Hold My Girl



Quitter la ville lui était devenue nécessaire. Après des mois de recherches dans les tréfonds de Philadelphie, elle ne supportait plus le bruissement de la vie entre les immeubles américains. Cruelle obsession que la sienne qui le faisait apparaitre l'ombre de son bien-aimé dans chaque homme aux cheveux clairs et au sourire enjôleur. Naïves croyances que les siennes qui avait manqué de lui porté préjudices lorsque persuadée qu'il s'agissait bien de lui, elle avait failli suivre un homme aux intentions malveillante, usant de sa candeur pour obtenir des faveurs qu'elle ne voulait donner qu'à un seul. Avec un soupire de lassitude, la jeune femme reposa son front dans la paume de sa main. Elle n'était pas une déesse du monde moderne, et elle ne s'y faisait pas. Son enveloppe, elle aussi, n'avait jamais été habituée aux grandes étendues urbaines et il lui manquait, ce temps où la nature était encore indomptable, repère des dieux et des esprits, avant que l'homme ne parviennent à instaurer sa suprématie sur ce monde. C'était avec un vif intérêt qu'elle avait entendu une conversation ravivant de vieux souvenirs. Une île, lointaine, où l'on célébrait la générosité d'un dieu envers l'une de ses habitantes, lui offrant la vie éternelle. Elle ignorait si pareille don c'était déjà produit: un dieu prenant une disciple ... Possible. Toujours était-il que la légende disait vrai: elle était devenue immortelle en vivant dans la mémoire des habitants de l'île, en étant célébré tous les ans. L'île ne lui était pas totalement inconnue: il lui semblait avoir entendu Baldr lui en parler. De même, elle savait combien il aimait ce genre d'histoire, et elle ne connaissait qu'un dieu pour être aussi généreux envers les autres. Si elle avait perdu un peu l'espoir de le trouver rapidement, elle gardait en tête qu'il pouvait s'agir d'une piste comme une autre et qu'elle serait idiote de ne pas l'exploiter. Tout au long de son vol, elle s'était sentie stupide de ne pas y avoir pensé plus tôt mais l'espoir qui avait commencé à naitre dans son coeur. Une forme d'appréhension avait commencé à faire son chemin dans son être lorsqu'une fois arrivée sur l'île, elle grimpa charriot. Elle détonnait quelque peu avec le décor sauvage dans son ensemble clair. Sa jupe brune évasée lui arrivait juste au dessus des genoux et son pull crème venait la protégé de la brise fraiche qui parvenait cependant à faire rougir ses joues. Au moment de descendre, elle se maudit d'avoir choisit ses chaussures de ville, oubliant la praticité au profit de l'élégance: si elle le voyait, elle voulait être à son avantage, mais cela lui posait désormais un douloureux problème pour son égo. Elle ne parvenait à descendre du charriot sans prendre le risque d'exposer à la vue de tous des parties de son corps qu'elle cachait avec pudeur.

Une silhouette salvatrice apparue dans son champ de vision, tendant les bras pour poser des mains larges mais délicates vers ses hanches. S'approchant, la jeune femme s'apprêtait à offrir un sourire de remerciement à son sauveur lorsque, croisant son regard, elle se sentie comme traverser par une décharge. Posant des mains hésitantes sur les épaules de l'homme, son regard ne le quitta un instant alors qu'il l'attrapait pour la faire descendre. Comme hypnotisée, Nanna ne parvenait à se détacher de lui se demandant s'il s'agissait là encore d'une obsession ou de ce qu'elle espérait être la réalité. Elle en était persuadée, l'homme qui se tenait devant elle ne pouvait être que de Lui.  « Merci » lui adressa-t-elle d'une voix douce en replaçant derrière son oreille, une mèche échappée durant sa descente vers la terre ferme. Rougissante, elle baissa les yeux vers le sol avant de les remonter, timide, vers celui dont elle était persuadée qu'il était l'homme qu'elle recherchait. « Ne nous sommes nous pas déjà vu ? » demanda-t-elle, candide mais peu désireuse de réitéré l'expérience de la dernière fois. S'il était Baldr, il la reconnaitrait aussi ! Ou il laisserait filtrer une information à son propos pour ne pas ébruiter sa nature véritable ?    

