As every year I come to see you

Hope n’était pas du genre supersticieuse. C’était une scientifique à présent agent de terrain comme lieutenant qui était assez terre à terre. Elle avait besoin de preuves concrètes, tangibles, pour tout ce qui arrivait où presque. Et pourtant, l’année où elle eut son diplôme fût une année maudite. Sa mère qui se battait depuis quelques années déjà contre la maladie succomba quelques semaines après la validation de ses résultats et de son diplôme. Quand à son père, ce fut quelques mois après qu’elle le perdit dans l’exercice de ses fonctions. Deux malfrats qu’il avait rattrapé après avoir braqué une supérette. L’un d’eux n’a pas su faire preuve de sang froid et lui a tiré dessus ni une ni deux, sans réfléchir. Le pire dans tout ça, c’est que cet homme qui lui a pris son père courait toujours dans la nature. Ce n’était pas la première fois que la jeune femme était témoin d’une injustice dans ce monde, c’était monnaie courante même dans son métier. Mais il était tellement plus douloureux de la subir soi-même que de constater cette injustice chez les autres. Cela n’avait fait que renforcer son envie de rendre justice mais il était clair qu’elle voulait aussi un peu se faire justice à elle même. Si personne n’avait rien pu faire quand à la mort de sa mère, le destin semblait s’être acharné sur elle cette année là, lui laissant obtenir son diplôme que comme lot de consolation. La brune s’était faite depuis longtemps à la séparation de ses parents. Elle avait trouvé son rythme pour aller voir l’un et l’autre sans prendre position dans leurs querelles, sans être prise à partie ou entre deux feux. Aujourd’hui tout cela n’avait plus aucun sens. Il ne lui en restait aucun des deux et elle s’était retrouvée totalement seule du jour au lendemain.

Il faut dire que l’ex-étudiante nouvellement entrée dans la vie active au sein de la police scientifique de Philadelphie ne s’était pas fait beaucoup d’amis. Elle n’était pas très ouverte, pas très sociable, restant généralement discrète, seule dans son coin. Accrochée à ses études puis à son job, elle préférait déjà la solitude à une mauvaise compagnie. Cette façon d’agir s’était renforcée avec le temps. En dehors de ses heures de travail, Hope passait son temps à la salle de combat à s’entraîner ou chez elle, à essayer de recoller les morceaux de l’enquête de son père pour mettre le coupable derrière les barreaux. Elle ne voulait pas lâcher l’affaire et la preuve en était, qu’elle décida au bout de quelques années de passer le concours interne des lieutenants de police pour se réorienter. Tout le monde au poste fut étonné de son choix, son changement aussi rapide pour le poste que son père avait convoité avant elle. C’est Kaitlyn qui a continué d’être présente pour elle. La lieutenante au fort caractère plus âgée qu’elle de quelques années lui était fort sympathique. Elle faisait partie de ses collègues qu’elle appréciait réellement, pas juste pour le travail et la bonne cohésion d’équipe. Elles travaillaient en bonne intelligence ensemble. Elle fut d’ailleurs très touchée par ce qui lui arriva à son coéquipier et elle. Elle lui envoya quelques messages de temps en temps, des messages de soutien et de prise de nouvelles. La brune ne voulait pas non plus l’envahir aussi en six mois d’arrêt, elle avait dû en envoyer trois ou quatre au maximum. Elle savait à présent que sa collègue allait être de retour au poste et ça lui faisait plaisir.

