès de qui, plus aucun mal de vous sera fait. Mais … Parfois, la vie mérite d'être vécue. Voyez, votre patience et votre courage vous ont mené hors de cet enfer, vivante. Brisée, mais vivante. Vous ne me faites pas confiance et, c'est tout naturel. Je dirais même que c'est une bonne chose, nul ne sait ce que les gens ont en tête, il faut continuer à vous montrer méfiante, peu importe si les bons mots sont trouvés. » Un doux sourire ponctua ses mots avant qu'il ne la regarde droit dans les yeux, tentant d'une certaine façon d'appuyer ses mots. Est-ce que de simples mots pouvaient toucher une âme si amochée ? L'on pourrait penser qu'en tant que dieu, Ogmios pourrait se servir de ses dons sur elle mais, était-ce vraiment une bonne idée ? Lui qui espérait avoir, un jour, un peu de sa confiance. Que se passerait-il le jour où elle viendrait à découvrir la supercherie ? Ne se renfermerait-elle pas plus encore ? Non, céder à la facilité n'aiderait en rien.
Bien vite, les présentations furent faites et, l'irlandais évoqua un lien biblique entre leur prénoms, qui semblait l'amuser. Malheureusement, son interlocutrice ne semblait guère voir la chose du même œil, évoquant plutôt le maque de clairvoyance de la première femme quant aux actions de son fils qui entraîna la mort du dénommé Abel. En la regardant pensif, le bibliothécaire se gratta doucement le menton, réfléchissant à ce qu'il allait répondre. Non pas ce qu'il allait dire, mais plutôt comment le dire. La belle était de celle avec qui il se devait de prendre des pincettes, peser chacun de ses mots, dans l'espoir de ne pas briser cet élan de conversation. « Pourtant, il me semble bien que, la grande majorité des enfants ne souhaitent qu'une chose : voir ses parents heureux. Imaginer sa mère en danger, blessée ou triste suffirait à faire fondre bien des âmes. Du moins, il me semble. Pour ce qui est de l'échec de la première mère, je suis désolé mais, je ne suis pas du même avis. Peut-être me trompè-je, mais, je doute fortement qu'une mère puisse imaginer son enfant capable de telles choses. Peut-être, une fois encore, n'ai-je qu'une vision romancée de la chose mais, il me semble bien qu'une mère n'aie tendance qu'à voir le bon en son enfant. Comment aurait-elle pu imaginer pareille atrocité ? D'autant plus que, la pauvre, n'avait guère de référentiel, la violence entre humains n'existait pas. Alors, pourquoi aurait-elle pu avoir l'idée de protéger ses enfants l'un de l'autre ? »
Une moue satisfaite se dessina sur son visage, oui, ça lui semblait être une bonne formulation. « Enfin, ce ne sont là que des noms, ils ne définissent en rien ce que nous sommes, ou qui nous sommes. Désormais, vous êtes libre d'être qui vous voulez et, ce que vous voulez. » Oui, Eva était libre désormais. Cela lui prendrait du temps, sans le moindre doute mais, la belle n'aurait plus à demander l'autorisation à qui que ce soit de faire ce qui lui chantait. Ogmios y veillerait, jalousement. L'argentine avait eu son lot de malheurs et de mauvaise rencontre pour plus d'une vie, plus jamais personne ne lui ferait du mal. Du moins, tant qu'il le pouvait et, tant qu'elle accepterait qu'il puisse veiller sur elle. Une fois l'échange clos, la demoiselle finit par se mettre en tête de nettoyer le sol, semblant faire comme si c'était la plus naturelle des choses, ce qui tira un léger sourire en coin à son bienfaiteur. Ce n'était pas l'idée que la jeune femme fasse le ménage qui lui plaisait, non, c'était le fait qu'elle prenne ses aises, qu'elle se sente un peu comme chez elle. Ou du moins, c'était un début, un bon début. Finissant par se relever pour s'écarter, dans l'idée de ne pas la gêner dans son œuvre, avant de se laisser aller à une proposition, espérant la mettre un peu plus à son aise. « Bien, dites-moi, quelque chose vous ferait plaisir ? Un plat en particulier peut-être ? Une boisson ? Ou, je ne sais pas, un film que vous pourriez avoir envie de revoir ? Ou quoi que ce soit d'autre qui pourrait vous rendre, ne serait-ce qu'un peu, joyeuse ? Je tiens à ce que ce toit sur votre tête puisse être perçu comme un refuge, chaleureux et bienveillant. Alors, si je peux faire quoi que ce soit pour améliorer votre confort, n'hésitez pas, cela sera avec grand plaisir. »