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Elle était comme hypnotisé par son regard et quelque chose en elle lui disait que cette fois, ce n'était pas comme les autres. Non, cette fois, elle en était certaine, c'était bien Baldr. Le soucis de ce monde était les humains, ceux qui ne pouvaient comprendre, ceux qui avec gêne, expliquaient que non ou ceux qui profitaient de la situation. Combien de fois avait-elle vécu cette certitude ? Combien de fois avait-elle pensé avoir retrouvé sa moitié, son âme soeur, sans que cela ne soit le cas ? La désillusion était toujours brutale. Douloureuse tandis qu'à elle se rappelait la souffrance des veuves, tandis que son coeur menaçaient de fondre en elle et que les larmes ravageaient son visage. Il lui manquait tant, jour après jour, tandis qu'elle avait été jusqu'à le suivre en Helheim, incapable de vivre sans lui. Mais, cet instant qu'elle avait cru privilégié, ce moment où elle était certaine d'avoir enfin trouvé son bien aimé s'acheva en un instant. Une phrase qui, malgré la larme coulant sur sa joue, effaça ses doutes. Un visage banal ? La modestie de Baldr lui était connu, mais s'il avait été celui qu'elle cherchait ... N'aurait-il pas tenté d'aborder la possibilité que ce soit elle ? L'avait-il oublié ? Elle hocha la tête, emplie de tristesse et sentant ses forces l'abandonner. Tout ça pour si peu ... « Oh je vois ... » dit-elle d'une voix basse, perdant le rose de ses joues pour une mine plus abattue. Une voix les interpella, rappelant à l'homme qu'il avait du travail. « Dé ... Désolée de vous avoir dérangé ! » lui dit-elle avant de s'incliner et de le voir disparaitre, traîné à d'autres occupations. Elle en était pourtant certaine. Ce regard, cette force, ce sourire ... Peut importait l'enveloppe, elle l'aurait reconnu. Et pourtant ... Ses demandes étaient restée bredouilles. Elle tenta de se convaincre que cela n'était rien, que ce n'était que le début de la journée et qu'il y avait plein d'hommes qui, potentiellement, pouvaient être celui qu'elle recherchait. Mais se convaincre et le penser sincèrement étaient deux choses différentes. Profitant d'un décor de rêve, Tabatha s'éloigna dans le bourg, rêvant à cet homme dont elle ne parvenait à s'ôter de l'esprit l'étrange certitude qu'il était Baldr.  

Si tout était propice à la fête et à la joie, la déesse sentait un profond désespoir s'emparer de son être. Elle avait tant rêvé de retrouvailles passionnée, immédiate, ayant trop vu de film récemment, s'inspirant d'histoire hollywoodienne pour visualiser ce moment si spécial à ses yeux. Eux qui avaient été séparé tant de temps, le destin leur ferait sans doute ce cadeau ? Cela aurait été si parfait ... Devant elle, les premières animations de la fête se déroulaient mais son statut d'étrangère, et son enthousiasme perdu, la laissèrent de côté, observant de loin, rêvant sans participer. Elle poussa un cri lorsqu'une voix, dans son dos, très proche d'elle, la surprit. Réflexe la poussant à se retourner, sa surprise ne fut que plus grande de voir l'homme qui lui était venu en aide un peu plus tôt. Nouvel objet d'obsession désormais devant elle, posant sur son visage, ce regard qui la troublait étrangement. Il déposa sur sa tête, une couronne de fleurs qu'elle ne fit qu'entrapercevoir, frémissant alors qu'il s'appliquait à mettre de l'ordre dans ses mèches dorées. « Oh ! Merci beaucoup ! » dit-elle d'une petite voix, heureuse, dans une part de con coeur, de le voir revenir. « J'espère que je n'ai pas l'air trop ridicule ? » demanda-t-elle tout en