Pour l’heure, cette journée était son jour de repos et à part ses courses et son ménage habituel avant de passer à son entraînement et ses recherches sur le meurtre de son père, la jeune femme allait devoir se rendre à l’hôpital comme chaque année. Vêtue d'un slim noir et d'un top bleu marine, elle avait décidé d'utiliser les transports en commun pour se rendre à l'hôpital. Depuis la mort de sa mère, son cardiologue, le Dr Valeyard, lui avait préconisé de se faire suivre régulièrement afin de surveiller l’apparition potentielle de la maladie. Hope n’était pas emballée par cette idée. Le docteur avait un charisme naturel impressionnant qui l’attirait étrangement et cette situation la mettait un peu mal à l’aise. Que cela soit les collègues de travail ou les personnes utiles dans son entourage comme son médecin, son avocat ou encore son notaire, elle évitait des relations avec ces derniers. Elle avait eu peu de relations au cours de sa vie, toutes relativement brèves et ne voulait pas avoir une quelconque gêne au travail ou avoir le besoin de changer de professionnel de confiance. Elle s’était donc pliée aux recommandations médicales qui avaient mis en avant une prise en charge trop tardive de sa mère pour qu’elle puisse continuer de vivre avec la maladie à terme. Son rendez-vous était en fin de matinée aussi s’y prit-elle en avance pour se rendre à l’hôpital en transport en commun. Cela était bien plus simple que de se garer à cet endroit de la ville. Arrivée avec un bon quart d’heure d’avance, faisant résonner ses talons aiguilles sur le carrelage du couloir, la brune prit place dans la salle d’attente et se mit sur son téléphone en attendant que cela soit son tour.

As every year I come to see you

L’attente ne fut pas si longue. A vrai dire, perdue ainsi dans son téléphone, la brune arrivait aisément à s’occuper même si cela avait souvent pour conséquence de lui vider intégralement la batterie de son téléphone. En même temps, il existait une panoplie d’applications et de jeux et en ajoutant à cela le fait qu’elle se mettait systématiquement de la musique dans les oreilles, à commencer par son jogging du matin, alors son téléphone tournait à fond les ballons, épuisant sa batterie presque à vue d’oeil. Lorsque le docteur Valeyard arriva finalement, elle accueillit son sourire avec un sourire similaire, ôtant les écouteurs de ses oreilles pour fourrer le tout dans son sac à main. Se rendait-il compte des têtes qu’il faisait tourner sur son chemin ? Le couloir était rempli de femmes mais également d’hommes qui le suivaient du regard. A croire que le jeune homme était un véritable aimant mais qu’il ne s’était toujours pas rendu compte de l’effet qu’il faisait à quiconque croisait sa route. C’était très perturbant et déstabilisant de faire face à un homme de sa trempe. Il était beau, grand, musclé de ce que laissait entrevoir ses vêtements avec un regard bleu encore plus perçant que le sien. En ajoutant à cela le charme fou qu’il dégageait en permanence, il était clair que Hope avait du mal à rester concentrée face à lui ce qui rendait chacune de leur rencontre pas si évidente que cela. Lorsqu’il fut arrivé à hauteur de la porte de son bureau, la jeune femme se leva, prête à le suivre, tout en le saluant.

Bonjour docteur Valeyard

La porte passée, la lieutenante s’installa du côté patient, posant son sac sur la seconde veste et prenant ses aises. Ce rendez-vous avait lieu tous les ans aussi connaissait-elle la routine des contrôles qui ne variait pas vraiment. Une fois Melchiah installé en face d’elle, il lui posa la même question que depuis plusieurs années, à quelque chose près. Cela devait faire trois ou quatre ans que ce dernier avait suggéré qu’ils passent tous deux au tutoiement. Si cela ne la dérangeait pas outre mesure, le beau brun connaissant un pan important de sa vie concernant sa mère, l’exercice n’avait pas été des plus simples. Après tout, lorsque l’on ait habitué à vouvoyer une personne, le changement est difficile au départ. Alors faire cela avec un homme qu’elle ne rencontrait qu’une fois de l’an, c’était une tâche d’autant plus ardue.

On fait aller, la routine quoi. J’enchaîne les enquêtes comme vous.. Tu dois enchaîner les rendez-vous avec tes patients.

Il fallait dire que pour une jeune femme célibataire, sa vie n’était pas régi par les surprises mais bien plus par les habitudes. Elle ne sortait de son confort que lorsque Victoria ou Siofra la poussait à le faire. Boire un verre était une chose qu’elle faisait bien plus souvent seule chez elle que dans un bar ou un restaurant en compagnie d’amis ou d’un homme. Le voyant zieuter son dossier, la lieutenante ne put s’empêcher de commenter, un petit sourire aux lèvres :

Tu n’en as pas marre de regarder un dossier qui de toute évidence te fait perdre plus de temps qu’autre chose ?