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♆Re: [Terminé] Je ne voulais pas déranger ... Lun 17 Fév 2020 - 21:55
En échappant dans un murmure l’objectif maladroit de ses prières, l’argentine était loin d’imaginer que son interlocuteur pourrait comprendre. Il n’avait pas les mêmes racines qu’elle, s’était indéniable. Or, le culte maya n’était pas très répandu en dehors de l’Amérique du Sud. Il n’était déjà plus trop prié lorsqu’elle était petite mais elle imaginait bien que cela ne s’était pas amélioré avec le temps. Son père avait délaissé ses racines avant sa naissance alors que sa mère avait voulu y faire perdurer telle une tradition dans la famille. C’était ainsi que Eva avait appris à connaître les différents dieux mayas, y compris Ix Tab, déesse du suicide par pendaison, qui offrait à qui s’efforçait de passer à l’acte un aller simple pour le paradis. Bon nombre de fois la jeune femme y avait songé mais jamais l’occasion ne s’était présentée à elle. Peut-être était-ce un signe qu’elle devait continuer d’y croire … Mais croire en quoi exactement ? En sa libération ? Voilà qui était chose faite grâce au beau blond qui était en sa compagnie. Et maintenant quoi ? Que devait-elle faire ? Comment devait-elle agir exactement ? En réalité, elle n’avait pas la moindre idée de la marche à suivre ou de la suite des événements à venir. C’est alors qu’Abel reprit la parole, la prenant au dépourvu. Ses prunelles noisettes se tintèrent d’un éclat de surprise alors qu’il lui avouait ne pas partager son point de vue même s’il semblait vouloir lui faire comprendre qu’il comprenait qu’elle ait pu arpenter ce sinueux chemin. D’étonnement en étonnement, il semblait vouloir lui faire voir le bon côté de la vie, de sa vie. Or, il n’y en avait aucun. Au terme “brisée”, la belle baissa le regard. Il n’y avait plus rien en elle que de la peur, une éternelle crainte de retourner vivre en enfer, crainte qu’elle ressentait au plus profond de son être à chaque seconde qui s’était écoulée depuis que son sauveur était venu massacrer ses geôliers et l’emmener loin de tout ça. Elle finit par relever le visage alors que Oghma termina de s’exprimer, permettant à leur regard de se croiser alors qu’il lui adressa un beau sourire, un de ceux qui donnait envie de faire confiance même si son cerveau ne cessait de carburer pour essayer de trouver une échappatoire, une façon de s’en sortir seule.
Mais cela faisait plus de quinze ans qu’elle était retenue par le Cartel lorsque Abel était venu la sauver pour une bien mystérieuse raison. A vrai dire, depuis qu’il était de retour dans cette maison où il l’avait amené pour la mettre à l’abri, plusieurs questions la démangeaient : Comment avait-il fait ce qu’il avait fait ? Comment l’avait-il trouvé ? Comment avait-il pu la ramener aussi aisément aux Etats-Unis alors qu’elle n’avait pas la nationalité ni de papiers ? Mais surtout, elle aimerait comprendre pourquoi il avait fait tout ceci rien que pour … elle ? Seulement, Eva n’était pas prête pour une aussi grande conversation, elle n’était pas prête à franchir le pas, à oser l’interroger. Le silence était un réconfort pour elle pour la simple et bonne raison que depuis des années, lorsqu’elle n’entendait que les mouches volaient, cela signifiaient qu’elle était en sécurité, tranquille, qu’elle ne craignait pas de se faire sauter dessus pour se faire frapper ou violer dans la minute qui allait suivre. Faisant la remarque sur le fait que Eve, la première femme de l’humanité, avait échoué à protéger son fils Abel, elle ne s’attendait pas à trouver une répartie aussi rapide, digne d’intérêt et de sens, sans qu’aucune offense ne lui soit faite. A vrai dire, elle n’avait réalisé qu’après avoir parlé, qu’elle aurait mieux fait de garder cela pour elle. Sauf qu’une fois de plus, le beau blond n’eut aucune réaction violente ou menaçante vis à vis de sa réponse, de sa remarque contraire à son approche. Il ne cessait de lui expliquer son point de vue sans jamais porter de jugements hâtifs sur le sien. Un simple signe de la tête, cela fût la seule réaction de la brune qui sembla un peu scotché par ce point de vue