relevant les yeux, soutenant ce regard qui la faisait frissonner intérieurement. Sa voix semblait également contrôler ses sens, accentué cette impression de fragilité qui lui rappelait la lointaine époque où elle n'était qu'une jouvencelle sous le charme du plus beaux de tous les dieux. Ses doutes refirent surface. Comment pouvait-il s'agir de quelqu'un d'autre que de lui ? Etait-elle donc si désespérée pour voir en chaque homme, l'image de son bienaimé disparu ? Le temps avait-il finalement eut raison d'elle et de ses promesses pour qu'elle se laisse ainsi séduire par un inconnu qui ne semblait pas savoir qui elle était ? « Aussi étrange que cela puisse paraitre, je connais ce village depuis ... Si longtemps que je ne m'en souviens même pas. » avoua-t-elle, laissant planer le doute sur son âge, et donc le nombre d'années en question. « J'espérais ... Je ne sais pas vraiment pour être honnête. Je pense que j'espérais y retrouver ce que j'avais perdu. » Elle eut un soupire suivit d'un sourire triste. C'était sa dernière piste, sa dernière idée. Dès qu'elle serait repartie, ses recherches reprendraient mais sans la moindre idée d'où pouvait se trouver celui pour qui elle s'était laissé mourir un jour. N'y avait-il aucune chance que ce soit lui ? « Et vous ? Désolée, mais ... Vous ne semblez pas du coin bien que vous en connaissiez toutes les subtilités. » demanda-t-elle tout en détournant les yeux vers les silhouettes rieuses et dansantes à quelques mètres de là.

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 Alors que l'inconnu la complimentait, Tabatha se sentie transportée dans l'ambiance de la fête. Une joie dont elle ignorait si elle venait de son aura ou tout simplement de l'instant qu'elle partageait, des festivités, de se trouver dans un endroit qu'elle connaissait par son disparu époux, l'emplissait d'une douce chaleur. Une certaine douceur s'échappait de cet homme au physique imposant: face à elle, frêle et fragile demoiselle aux cheveux dorés, les épaules bien bâties du blond appelaient à se réfugier dans l'étreinte de ces bras forts et puissants. « Je vous crois sur parole, dans ce cas. » concéda-t-elle, posant sur l'avant bras de son inconnu, une main pleine de remerciements. Vieille déesse, Nanna n'était pas habituée aux effusions tactiles des jeunes humains d'aujourd'hui. Pudique, elle préférait de loin l'élégance de remerciements subtiles qu'un saut dans les bras de quelqu'un qu'elle ne connaissait pas. L'instant de grâce trouva sa fin dans les mots qui suivirent: une histoire magnifiques et romantiques, rappelant à la jeune femme, sa propre histoire d'amour. Espoir, à nouveau, de croire que cela pouvait être lui, que des promesses telles que celles faites à l'épouse pouvaient s'apparenter à celles que Baldr lui avait faites autrefois. Illusion. L'épouse était décédée et l'histoire ne laissait aucune place au doute. Son regard s'attrista: ce ne pouvait donc être lui ? En plus de sa déception personnelle, elle ressentait une vague de compassion pour cet homme qui, comme elle, avait perdu la personne la plus importante de sa vie.  « Je suis vraiment désolée pour votre femme. » lui dit-elle, serrant entre ses doigts fins, la main qu'il venait de poser sur la sienne. Fermant les yeux, elle sentie ses forces l'abandonner, comme à chaque fois que ses pensées tristes la ramenait à Lui. Soleil de sa vie, lumière de ses jours. Sans lui, la vie n'était qu'une nuit perpétuelle, obscurité dans laquelle l'ombre de Baldr ne pouvait plus rayonner. Comme à chaque fois, l'abandonnaient ses pouvoirs, la laissant simple humaine et non plus déesse de la Joie et de la Paix.  « Je ne connais que trop bien votre sentiment. J'ai perdu mon mari, moi aussi. » Finit-elle par dire, après un court silence. Dans sa phrase, le sens de perte était littéral: elle ne savait pas où il se trouvait mais elle était certaine qu'il ne se trouvait pas au Hellheim. Bien sur, l'humain qui lui faisait face n'était pas obligé de le savoir et le terme de perte, pluri-sémantique, prenait un sens nouveau alors qu'il entrait en écho avec l'histoire de l'inconnu.  « Je me souviens encore ... Le jour de notre mariage, je ne parvenais pas à comprendre comment lui, si beau, attirant tous les regards avait pu s'intéresser à une femme aussi discrète que moi. A présent, tous semblent lui ressembler et c'est lorsque mon coeur laisse place à mon esprit que je me rends compte que ce ne sont que de pâles copies. » Un sourire nostalgique se dessina sur ses lèvres, Baldr le lumineux, lumière du jour, et Nana, lumière nocturne, paix éternelle. On disait qu'ils formaient un couple harmonieux, et il lui avait fallut du temps pour le croire.  « Le destin est toujours cruel lorsqu'il nous retire ceux que nous aimons. »

Un silence pesant s'abattit sur leur drôle de duo. La conversation n'était pas des plus joyeuses, mais elle leur faisait du bien à tout deux. En dehors de quelques dieux de son panthéon, elle ne parlait jamais de sa peine, que d'espoir, de son envie de retrouver Baldr. Quelque part, le fait de confier ses sentiments profonds lui permettait de s'apaiser quelque peu. Alors qu'il sautait sur ses jambes, lui intimant de faire de même tout en la tirant par la bras, elle sursauta laissant échapper un  « Pardon ? » qui témoignait de sa totale incompréhension. Elle étouffa un rire à sa déclaration, offrant déjà le sourire qu'il cherchait tant à lui rendre et se laissa guider sans prêter attention au reste du monde. Depuis combien de temps n'avait-elle pas dansé ? Un peu gênée au départ, frissonnant en sentant l'étreinte de son inconnu, elle se détendit, se laissant guider de pas à pas, appréciant un moment rare qu'elle n'avait pas vécu depuis plusieurs siècle. Nanna étouffa une part de culpabilité, lui soufflant que sa dernière danse remontait sans doute à Baldr et que se laisser aller ainsi était une trahison. Mais au fond d'elle, elle savait que Baldr n'était qu'amour, joie et bonheur, qu'il ne lui en aurait jamais voulu de ne pas le pleurer quelques instants pour aller danser. Bien au contraire. Un nouveau rire, gêné cette fois, vint clore les quelques minutes où elle avait oublié qui elle était, ne s'intéressant qu'à celui qui la tenait dans ses bras. Leur public soudain présent dans son esprit lui tirèrent de nouvelles rougeurs aux joues et, porté par le rire du jeune homme, elle exécuta une révérence gracieuse pour remercier l'auditoire, se joignant à son partenaire dans un éclat cristallin.  « Je vous en prie, il faut être deux pour cela. » dit-elle reprenant son souffle.  « Je crois que nous avons tout deux fait sensation ! » ajouta-t-elle avec un clin d'oeil complice. Nouveau silence, elle observa la foule, retournée à ses occupations. Certains reprenaient une danse de groupe tandis que d'autre se pressaient devait des comptoirs chargé de nourriture en tout genre. Dans un dernier souffle, elle se tourna a nouveau vers lui. « Merci. Vous aviez raison, cela fait du bien. » Un sourire accompagna ses paroles. « Au fait ! Je m'appelle Tabatha. » finit-elle par dire, lui tendant la main comme s'ils venaient de se rencontrer.