Sa mère était morte depuis huit ans maintenant. Cela faisait bien une douzaine d’années qu’elle connaissait le docteur Valeyard qui s’était occupé de sa génitrice du début à la fin. Donc depuis huit ans, le cardiologue perdait une heure de son temps par an avec elle à vérifier que tout allait bien. D’un autre côté, son propre chef lui demandait si elle continuait toujours bien de faire le suivi nécessaire, ne voulant pas perdre un agent sur le terrain à cause d’un problème qui aurait pu être identifié en amont. Le médecin lui demanda alors de retirer son haut, précisant comme à son habitude qu’elle pourrait rapidement le remettre. Il était vrai qu’au vue de l’impact de sa présence sur son entourage, beaucoup de femmes devaient être gênées dévêtues ainsi. Mais d’un autre côté, elle était peut être la première de la journée qu’il verrait en soutien-gorge mais très certainement pas la dernière. Les médecins devaient être désensibilisés à la longue par la nudité de leurs patients. S’avançant rapidement sur sa chaise, elle ôta son top bleu qu’elle déposa sur la chaise voisine sur son sac à main avant que Melchiah ne vienne lui poser les électrodes qui allaient permettre de contrôler l’état de son coeur. De temps en temps, une petite pointe se faisait au niveau de l’électrocardiogramme, lorsque le beau brun restait à proximité un peu trop longtemps. Sa présence la perturbait elle le savait. Elle espérait simplement que le cardiologue ne s’en était pas rendu compte. Hope écouta les instructions comme si cela était la première fois, agissant et réagissant aux demandes du médecin.

Et toi alors, ta vie est-elle régie uniquement par tes rendez-vous avec tes patients ?

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A la réaction du médecin, la jeune femme ne put s’empêcher d’échapper un rire complice. Cela serait probablement un comble pour un médecin de ne pas savoir lire. Mais il était certain qu’elle n’avait pas fait la remarque pour rien. Si les risques qu’elle ait la même maladie que sa mère existait, elle avait tout de même l’impression de lui faire perdre son temps à chaque fois qu’elle venait le voir soit une fois par an. Non pas que cette visite annuelle était désagréable. Le docteur Valeyard s’était toujours montré sympathique avec elle en plus d’être compatissant à la mort de sa mère. Si elle l’avait rencontré pour la première fois il y a douze ans, lorsque la maladie de sa génitrice avait été diagnostiqué, elle n’avait pas assisté à toutes les visites avec sa mère. Aussi, elle ne le côtoyait réellement que depuis qu’elle était elle-même devenue sa patiente soit au décès de sa mère. Venir passer du temps ici était loin d’être désagréable. Melchiah était un homme charmant, agréable à regarder. Elle ne connaissait pas sa recette miracle pour s’entretenir de la sorte mais c’était déjà fait la remarque comme quoi il ne semblait pas vieillir avec le temps. Certaines personnes avaient cette chance de ne pas franchement changer. Evidemment, il l’avait connu tout juste majeur alors forcément, il avait dû constater son évolution au cours des dernières années. Une fois son top enlevé, le beau brun déposa l’un après l’autre chaque électrode nécessaire à son contrôle annuel. Malgré l’habitude, il y avait toujours ce petit quelque chose d’impressionnant et de charmant chez lui qui la perturbait. En même temps, quelle femme ne serait pas un minimum affectée par un bel homme au regard perçant en dehors d’une lesbienne ? Il devait très certainement faire tourner la tête de plus d’une de ses patientes. Un nouveau sourire vint illuminer le visage de Hope à la petite blague du cardiologue. Comme à son habitude, il était en grande forme. Un petit rire lui échappa à la remarque suivante avant qu’elle ne rétorque :

Je consacre mon temps à mon travail aussi et rien de plus. Le quotidien d’un lieutenant de police n’est pas aussi excitant que ce que l’on peut imaginer.