si différent du sien mais si vrai également. Puis il en revint à sa propre liberté qui faisait que peu importe le nom qu’elle portait, la jeune femme pourrait faire ce qu’elle voulait. Mais elle ne savait pas ce qu’elle voulait faire. Baissant légèrement la tête, ne sachant plus où se mettre ni quoi dire, l’amérindienne reprit le nettoyage de ses bêtises tout simplement. Voir son sang ainsi sur le sol blanc lui rappelait de trop mauvais souvenirs. Elle avait été tellement de fois recouverte de son propre sang à cause de certains membres du Cartel qui se plaisaient à la prendre pour un punching-ball. Elle avait essayé de rétorquer par moment, au début. Mais elle était jeune, inexpérimentée et affaiblie par la malnutrition. En seulement deux semaines à remanger un minimum, Eva avait déjà retrouvé quelques formes plus féminines. Elle faisait bien moins maigrichonne mais pour autant, elle ne mangeait pas encore réellement à sa faim, elle n’osait tout simplement pas. Entendant son bienfaiteur s’éloigner, elle avait l’impression qu’en quelques secondes tout allait redevenir comme avant et qu’elle allait pouvoir retourner à son mutisme. Seulement la voix de son protecteur se fit entendre de nouveau, la poussant à se statufier lorsqu’il lui parla de plaisir, de plat, de boisson et de film. Mal à l’aise, la gorge serrée, elle était à la fois gênée de l’attention que lui portait son hôte et également angoissée à l’idée de se faire avoir par un quelconque piège. Terminant de passer la serpillère alors qu’il attendait adossé à l’encadrement de la porte, ses prunelles noisettes remplies de stress trouvèrent le regard paisible de la mer ce qui la calma légèrement.
Je … Je n’ai jamais vu de film.
Bien sûr, elle avait vu la télévision depuis son arrivée dans cette maison mais c’était bien la première fois qu’elle voyait un tel écran. Ses parents n’avaient absolument pas les moyens de se payer ce genre de choses et puis, couper d’une quelconque civilisation pendant près de quinze ans n’avait aidé en rien. Elle était gênée, elle ne savait pas vraiment où se mettre. Jusqu’à présent, dès qu’elle ne faisait pas une quelconque petite tâche ménagère pour essayer de se rendre utile et d’éviter qu’il ne regrette sa présence, elle finissait généralement en boule dans sa chambre à laisser son cerveau fumé en imaginant le pire, encore le pire et toujours le pire des scénarios. Elle n’avait pas répondu cela en pensant préférer voir un film, c’était tout simplement la seule chose qui était sortie de sa bouche, la seule chose qu’elle avait été capable de dire. Mais son intervention fut une fois de plus accueillie avec le sourire. Abel lui suggéra d’aller prendre une douche le temps qu’il leur prépare une soirée plateau télé. L’argentine n’avait pas la moindre idée de ce que cela pouvait être mais accepta sans contester, montant à l’étage pour aller dans sa salle de bain se glisser sous une eau chaude presque brûlante. Rien de ce qu’elle vivait depuis deux semaines ne semblait réel. Elle s’attendait toujours à se réveiller un beau matin dans cette pièce sinueuse où elle était détenue en ayant rêvé de tout cela. Une fois sortie de la salle de bain, elle enfila un des pyjamas que Oghma lui avait fourni composé d’un débardeur et d’un pantalon large et se recouvrit d’une étole pour dissimuler son buste et ses bras. Puis elle redescendit, découvrant avec stupéfaction un assortiment de choses à grignoter et à boire posé sur la table du salon alors que l’écran allumé semblait être figé. Son sauveur l’invita à s’installer ce qu’elle fit en prenant soin de garder une certaine distance. Lui était dans un coin du canapé, Eva s’installa à l’autre bout de ce dernier, dans un coin également, recroquevillant ses genoux contre sa poitrine. Le film fut lancé et l’amérindienne se servit uniquement lorsque le beau blond lui demandait si elle voulait quelque chose, jusqu’à ce qu’il remarque son engouement pour le guacamole qui était un met d’un pays voisin au sien et qu’il lui dise qu’elle pouvait finir. A l’approche de la fin du film, alors que le dénouement avait lieu, elle murmura sans aucune explication complémentaire, se disant que son sauveur comprendrait par lui-même :