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Elle riait encore de leur danse lorsqu'il exposa son point de vue sur les bienfaits de s'aérer l'esprit et elle devait admettre, après autant de temps passé entre préoccupations mortelles et quêtes divines, que l'idée était loin d'être mauvaise. Il ne lui semblait pas avoir songé à autre chose qu'à son aimé disparu depuis des siècles et il n'y avait littéralement aucune exagération dans ces mots. Depuis son départ du Sanctum, elle n'avait prit d'instant pour elle, d'instant sans penser à lui. Baldr. Il n'était pas que son mari, il était son meilleur ami, son confident, son amant au delà des engagement maritaux qu'ils avaient l'un envers l'autre. Et pourtant. La voilà sur cette ile dont il lui parlait tant, en présence d'un autre, et elle l'en oubliait presque. Femme horrible qu'elle pouvait être. Pourtant, une voix dans son esprit lui murmurait qu'il n'aurait pas voulu qu'elle s'appesantisse, qu'il serait fier de la voir rayonner ainsi, première fois depuis bien longtemps. Elle décida de se fier à cette idée, de se laisser aller à une soirée pour elle, égoïste, avant de reprendre ses recherches. Ne pouvant cacher sa mine surprise, elle répondit. « Singulier ? Je n'avais jamais vu les choses ainsi, mais je vous remercie. Recevoir pareil compliment est toujours le bienvenue. » Il était vrai qu'elle ne connaissait guère d'autre Tabatha ces derniers temps, mais ce nommer Nanna n'aurait pas non plus arrangé les choses. Et puis, une lettre en moins et on tombait sur de l'argot de mortel ! Non, son nom divin était une chose sacrée qu'elle ne reprendrait que le jour où son époux ferait surface. Alors qu'il se présentait aussi, elle se pencha sur lui, taquine. « Chercheriez vous à faire plus original, monsieur ? Dans ce cas, je m'avoue vaincue. » Les mains en l'air, en signe de reddition, Tabatha continuait de sourire de cette mimique bienveillante qui était la sienne. Cessant de glousser, retrouvant un peu de sérieux, elle affirma « C'est un plaisir de vous connaitre, Melchiah. » Rares étaient les mortels a lui faire une impression si vivace: il ne cherchait ni à profiter d'elle, ni à la laisser dans sa peine et en cela, il lui rappelait Baldr. Mais la mention d'une épouse décédée lui avait fait volé cette idée en éclat. Jamais Baldr n'admettrait qu'elle soit morte: il l'avait vu quitter le Helheim après tout ! Il savait que malgré son coeur brisé, malgré ses suppliques, Hemrod l'avait ramené auprès des siens.


Tout sourire face à la gentillesse de l'homme de la présenter au village, de l'intégrer non seulement à la fête mais à tout ce qui se jouait en dehors des festivités, elle se laissait aller à quelques rires, heureuse de ce moment d'insouciance. Prise dans l'élan de gaieté qui régnait, son pouvoir se diffusait, aura de bonheur sur des gens déjà joyeux. C'était cela qu'elle aimait dans le fait d'être une déesse de la joie. Voir tous ces sourires, voir ce bonheur dans le regard des gens. Elle en oubliait ses propres démons, ses peines quotidienne, ses regrets. Et puis il y eut ces mots. Cinq mots malheureux qui lui firent manquer un battement de coeur. Ma petite étoile des neufs. Depuis combien de temps n'avait-elle pas entendu ces mots ? Tellement qu'elle en avait presque oublier ce surnom si délicat que son aimé lui donnait, dans les temps passés. Tremblante, elle tentait de se reprendre, de ne rien laisser paraitre du trouble qui l'habitait alors que Melchiah se tournait vers elle, l'apostrophant soudainement. « En moi ? Vraiment ? » dit-elle, la voix nouée par l'émotion, perturbée de ce qu'elle venait d'entendre sans le relier à la vision maternelle qui s'offrait à eux. Il n'y avait que Bladr pour connaitre cette expression, que lui pour l'avoir transmis par ici. Vague de tristesse puis d'espoir alors qu'elle prenait conscience qu'il devait forcément être passé par ici pour que ces habitants connaissent un surnom si intime, si spécifique à leur culte. Son regard plongé dans celui de son cavalier d'un soir, elle bafouilla quelques mots « Serait-il possible que ... Enfin ... je veux dire ... » Elle ferma les yeux, cherchant à reprendre le contrôle de ses pensées, de son coeur battant à tout rompre, d'elle même. Inspirant, expirant, inspirant de nouveau, elle rouvrit les yeux sur le jeune homme et, bien que son sourire se soit légèrement fané, demanda « Je vous écoute ? Faites moi part de vos hypothèses. » Elle était soudainement curieuse, distraction délicate qui pouvait lui éviter de penser davantage.