Écoutant les instructions, la jeune femme repositionna son haut avant de monter sur le tapis de course. Le rythme de départ était presque trop lent pour la brune qui avait l’habitude de courir. Par contre, lorsqu’il augmenta la cadence pour commencer à tester les réactions de son coeur, il lui fit presque regretter d’avoir faire son jogging matinal. L’exercice était-il aussi intense pour tous les patients ou bien tirait-il un peu sur la corde du fait de son métier ? Elle était bien loin de se douter ou de voir le regard du médecin sur son corps, le pensant concentré sur la machine et les résultats de son test à l’effort. Entraînée comme elle l’était, si elle transpirait en abondance, Hope arrivait toutefois à suivre la cadence sans grande difficulté. La remarque du docteur la fit éclater de rire alors qu’elle descendit du tapis qui ralentissait rapidement.

tu as le chic pour les répliques qui tuent dis moi. Est-ce normal que tu me fasses courir aussi vite et aussi longtemps ou te venges-tu de la perte de temps annuelle que je te crée ?

C’était de manière totalement amusée qu’elle lui posa la question.S’il parlait ainsi à toutes les femmes qui passaient dans ce cabinet, il risquait de les tenir bien à distance. D’un autre côté, là était peut-être son but. Elle ne s’était jamais posée la question de s’il avait quelqu’un dans sa vie. Une fois descendue du tapis, elle attrapa sa serviette pour s’éponger avant de retirer son top pour pouvoir mieux s’essuyer, faisant tomber son paquet de cigarettes au passage qu’elle remit dans son sac à main. C’est qu’il l’avait fait transpirer bien comme il faut ce bougre de cardiologue.

Les données sont toujours aussi bonnes que d’habitude ?

A chaque fois, il lui donnait une bonne nouvelle. A l’heure actuelle, rien ne laissait à penser que la brune souffrirait du même mal qui avait emmené sa mère loin d’elle. La maladie pouvait toutefois se déclencher à tout moment à priori, c’était pour cela qu’elle se faisait suivre et revoyait le charmant docteur à peine plus âgé qu’elle tous les ans. Si lui ne semblait pas avoir changé d’un pouce, ne pas avoir pris une ride, ce n’était pas le cas de Hope qui était passée de adolescente à jeune adulte puis femme depuis qu’ils se connaissaient.

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Melchiah se moquait ouvertement d’elle et cela la faisait bien rire. La jeune femme commençait toujours leur rendez-vous annuel un peu mal à l’aise du fait du charisme transcendant du cardiologue. Mais depuis qu’ils se connaissaient, les années avaient passé et elle était de plus en plus vite à l’aise. Le fait qu’il mette autant en avant sa profession la flattait forcément un minimum. Mais là où le beau brun semblait voir quelque chose d’extraordinaire, de fascinant voir d’impressionnant, elle, ne voyait que son professionnalisme dont découlait son sens du devoir et de la justice. C’était naturel chez elle, inné, de vouloir donner de son temps et de sa personne pour aider l’ordre et la justice à régner. Elle s’était facilement renfermée dans son métier, se cramponnant à ses études lorsque ses parents s’étaient séparés puis s’isolant encore plus à la mort des deux dans un laps de temps assez court. Un doux sourire aux lèvres, un peu moqueur il fallait bien l’avouer, la lieutenante reprit.

Il est vrai que sauver des vies après être resté enfermer dans une salle d’opération plusieurs heures et ça, à raison de plusieurs fois par semaine, c’est vraiment pas palpitant comme vie, ni impressionnant d’ailleurs.

Ils étaient tous les deux de part leur métier respectif confrontés à la mort dans leur quotidien. Mais Hope trouvait que ce qu’accomplissait le jeune homme était bien plus impressionnant. Après tout, les nombreuses années d’étude nécessaires pour devenir chirurgien cardiologue n’étaient pas là juste pour faire jolies. La preuve en était que la brune le prenait très au sérieu. En deux phrases, il réussit à faire accélérer les battements de son coeur, l’inquiétant à propos d’une chose que Melchiah semblait avoir repéré. Evidemment, les oscillements du cardiogramme s’étaient immédiatement accentués lorsqu’il lui avait fait comprendre qu’il y avait quelque chose, à l’instar de leur proximité au début du rendez-vous. C’est alors que le cardiologue se lança dans des explications qui ne trouvèrent écho chez la jeune femme qu’une fois qu’il fut arrivé à la fin. Evidemment que son travail était éprouvant, c’était pour cela qu’elle faisait autant de sport, pour se vider la tête. Entre sa routine jogging et musculation du matin et sa séance de yoga et renforcement musculaire le soir, la lieutenant arrivait à fatiguer suffisamment son corps pour bien dormir et ainsi reposer également son esprit qui était malmené par les dossiers les plus gores, farfelues et absurdes qu’elle pouvait avoir.

Mes deux à trois heures d’activités sportives par jour sont là pour ça Melchiah. Mais j’imagine que le travail d’un chirurgien comme toi n’est pas de tout repos non plus. Que fais-tu pour te changer les idées et oublier ce qui peut te peser concernant le boulot ?

La brune était le genre de personnes à facilement retourner les questions à leur expéditeur. Il faut dire que c’était le but de tout bon enquêteur que de savoir glaner les informations au bon endroit et au bon moment. Boxer et courir étaient ses passes temps préférés pour se défouler. Il est vrai que les rares sorties autour d’un verre avec Siofra ou Victoria lui avaient fait du bien aussi, mais seulement en partie. Les filles avaient tendance à lui poser beaucoup de questions, à vouloir l’inciter à se lâcher plus. Mais à l’heure actuelle, elle s’en sentait bien incapable. Attrapant son haut, après avoir encore une fois épongé son torse et son dos, elle l’enfila ni une ni deux. Heureusement que comme à son habitude, Hope avait prévu le coup en portant un soutien-gorge de sport, efficace et couvrant. Ce n’était pas le genre de tenue qui la dérangeait, ayant l’habitude de combattre dans sa salle en legging et brassière de sport. Maintenant que les retrouvailles du début étaient passées, elle n’était plus gênée par l’aura du jeune homme. Enfin ça, c’était jusqu’à ce qu’il aborde sa vie privée, appuyant ses propos sur le fait que son coeur réagissait au moindre contact physique. Si son regard était des plus sérieux, tout comme son expression faciale, le rouge qui apparut sur ses joues en disait long. Reprenant sa respiration pour calmer son coeur dont les battements plus rapides s’entendaient nettement avec l’électrocardiogramme, elle lui répondit :

Tu ne me sembles pas plus accompagné que moi. C’est quoi ton excuse pour que cela soit bien ou normal ? Personnellement je préfère être seule que mal accompagnée. Et puis, avec mon emploi du temps avec le boulot, je vois pas quand je verrais des gens ou rencontrerait qui que ce soit.

A part par nécessité, dans le cadre de son travail ou à la salle, sinon les rencontres allaient forcément être très limitées. La dernière remarque du docteur Valeyard ne la laissa pour autant pas insensible.

Mais être avec quelqu’un, c’est aussi lui permettre de nous faire vivre un enfer non ?

S’il avait été fort, ne laissant rien paraître, Hope avait bien senti que son père avait eu du mal à digérer la tromperie de sa mère et leur divorce. Même s’il avait retrouvé quelqu’un par la suite, est-ce que cela avait valu le coup ? Dans son entourage, les hommes plaisants de son âge, elle les connaissait quasiment tous via le travail. Et il était hors de question pour la jeune lieutenante de tenter quoi que ce soit avec un collègue de travail. Elle avait bien trop à perdre, même pour une histoire d’un soir. La brune avait fonctionné ainsi plus jeune pour profiter un peu. Mais cela ne lui avait pas réellement convenu et depuis, ses relations s’étaient faites rares.

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La remarque du docteur concernant le fait qu’il était plus incroyable de constater ce que faisait les gens de leur vie que de les sauver la laissa un peu estomaqué. Elle ne pouvait absolument pas le contredire à ce sujet. En travaillant dans la police, elle voyait vraiment de tout, de belles choses, mais surtout des façons d’être ou de faire qui surprenaient voir qui donnaient envie de vomir. Il était vrai que donner une seconde chance à quelqu’un ne l’obligeait pas pour autant à faire les bons choix par la suite. Et par bon, c’était de son point de vue à elle. Après tout, la notion de bonnes ou mauvaises choses était propre à chacun. Esquissant un faible sourire, acquiesçant de la tête, la brune ne pouvait le contredire. C’est ainsi que la conversation dévia sur le besoin de se vider l’esprit en dehors du travail. Melchiah semblait se soucier de sa vie personnelle et de son coeur d’un point de vue sentimental et non musculaire. Il semblait s’inquiéter pour elle sans qu’elle ne sache réellement pourquoi et c’est probablement ce qui la perturba le plus. Sur la défensive, elle mit en avant les nombreuses heures de sport qu’elle faisait pour se changer les idées et s’occuper en dehors des heures de travail. Elle finit même par retourner la question au jeune homme, déviant ainsi la conversation d’elle-même. Ce dernier resta vague dans un premier temps, ne se doutant pas qu’elle n’était pas comme tout le monde à ce niveau là, qu’elle fuyait presque les contacts avec les autres parfois. Elle fut surprise d’apprendre qu’il jouait non pas d’un mais de plusieurs instruments. Elle n’avait jamais elle-même touchée à ce genre de choses mais elle savait combien l’apprentissage d’un instrument de musique était long et fastidieux. Le ton de sa voix laissa ressortir à quel point elle était impressionnée mais aussi curieuse d’écouter un jour le cardiologue jouer.

Je serais curieuse de t’écouter jouer un jour pour voir quel style de musique te colle le plus à la peau.

Il y eu un nouveau changement de sujet qui ne fut pas pour le plaisir de la jeune femme. S’intéressant à sa vie privée, Melchiah alla jusqu’à se pencher sur sa vie sentimentale, sur ses relations, jugeant nécessaire qu’elle se trouve quelqu’un. La lieutenante se retint de lui demander en quoi ça pouvait bien le regarder, sa vie personnelle n’appartenant qu’à elle. A la place, elle préféra renvoyer la question dans les dents du cardiologue, sans se douter qu’elle allait être celle qui allait s’en mordre les doigts. Sa remarque tomba et si elle laissait la porte ouverte à beaucoup de possibilités, le ton de la voix de son médecin ne semblait pas laisser entendre qu’ils avaient rompu. Il n’attendit pas longtemps avant d’abattre le couperet de la vérité et faire se sentir Hope mal à l’aise. Il avait perdu la femme qu’il avait chéri des suite d’une crise cardiaque, un comble en soit pour un cardiologue. La brune sentait que le sujet était plus que délicat et s’en voulait de l’avoir dévié sur son interlocuteur. Il trouva toutefois l’envie de répondre à sa question, lui confirmant au passage qu’elle avait raison de se méfier. Le fait que cela puisse aussi être une bonne chose fut totalement obscurci dans l’esprit de la belle. La perte de ses parents lui avait déjà fait bien trop de mal. Cela l’avait terrassé, même si elle n’en avait rien montré c’est pourquoi elle s’était renfermée sur elle-même. Laissant un silence s’installer entre eux, la lieutenante finit par briser ce silence pesant :

Je suppose que chacun voit cela de son point de vue et fait ses choix en fonction de cela. Merci encore Melchiah pour ce bilan annuel. Est-ce nécessaire de poursuivre après tout ce temps ?

Le cardiologue lui répondit que cela restait nécessaire de surveiller son coeur régulièrement afin de détecter la maladie le plus tôt possible si jamais elle l’avait aussi. Elle reprit donc :

Je vais voir avec la secrétaire pour le prochain rendez-vous alors. Merci et bonne journée.

Hope se leva, serra la main du médecin et s’en alla après avoir attrapé son sac, faisant une halte à l’accueil pour fixer le rendez-vous sur l’année suivante, histoire d’être tranquille. Puis elle rentra chez elle, penaude, mal à l’aise à l’idée d’avoir poussé le beau brun à se remémorer de mauvais souvenirs. Elle n’avait pas osé lui poser plus de questions comme par exemple depuis combien de temps avait-il perdu celle qui avait semblé être l’amour de sa vie au vue de la façon dont ça le touchait. Après tout, de la même manière qu’elle en avait eu envie, il aurait très bien pu envoyer paître la jeune femme qui se serait mêlée de ce qui ne la regardait pas.